AFFAIRES OUBLIÉES. L'affaire Evelyne Boucher, cette ado oubliée de tous que l'ADN a vengée
Evelyne Boucher, 16 ans, a été violée, battue et tuée le 7 décembre 1987 aux Angles (Gard). Closer revient sur cette sinistre affaire.
8 décembre 1987. Au petit matin, deux chasseurs traversent un bois des Angles, dans le Gard, lorsqu'ils découvrent le corps sans vie d'une adolescente. Couchée sur le ventre, presque nue, la jeune fille a été frappée, étranglée, violée puis abattue froidement d'un balle dans la nuque. Ses vêtements, tâchés de sang, gisent à quelques centimètres d'elle, à côté de son cartable. Une scène de crime épouvantable, préambule sinistre d'une affaire qui hantera la France entière pendant près de 20 ans.
Rapidement, le corps est identifié. Il s'agit d'Evelyne Boucher, une lycéenne sans histoire résidant impasse des pinsons, à Villeneuve-lès-Avignon. L'autopsie révèle notamment la présence de sperme dans son corps et son vagin, mais les analyses ADN ne permettent pas d'identifier un suspect. Néanmoins, de nombreux témoins permettent aux enquêteurs de retracer les dernières heures d'Evelyne. Un certain Donado, serveur au bar Le Carnot, indique avoir passé une partie de la journée avec elle. Dans un bar, elle lui aurait déclaré sa flamme mais Donado, s'estimant trop vieux pour elle, affirme avoir repoussé ses avances. Chrystelle, proche amie d'Evelyne, déclare quant à elle avoir retrouvé cette dernière en fin de journée. À 18h32 précises, les deux adolescentes sont rentrées en bus et se sont séparées pour rentrer chez elles.
Des témoignages pleins de mystère
Le parcours de la jeune victime se complique alors. Géraldine Martinasso, voisine et camarade de classe d'Evelyne, affirme avoir vu passer cette dernière devant chez elle peu après 18h30. Mais au lieu de rentrer chez elle, Evelyne est repassée dans l'autre sens quelques minutes plus tard, puis une troisième fois, cette fois à bord d'une R5 claire conduite par un homme. Géraldine Martinasso le décrit comme européen, plutôt musclé et les cheveux courts, mais ce témoignage ne permet pas à l'enquête d'avancer...
Persuadés que le meurtrier connaissait la petite impasse des pinsons, les enquêteurs interrogent tout l'entourage d'Evelyne. La mère de la lycéenne, Gisèle Cronier, épluche quant à elle toute la vie de sa fille dans l'espoir d'y trouver une piste. "Ma femme est devenue un inspecteur de police", explique Jean-Pierre Azan, le beau-père d'Evelyne, dans l'émission Canal Crime. La famille de l'adolescente demande également l'aide des médias, mais leurs efforts se révèlent vains. On parle même de crime parfait. Au bout de quelques mois, l'enquête se met à piétiner et l'affaire Evelyne Boucher tombe de plus en plus dans l'oubli...
Jusqu'au 16 mai 2003. Dans le parking du pont du Gard, près de Nîmes, les vigiles empêchent une voiture de sortir sans payer. Son conducteur, un certain Robert Greiner, explique avoir perdu son ticket, mais le ton monte et une bagarre finit par éclater. Interpellé, Greiner écope d'une amende et de trois mois de prison avec sursis pour violences volontaires. Comme le prévoit la loi pour la sécurité intérieure, l'ADN du bagarreur est prélevée. La police fait alors une terrible découverte.
La vérité dans l'ADN
Bien qu'inconnu des services de police, Greiner, père de famille convenable à tous points de vue, a déjà son ADN dans le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNEG). Celui-ci correspond allèle pour allèle à celui prélevé sur le corps d'une certaine Evelyne Boucher, retrouvée morte quinze ans plus tôt. À la stupeur générale, l'enquête sur la mort de l'adolescente reprend de plus belle. Il est révélé qu'à l'époque du meurtre, Robert Greiner avait 35 ans. Il était pompier à la caserne du 116 rue Carreterie, située non loin du lycée Théodore Aubanel, où Evelyne était scolarisée. Son meilleur ami, également pompier, habitait sur l'impasse des pinsons.
Tout accable Robert Greiner, mais l'homme de 51 ans nie toute implication dans le viol et le meurtre d'Evelyne Boucher. Il est néanmoins arrêté, et Géraldine Martinasso, l'ex-voisine de la victime, l'identifie formellement comme l'homme qui conduisait la voiture dans laquelle elle a vu passer Evelyne, le soir du meurtre. Le 7 avril 2008, Greiner est jugé à la cour d'assises du Gard à Nîmes. Après des semaines de mutisme, il prétend avoir eu un rapport consenti avec l'adolescente mais nie toujours le viol et le meurtre. Il n'échappe toutefois pas à une condamnation à la prison à vie.
Trente-cinq ans après le meurtre d'Evelyne Boucher, Robert Greiner continue de nier. Mais l'ADN a parlé. Selon les experts, il est scientifiquement impossible que l'échantillon retrouvé sur Evelyne Boucher ne soit pas celui de Greiner.