Jeux paralympiques : le président de la délégation iranienne visé par une plainte pour torture
Deux associations ont porté plainte lundi à Paris contre Ghafoor Kargari, le président du Comité national paralympique iranien. Le collectif français Femme Azadi et l'ONG suédoise House of Liberty l'accusent de torture et le soupçonnent de crimes contre l'humanité.
Une femme avec un drapeau iranien peint sur le visage lors d'une manifestation de soutien au mouvement "Femme, vie, liberté".
Un invité qui passe mal. Deux associations ont porté plainte lundi 28 août à Paris contre Ghafoor Kargari, président du Comité national paralympique iranien actuellement en visite en France, qu'elles accusent de torture et soupçonnent de crimes contre l'humanité.
Ghafoor Kargari, membre de l'armée idéologique de la République islamique, est en France dans le cadre du séminaire des chefs de mission des comités paralympiques, a confirmé le Comité d'organisation (Cojo) à l'AFP.
Une "faute politique et éthique"
La délivrance d'un visa par les pouvoirs publics français puis la venue de Ghafoor Kargari sont une "faute politique et éthique", s'est indigné Me Emmanuel Daoud, avocat du collectif français Femme Azadi et de l'ONG suédoise House of Liberty.
Les deux associations présentent Ghafoor Kargari, né en 1962, comme un "ancien commandant et membre éminent de la Force Al-Qods du Corps des gardiens de la révolution islamique" (CGRI), l'armée idéologique de la République islamique.
"Le CGRI et le groupe Al-Qods ont été à la pointe de la répression violente des mouvements pacifiques de lutte pour la démocratie, les droits civiques et l'égalité entre les femmes et les hommes en Iran", accuse la plainte, consultée par l'AFP et déposée auprès du Parquet national antiterroriste.
Le dernier mouvement de contestation en Iran a été déclenché par la mort en septembre 2022 de Mahsa Amini, une jeune femme décédée après avoir été arrêtée par la police des mœurs, qui lui reprochait de ne pas avoir respecté l'obligation du voile.
Des centaines de personnes, parmi lesquelles des dizaines de membres des forces de sécurité, ont été tuées au cours des manifestations de l'automne 2022, tandis que des milliers de personnes étaient arrêtées, accusées par les autorités de participer à des "émeutes" fomentées par les pays occidentaux.
La venue de Ghafoor Kargari en France est "un affront et une insulte pour toutes les victimes de la répression iranienne, à commencer par les femmes", a estimé Me Daoud auprès de l'AFP.
Accusé de complicité dans "des actes de barbarie"
Ghafoor Kargari est également présenté dans la plainte comme l'un des fondateurs du Mouvement de résistance islamique d'Azerbaïdjan, "un groupe armé islamiste chiite azerbaïdjanais soutenu et financé par le CGRI" en opposition au pouvoir en place dans ce pays voisin de l'Iran.
Du fait de ces fonctions, les plaignants estiment que Ghafoor Kargari "a nécessairement participé ou s'est rendu complice des actes de barbarie et de torture perpétrés par ces groupes en Iran, en Azerbaïdjan et plus généralement dans le Caucase et en Asie centrale".
Alors supérieur hiérarchique et militaire, l'actuel président du Comité national paralympique est accusé d'avoir "participé à la conception et la mise en œuvre de la politique et de la stratégie de ces deux groupes, ce qui pourrait également qualifier ses agissements de crimes contre l'humanité".
Chef du corps du Caucase au sein de la Force Al-Qods, Ghafoor Kargari "était responsable ou impliqué dans toutes les activités de cette organisation dans les États du Caucase et en Asie centrale et en relation directe avec (des) organisations terroristes et islamiques en Azerbaïdjan concernant les attaques organisées dans cette région au cours des dernières années", assurent les associations.
En avril, l'Azerbaïdjan avait annoncé l'expulsion de quatre membres de l'ambassade d'Iran à Bakou, accusant Téhéran d'avoir fomenté une tentative de coup d'État. Les relations entre les deux voisins sont traditionnellement délicates. L'Azerbaïdjan turcophone est un proche allié de la Turquie, rivale historique de l'Iran, et achète des armes à Israël, grand adversaire de Téhéran.
Avec AFP