Coupe du monde de rugby : les Fidji en quarts, de "la folie" et des doutes
Coqueluche du public depuis le début de la Coupe du monde, les Fidji défient l'Angleterre dimanche en quart de finale. La 10e national du classement mondial veut croire en ses chances malgré les difficultés montrées lors du dernier match de poule face au modeste Portugal. Elle espère être portée par la "folie de ses fans".
"Aux Fidji, ce n'est pas de l'excitation, c'est de la folie." Seremaia Bai, un des coachs adjoints des "Fidjiens volants", est formel : tout est possible dimanche 15 octobre, lors du quart de finale de la Coupe du monde de rugby contre l'Angleterre à Marseille.
"Comme en Angleterre, nous sommes fous de rugby aux Fidji", a insisté l'ancien trois-quarts centre de Clermont, de Castres ou du club anglais de Leicester, lors d'une conférence de presse : "C'est une petite île les Fidji, les gens se lèvent à 3 h, 5 h du matin, (pour regarder les matches), et même les malades reviennent à la vie quand nous gagnons".
Dimanche, "nous n'allons pas seulement jouer un quart de finale, nous allons jouer pour notre peuple, pour les jeunes, pour les gens dans les villages, cela signifie beaucoup pour eux. Cela fait 16 ans que nous n'avions pas atteint les quarts de finale", a-t-il rappelé. "Là nous avons une nouvelle possibilité qui s'offre à nous, nous voulons en tirer le maximum".
Et en cas de victoire, "ce sera la folie", a-t-il assuré. "Le rugby c'est très important aux Fidji, ça nous donne la vie, ça rend tout le monde heureux, ça unit le pays. Quel que soit le résultat, j'espère que le pays sera fier de nous".
"En tous cas, nous sommes la seule équipe du tier 2 (niveau 2) à avoir atteint les quarts de finale, c'est déjà quelque chose dont nous devons être fiers", a insisté le coach adjoint des Fidjiens. "En tant que nation du tier 2, nous n'avons pas souvent l'occasion d'affronter des équipes du tier 1 comme l'Angleterre. Alors pour nous c'est une occasion d'aller encore plus loin".
Des doutes ont germé
L'ancien demi d'ouverture n'a pas été refroidi par les deux dernières contre performances de son équipe. Alors qu'un boulevard s'offrait à eux après leur premier succès face aux Wallabies (22-15) depuis 69 ans, les Flying Fijians ont perdu le fil des promesses entrevues dès qu'ils ont endossé le costume de favoris contre la Géorgie, battue difficilement 17-12, et surtout le Portugal (défaite 24-23).
Il leur fallait inscrire cinq points, soit une victoire bonifiée, face à ces deux équipes habituées au Tournoi B européen et considérées plus faibles sur le papier. Ils en ont bien inscrit cinq, mais pas plus, laissant ainsi planer le doute sur leur réel potentiel avant le troisième quart de finale de leur histoire.
En 1987, les Fidjiens avaient également concédé deux défaites en poule, avant de tomber contre la France, future finaliste. En 2007, ils n'avaient rien pu faire face à l'Afrique du Sud, future vainqueure.
La pression du résultat, la grandeur de l'événement, ont sûrement joué dans l'approche mentale des deux dernières rencontres de poule cette année. La première a été remportée de justesse face aux Lelos (17-12) quelques heures après l'annonce du décès du fils de 7 ans de Josua Tuisova des suites d'une longue maladie.
La seconde, dimanche, avec comme enjeu un point minimum à prendre pour devancer les Australiens dans la poule C, a failli tourner à la désillusion. Surtout lorsque les Portugais, révélations de ce mondial, ont pris les commandes du match en menant deux fois d'un essai transformé d'écart.
Certes, les Flying Fijians ont montré qu'ils avaient des ressources en recollant à chaque fois au score et en passant même brièvement devant, mais ils n'ont pas de marge, surtout quand ils oublient de structurer leur rugby comme ils avaient réussi à le faire par séquences au début de la compétition.
Les coéquipiers de Levani Botia, rare cadre au niveau, ont ainsi craqué juste avant la sirène face aux Lusitaniens (23-24), une défaite inattendue avec trois essais encaissés mais finalement sans conséquence. Ou presque.
Le fol espoir d'une demi-finale
Les doutes ont remplacé les espoirs nés de leur entame de folie face aux Gallois, lors d'une rencontre achevée sur une défaite frustrante (32-26) avec un en-avant de Semi Radradra en bout de ligne sur la dernière action, et de leur conquête digne des meilleures équipes face aux Wallabies une semaine plus tard.
La greffe Simon Raiwalui, ancien 2e ligne et capitaine (39 sélections) nommé en février à la suite du départ de Vern Cotter pour raisons personnelles, ne peut être remise en cause.
L'ancien entraîneur adjoint du Racing 92 et du Stade Français a su marier l'ADN des rois du rugby à VII avec une rigueur sur les fondamentaux. Il a aussi réussi l'amalgame entre stars européanisées et talents locaux issus de la franchise Drua (18 des 33 sélectionnés) évoluant dans le Super Rugby de l'hémisphère Sud.
L'objectif de qualification atteint, les Fidji devront montrer un tout autre visage, dimanche, à Marseille, contre le XV de la Rose pour briser le plafond de verre des quarts de finale.
Si possible proche de celui montré il y a 50 jours lors de leur victoire historique à Twickenham (30-22) en fin de préparation, qui les avait parfaitement lancés. "Nous nous attendons à ce que ce soit différent", nuance cependant Seramaïa Baï
Ils connaissent la recette. Les Anglais, eux, connaissent désormais leurs faiblesses.
Avec AFP