Elisabeth Borne Première ministre : "Étrange que cela soit encore un événement en 2022"
À la une de la presse, ce mardi 17 mai, les réactions des quotidiens français et étrangers à la décision d'Emmanuel Macron de désigner Elisabeth Borne pour diriger le nouveau gouvernement. L’ancienne ministre du Travail est la deuxième femme nommée à ce poste en France, 30 ans après Édith Cresson.
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À la une de la presse, la nomination, en France,d'Elisabeth Borne au poste de Première ministre.
La nomination, lundi 16 mai, d’une femme à Matignon, la deuxième à diriger le gouvernement, 30 ans après Édith Cresson, enthousiasme Le Parisien/Aujourd’hui en France. "C'est elle !" : le journal évoque "un symbole fort", "la correction d’une anomalie" française, alors que "la plupart des pays du monde sont indifféremment dirigés par des femmes ou des hommes". Le journal cite la Finlande, la Suède, le Danemark, la Lituanie ou encore l’Estonie, dont les gouvernements sont dirigés par des femmes, mais aussi les instances européennes, avec Ursula von der Leyen à la tête de la Commission, et Roberta Metsola au Parlement.
Une femme à Matignon. Les Échos trouvent "étrange que cela soit encore un événement en 2022, alors qu'Angela Merkel a été chancelière pendant 16 ans et que Theresa May a occupé le 10 Downing Street, après Margaret Thatcher". Pour le journal, la "discrimination positive" dont aurait bénéficié Elisabeth Borne serait secondaire, car "personne ne peut mettre en cause ses compétences". "Une bonne connaisseuse des enjeux environnementaux, réputée autant pour sa capacité de travail que pour sa rigueur". "En 2022, le véritable événement serait que cela n'en soit pas un. Ou, pour le dire autrement, que nous admettions qu'Elisabeth Borne a été nommée uniquement pour ses qualités professionnelles et politiques", commente également La Croix.
La nomination d'Elisabeth Borne est perçue par la droite comme un signe envoyé par Emmanuel Macron… à la gauche. L'Opinion relève que, contrairement à ses deux prédécesseurs, Elisabeth Borne est "issue de la gauche" - de la gauche de la Macronie, en tout cas, qui aurait été "ultra-mobilisée pour torpiller la candidature d’une femme issue de la droite ou du centre". Elisabeth Borne, qu’on retrouve dans le dessin de Kak, en compagnie de Jean-Luc Mélenchon. Le patron des Insoumis, qui espère l’emporter aux législatives du mois prochain et se retrouver à Matignon, ironise : "C’est sympa d’assurer l'intérim jusqu'aux législatives".
Elisabeth Borne, une "techno", jamais élue, issue de la gauche : Le Figaro revient lui aussi sur la levée de boucliers, au sein de la majorité, contre le choix éventuel de l'ancienne ministre de Jacques Chirac, Catherine Vautrin - un épisode qui accréditerait l'idée qu'Emmanuel Macron aurait été "contraint de revoir ses plans in extremis" et donnerait la "la regrettable impression d’un choix par défaut".
À gauche, la nomination d’Elisabeth Borne est perçue comme un nouveau signe envoyé… à la droite. "De Jean Castex à Elisabeth Borne : du pareil à la même" : Libération considère l’arrivée à Matignon de l'ex-ministre des Transports "comme un non-événement politique, au sens où elle ne signe aucune rupture avec le quinquennat précédent, ni sur le plan écologique ni sur le plan social". Emmanuel Macron "en a manifestement fini avec le disruptif", analyse Libé, qui voit toutefois dans le "profil techno" d’Elisabeth Borne un possible "avantage pour la fonction de Première ministre chargée de la planification écologique", la nouvelle locataire de Matignon connaissant par coeur l’appareil d'État et donc son "inertie potentielle". L'ancienne ministre des Transports à l’origine des réformes de la SNCF, a également réformé l’assurance-chômage, en tant que ministre du Travail - des faits d’armes qui lui valent l’hostilité de L’Humanité. "La casse sociale à Matignon", prédit le journal. "On prend les mêmes, et on recommence" : L’Huma dit ne pas attendre de surprise "à l’issue du jeu de chaises musicales à l’intérieur de l’exécutif".
À l’image du Guardian, la presse étrangère souligne que cette nomination d’une femme à Matignon est une première depuis 30 ans. Le Temps se réjouit de voir enfin apparaître "une fissure dans le plafond de verre français" et note que la France "reste en retard sur la parité aux plus hauts sommets de l'État, alors qu'elle est considérée comme progressiste dans le monde du travail". Le quotidien suisse cite l'ancienne Première ministre Édith Cresson : "ce n'est pas le pays qui est machiste, c'est sa classe politique". Le Soir est beaucoup plus critique : "Pas de grand pas en avant, ni de moment historique. Il y a surtout un président qui souhaite tenir le gouvernail du pouvoir entre ses seules mains avec à ses côtés un parfait exécutant, fidèle, loyal". Pour le quotidien belge, "vu de la cause féminine", il s’agirait même presque d’une "caricature" : "À notre époque, désigner une femme à un poste de premier plan pour y être instrumentalisée rend un très mauvais service au combat contre le fameux plafond de verre", cingle le journal.
La presse étrangère est également partagée sur le sens du message politique envoyé par Emmanuel Macron. The New York Times, qui présente Elisabeth Borne comme une adepte du "profil bas", voit dans sa nomination une main tendue par Emmanuel Macron aux électeurs de gauche, dont le soutien lui sera nécessaire "contrôler" l'Assemblée nationale. The Times parle plutôt, lui, d’une recherche d’"unité" de la part d’Emmanuel Macron, dont le journal décrit ainsi la répartition des tâches avec Elisabeth Borne, à laquelle échoit le "rôle ingrat" de Première ministre - une spécificité bien française, selon le quotidien britannique : "Quand les choses vont bien, le président reçoit les applaudissements, et lorsqu'elles tournent mal, le Premier ministre en assume la responsabilité, permettant au chef de l'État de prendre de la hauteur". Autrement dit, de rester "jupitérien".
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