AFFAIRES OUBLIÉES. L'affaire Marcel Barbeault, le "tueur de l'ombre" de Nogent-sur-Oise
Inoubliable pour les proches des victimes, l'affaire Marcel Barbeault ne fait plus la Une mais a marqué les années 1970 par le caractère énigmatique de son protagoniste. Closer revient sur cette affaire hors norme.
Il était surnommé le "tueur de l'ombre". Le 25 mai 1981, il y a tout juste 40 ans, Marcel Barbeault, 39 ans, comparaît devant la cour d'assises de l'Oise. Père de famille exemplaire, individu calme et banal, l'accusé affirme n'avoir jamais commis les crimes qu'on lui impute. Pourtant, aussi ordinaire et innocent puisse-t-il paraître, Marcel Barbeault est bien le tueur de l'ombre. Entre 1969 et 1976, l'Isarien s'est rendu coupable de huit meurtres. Les victimes, sept femmes et un homme âgés de 20 à 45 ans, ont toutes été assassinées selon un mode opératoire similaire : leur assaillant les a approchées dans l'ombre, le soir ou au petit matin, leur a planté un poignard dans le cœur avant de les abattre d'une ou plusieurs balles dans le corps.
Mais comment l'adolescent sans histoire, membre des Cœurs vaillants est-il devenu l'angoissant tueur de l'ombre ? Pourquoi n'a-t-il été freiné qu'après huit années de violence ? Après Jacques Rançon, Guy Georges ou encore Louis Poirson, Closer se penche sur le profil mystérieux d'un tueur en série longtemps resté dans l'ombre.
Tout commence à la fin des années 1960. En janvier 1969, une série d'attaques vient perturber la petite ville de Nogent-sur-Oise, en Picardie. Le 10 janvier, Françoise Lecron échappe d'abord de peu à l'attaque d'un homme invisible, qui lui tire six coups de carabine sans l'atteindre. L'affaire interpelle mais fait peu échos, faute de preuve. Quatre jours plus tard, c'est au tour de Michèle Louvet, 17 ans, d'être prise pour cible. L'adolescente survit à la balle qu'elle a reçue, mais ne parvient pas non plus à se remémorer le visage de son agresseur. Finalement, le 23 janvier 1969, Thérèse Adam est retrouvée morte d'une balle de carabine. Elle a également été violée. Une fois encore, l'assaillant est introuvable...
Le tueur de l'ombre, un nom sur une pierre tombale
Par la suite, la carabine de celui que les habitants de Nogent appellent désormais le tueur de l'ombre se tait. Elle résonne néanmoins à nouveau le 6 février 1973, puis en 1974, 1975 et 1976. En tout, le tueur de l'ombre fait huit victimes. L'enquête est confiée à Daniel Neveu, policier de 34 ans fraîchement promu à la Police judiciaire de Creil. Là où tous les enquêteurs ont pêché, le jeune inspecteur finit par briller. Il constate en effet que tous les meurtres ont eu lieu autour du cimetière de Laigneville, où il fait d'ailleurs la découverte d'une balle de carabine 22LR, l'arme utilisée dans plusieurs des crimes. Perspicace, le jeune enquêteur compare les dénonciations ayant fait suite à la publication du portrait-robot aux noms inscrits sur les pierres tombales du cimetière. Il trouve plusieurs correspondances, dont le nom de Barbeault. Micheline Barbeault, plus précisément, décédée d'un cancer en 1968.
L'appel d'un "corbeau" anonyme et une perquisition chez le fils de Micheline Barbeault, Marcel, suffisent à Daniel Neveu pour boucler l'affaire. Interrogé par nos confrères du Parisien à l'occasion du quarantième anniversaire du procès Barbeault, le policier aujourd'hui âgé de 80 ans se souvient d'un homme au caractère fort et au visage marquant : "C'était une bête physiquement, il avait de la gueule. Un voleur aux mains habiles qui est loin d'être idiot", confie l'ex-inspecteur, qui a construit sa carrière sur sa réussite dans l'enquête Barbeault. Quarante ans après, Daniel Neveu admet repenser "parfois" à sa première prise notable. "Cela laisse des traces. (...) Les images de ces scènes de meurtre sont gravées dans ma tête, on ne peut pas les oublier", s'afflige l'octogénaire. Condamné à la prison à perpétuité le 10 juin 1981, Marcel Barbeault purge toujours sa peine à la maison centrale de Saint-Maur, dans l'Indre. Il est actuellement le plus vieux détenu de France.
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