Présidentielle : que proposent les candidats pour l’environnement ?
ÉLYSÉE 2022
À moins de deux mois du premier tour de l'élection présidentielle, l'écologie ne parvient toujours pas à s'imposer dans la campagne, en raison notamment d'une actualité chahutée par la guerre en Ukraine. Pourtant, la majorité des candidats ont émis de nombreuses propositions en la matière. Tour d’horizon des programmes.
La crise sanitaire puis la crise en Ukraine en ont fait oublier une autre... la crise environnementale. Cette dernière demeure une préoccupation majeure des Français. Un sondage Ipsos Sopra-Steria, commandé par la radio publique France Inter, et publié fin janvier, révèle que l’environnement arrive en deuxième position dans la campagne, derrière la crise des inégalités sociales. Mais à moins de deux mois de l’élection présidentielle, ce thème majeur peine à émerger dans le débat public. Pourtant la majorité des candidats, à gauche comme à droite, fourmillent d’idées pour défendre la planète. Passage en revue de leurs propositions.
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Le candidat de Debout La France préconise, dans son programme, 14 mesures destinées à préserver l’environnement. Parmi elles, il prévoit de multiplier par six les moyens consacrés à l'isolation thermique par rapport à 2020. Nicolas Dupont-Aignan se fixe, en outre, cinq ans pour faire disparaître les éoliennes. Il compte lancer un programme zéro déchets sur dix ans pour les océans, en visant la pollution plastique et une interdiction des produits obsolescents.
Concernant les transports, il souhaite la levée des restrictions de circulation liées à l’extension des zones à faibles émissions dans les agglomérations, supprimer les taxes sur l'essence et les véhicules de société produits en France, revenir aux 90 km/h. Il promet par ailleurs d'engager une vraie lutte contre la pollution atmosphérique en instaurant, d’une part, une politique de bonus-malus favorable aux véhicules électriques et, d’autre part, en rénovant le réseau ferroviaire traditionnel. Le candidat de Debout la France, qui défend la chasse et la ruralité, souhaite, par ailleurs, lancer un "référendum pour les animaux" pour le bien-être animal.
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Contrairement à ses adversaires de droite, la candidate socialiste veut progressivement en finir avec le nucléaire avant 2050 "sans sortie précipitée pour ne pas faire flamber le prix de l’énergie" et atteindre rapidement 100 % d'énergies renouvelables. L’actuelle maire de Paris souhaite porter l’écologie sur le volet judiciaire. Elle entend, en effet, que la loi puisse reconnaître le "crime d'écocide", instituer la fonction de défenseur de l'environnement et créer un Tribunal pénal international de l’environnement au sein de l'ONU. Présidente, elle nommera comme numéro deux du gouvernement un ministre du Climat, de la biodiversité et de l’économie. Elle propose aussi qu'un budget climat et biodiversité, voté chaque fin d’année par le Parlement, vienne fixer les programmations de réduction d’émission de carbone.
Côté transport, elle veut doubler d'ici à 2030 les petites lignes, les trains de nuit, et le fret ferroviaire, faire baisser la TVA sur les déplacements en train et instaurer une taxe empreinte carbone sur le billet d’avion, si "une alternative ferroviaire comparable existe". Anne Hidalgo prône également le développement des transports électriques grâce à des aides à l'acquisition, à la location. Elle entend aussi mettre en place une "prime climat" pour favoriser la rénovation énergétique des bâtiments et permettre "la rénovation complète" de 760 000 logements privés par an, soit 22 millions de logements d’ici à 2050. Concernant l’agriculture, elle espère interdire les engrais de synthèse, les pesticides et les néonicotinoïdes. Elle souhaite également renforcer la protection des forêts françaises en donnant plus de moyens à l’Office national des forêts et le Centre national de la propriété forestière et en mettant en place un plan de formation des métiers de la filière forêt bois. Enfin, elle veut impliquer les Gafam dans la transition écologique et organiser un sommet mondial "Paris+10" en 2025.
Logiquement, l’environnement est la pierre angulaire du programme du candidat écologiste. Pour mettre en place une vraie politique environnementale, Yannick Jadotestime d’abord qu’il faut investir 10 milliards d'euros par an pour la rénovation des bâtiments et les services publics. Comme Anne Hidalgo, il souhaite une "sortie responsable" du nucléaire "d’ici 2035". Il prône également la suppression des aides publiques aux entreprises toujours engagées dans les énergies fossiles et la mise en place d’un impôt sur la fortune (ISF) climatique. Il a également pour ambition de baisser la TVA sur les produits et services écologiques. A contrario, il veut taxer "en amont les produits fabriqués à partir de plastique vierge". Intransigeant sur la question des transports, l'eurodéputé veut interdire la vente de véhicules neufs avec un carburant fossile à partir de 2030, mettre un coup d’arrêt aux grands projets ferroviaires (comme l’axe Lyon-Turin ou le grand Paris Express) et interdire les vols intérieurs quand il existe une alternative ferroviaire.
Sans surprise, il a pour objectif d’interdire les néonicotinoïdes et le glyphosate, renforcer les aires naturelles protégées, développer les éoliennes et le photovoltaïque. Enfin, il veut interdire la chasse pendant le week-end et les vacances scolaires "pour permettre aux promeneurs un accès libre à la nature".
Dans son programme, la candidate du Rassemblement national propose peu de propositions environnementales. La première suggère d’interdire tout nouveau projet éolien terrestre et maritime, et même le démantèlement progressif des parcs existants. Interdiction qui lui permettra de redistribuer les 25 milliards d'euros prévus pour les éoliennes en mer à des subventions pour le remplacement de chaudières au fioul. Elle entend aussi mettre en place un produit d’épargne "Logement vert" pour financer la rénovation d'un bien.
Pro-nucléaire, elle souhaite aussi la mise en chantier de 5 paires d’EPR2 pour relancer la filière nucléaire et hydroélectrique tout en investissant dans l'hydrogène. Concernant les transports, Marine le Pen prévoit de rendre gratuit le train aux heures creuses pour les 18-25 ans. Enfin, sur la question du bien-être animal, elle souhaite un "plan abattoirs" pour assurer des conditions dignes et interdire l’abattage sans étourdissement (pratiqué notamment pour la viande hallal). Mais la candidate défend la chasse. Une "nécessité", selon elle, qui participe à "l'entretien des espaces" et à "la régulation des populations d'animaux" en garantissant dans le même temps "des règles fermes et des sanctions" en cas d’abus.
Le candidat Insoumis s’est doté d’un ambitieux programme écologique qui prévoit notamment de baisser de 65 % les émissions de gaz à effet de serre en 2030, soit davantage que l'objectif de 40 % fixé actuellement. Pour se faire, le député propose de lancer un plan massif de 200 milliards d’euros financé par le rétablissement de l'ISF et les taxes sur les entreprises polluantes. Il faut également organiser, selon lui, la sortie du nucléaire en démantelant les centrales et en maintenant les projets d'éoliennes offshore. Soucieux de développer les transports en commun et les infrastructures cyclables, Jean-Luc Mélenchon entend aussi diminuer le recours à la voiture traditionnelle au profit de "parcs de véhicules à faibles émissions pour les ménages à faibles revenus" et supprimer les lignes aériennes quand l’alternative en train est inférieure à quatre heures de trajet. Il est partisan de l’instauration des droits de douane sur des critères écologiques et sociaux. Il a aussi pour projet de faire des Outre-mer "des territoires pilotes de la planification écologique et des circuits courts" en assurant leur autonomie énergétique, basée à 100 % sur du renouvelable. Le leader de LFI veut aussi en finir avec l’obsolescence programmée et allonger les durées de garantie.
Il prône enfin l’interdiction des pesticides les plus dangereux et la réduction des autres, le bannissement des pratiques de chasse et de loisirs cruelles pour les animaux ainsi que la pêche électrique. Enfin, il désire promouvoir un droit international de la biodiversité marine et protéger les fonds marins en lançant un plan de dépollution.
À l’écologie “punitive”, la candidate LR préfère une écologie “positive”. Son principal objectif ? Atteindre une neutralité carbone d’ici 2050. Pour se faire, elle compte mettre en place des incitations financières pour qu’en 2035, il n’y ait plus de véhicule neuf fonctionnant avec des énergies fossiles et développer les bornes électriques. Dans le domaine des transports en commun, elle souhaite remplacer tous les véhicules roulant au diesel par des véhicules électriques, énergie produite par l’énergie nucléaire. Car l’actuelle présidente de la région Ile-de-France entend prolonger le fonctionnement des centrales existantes et lancer six nouveaux EPR.
Autres mesure-phare, Valérie Pécresse compte fusionner le Livret A et le Livret développement durable (LDD) pour créer un Livret vert destiné à financer la transition écologique. Une fusion qui permettrait de récolter près de 469 milliards d’euros pour financer les projets bas carbone. Question énergie, la candidate LR veut développer toutes les ressources renouvelables et capacités de stockage. Elle aspire enfin à plus d’innovation notamment dans les technologies d’avenir comme l’hydrogène vert. Sur l’éolien, elle propose que les habitants puissent s’y opposer et prévoit des zones d’interdiction d’implantation. Elle projette également la signature d’un accord avec des pays riverains de la Méditerranée pour l’éradication des rejets de plastiques en mer. Elle plaide pour la création d’une "réserve écologique citoyenne" constituée de membres des associations ou de personnes devant réaliser des travaux d’intérêt général (TIG) pour nettoyer les espaces naturels protégés. Elle défend une simplification des lois visant à empêcher l'annulation de projets ferroviaires. Enfin, présidente, elle n'’interdira pas tous les pesticides et s’en remettra au ministère de l'agriculture qui avisera en fonction de chaque produit.
Le candidat communiste se distingue de ses adversaires de gauche en misant notamment sur le nucléaire pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Certes, il compte investir dans les énergies renouvelables (éolien, solaire et l’hydraulique) mais aussi construire au moins six EPR. Le député du Nord souhaite, par ailleurs, une loi pour rendre obligatoire la "rénovation énergétique des logements d’ici à 2040" sans reste à charge pour les plus modestes, en y consacrant 10 milliards d’euros par an.
Concernant les transports, Fabien Rousselpropose une prime à la conversion de 10 000 euros pour une voiture "propre" tout en relançant le fret ferroviaire et les petites lignes. Pour préserver le patrimoine, le chef du PCF souhaite interdire l'exploitation minière des fonds marins et lutter contre la déforestation tropicale. Il entend, dans le même temps, empêcher le développement des élevages industriels et maintenir l'autorisation de la chasse, pratique essentielle "à la préservation de l'environnement."
Comme Marine Le Pen, Éric Zemmour prévoit de mettre fin aux projets éoliens afin de "préserver nos paysages". Et comme elle, il souhaite développer le nucléaire en faisant construire quatorze nouveaux réacteurs. Dans un chapitre de son programme consacré à la préservation du patrimoine, le candidat de Reconquête! entend interdire de nouvelles grandes surfaces et zones commerciales à l’entrée de villages ainsi que sanctionner plus durement la pratique des décharges sauvages.
Défenseur d’une "politique positive de développement durable", il souhaite privilégier les circuits courts pour la restauration collective, lancer un grand plan de dépollution des sols, établir une stratégie forestière nationale plus adaptée aux changements climatiques, sanctuariser la pratique de la chasse ou encore faire émerger une filière industrielle dans le recyclage des plastiques. Il prône également une robotisation de l’agriculture "pour limiter les pesticides et la main-d'œuvre étrangère". Pour réduire les gaz à effet de serre, il souhaite investir dans l’isolation des bâtiments résidentiels et industriels, développer l’électrique et l’hydrogène dans les transports, prioriser les lignes de train de proximité et enfin mettre en place une taxe carbone aux frontières.