Affaire Sarah Halimi : "On va vers la pire des lois, la loi de circonstance", déplore l'avocat Serge Portelli
"On est à des kilomètres de la moindre réflexion", s'insurge l'auteur de "Qui suis-je pour juger l'autre ?". "Une maladie mentale en France et dans tous les pays démocratiques civilisés, vous empêche d'être responsables", insiste l'avocat.
Plus de 25 000 personnes ont manifesté partout en France dimanche pour demander justice pour Sarah Halimi, cette femme de confession juive tuée en 2017 par un de ses voisins. Son meurtrier a été jugé pénalement irresponsable par le Cour de cassation. Une décision qui a suscité une vive émotion. "On va vers la pire des lois, la loi de circonstance", déplore Serge Portelli, avocat et ancien magistrat, lundi 26 avril sur franceinfo et au lendemain de l'annonce du gouvernement d'un projet de loi sur l'irresponsabilité pénale pour combler un "vide juridique".
On va vers une loi "votée sous la pression de l'opinion publique, sous le coup de l'émotion, comme cela se fait pendant si longtemps. Je pensais qu'on était un petit peu sorti de cette logique. Et en plus, on est en pleine campagne électorale. Mais là, on est à des kilomètres de la moindre réflexion", constate l'avocat et auteur de l'oeuvre Qui suis-je pour juger l'autre ?
Il n'y a pas de vide juridique
Maître Serge Portelli balaye l'idée que le meurtrier de Sarah Halimi n'a pas été jugé. "C'est faux. Je rappelle que depuis 2008, vous avez quasiment un procès qui est fait en cas d'irresponsabilité devant la chambre de l'instruction. C'est une loi qui a été votée à l'époque de Nicolas Sarkozy. Quand vous êtes irresponsable pénalement et que vous êtes placés dans un hôpital psychiatrique, ou pire dans une unité pour malades difficiles, vous dépendez du préfet et vous avez le juge des libertés qui contrôle de manière sévère si la personne peut rester hospitalisé ou s'il faut renforcer les mesures".
Le projet de loi qui sera présenté par le garde des Sceaux est censé, selon Éric Dupond-Moretti, "combler un vide juridique". Un vide qui n'existe par pour Serge Portelli. "Effectivement, quand quelqu'un prend du cannabis pour commettre un acte volontaire, il n'échappe pas à sa responsabilité, mais là on est dans un autre cas de figure", explique Serge Portelli. "Quand on fait ce passage à l'acte, cela résulte du début d'une psychose grave."
"Et une maladie mentale en France et dans tous les pays démocratiques civilisés, vous empêche d'être responsables, c'est-à-dire de répondre à des accusations formulées contre vous", conclut l'avocat.