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Arts et People

Florence Cassez condamnée à 96 ans de prison : pourquoi a-t-elle été finalement libérée ?

En 2013, huit ans après avoir été arrêtée et condamnée à une vie en prison, Florence Cassez a été libérée. La Cour suprême du Mexique était revenue sur le jugement de la Française. Depuis sa petite cellule mexicaine, Florence Cassez n'en a pas cru ses oreilles. En janvier 2013, cette Française sans histoire ne s'était pas habituée au confort rudimentaire du Tepepan, un pénitencier au sud de Mexico où elle était enfermée depuis sept longues années, mais avait perdu foi en la justice mexicaine. Celle qui l'a condamnée à 96 ans de prison après une mascarade médiatique parce qu'elle la soupçonnait de faire partie du Zodiaque, l'organisation criminelle de son compagnon d'alors, Israël Vallarda. Pendant des années, les différents tribunaux de ce pays d'Amérique centrale ont douché ses espoirs de libération, refusant l'un après l'autre tous les recours déposés par ses avocats. Il aura fallu une crise diplomatique entre la France et le Mexique, le soutien sans faille de sa famille et les tractations de Nicolas Sarkozy puis de François Hollande pour que Florence Cassez recouvre sa liberté. En janvier 2013 donc, la libération immédiate de la Française est annoncée par la Cour suprême du Mexique. Sept ans après avoir été condamnée pour quatre enlèvements, association de malfaiteurs, possession d'armes à l'usage exclusif des forces armées et pour possession de munitions, Florence Cassez quitte sa geôle presque incrédule. Après avoir plusieurs fois rejeté les demandes de ses avocats, trois des cinq juges de la Cour ont estimé, quelques heures plus tôt, que les droits constitutionnels de la Française avaient bien été violés par les autorités. Un verdict que les avocats de la Française n'attendaient pas puisque, dans son projet initial, la juge Olga Sanchez demandait simplement le renvoi du dossier devant un juge d'appel. Son argumentaire se basait principalement sur l'"irrecevabilité" des témoignages et des preuves à charge, qui contenaient des "contradictions". Florence Cassez libérée mais pas innocentée Dans son texte, la juge évoquait également la violation des garanties constitutionnelles de Florence Cassez, dont "la présomption d'innocence", "l'assistance consulaire" et "la mise à disposition immédiate devant le ministère public", liée au montage de son arrestation. En décembre 2005, elle avait été le personnage central d'une mise en scène morbide organisée par les policiers. Arrêtée le 8 décembre avec Israël Vallarda sur l'autoroute qui relie Mexico à Cuernavaca, Florence Cassez avait été conduite au ranch de son compagnon où ils avaient tout préparé. Le lendemain, le 9 décembre 2005, les policiers font croire aux médias qu'ils diffusent en direct l'arrestation du couple, alors soupçonné de plusieurs délits et crimes. Deux télés mexicaines filment alors une séquence surréaliste, durant laquelle trois victimes d'enlèvement sont libérées et affirment avoir été kidnappés par Florence Cassez et Israël Vallarda. Trois longs mois plus tard, acculé, le présentateur star du pays a fait son mea culpa en direct tout en révélant la supercherie. "Le 9 décembre 2005, nous avons eu à transmettre l'information de sa capture, dont nous avons su par la suite qu'il s'agissait d'un montage, raconte, contrit, Carlos Loret de Mola dans son émission phare Noticieros Televisa. Ils avaient arrêté la Française un jour auparavant et les autorités ont simulé une opération comme si elle se déroulait en direct." Le pays est alors sous le choc. "Rétrospectivement, avec une analyse plus minutieuse de toutes les images, je crois que j'aurais pu découvrir la tromperie, dit-il encore. Dans l'information à chaud, comme l'arbitre de football qui n'a pas accès au ralenti et doit décider sur le coup, je ne l'ai pas fait et je le regrette." Libérée par décision des juges, Florence Cassez n'a pas été innocentée dans le verdict. "Mais elle est complètement blanchie au nom de la présomption d'innocence", précise son avocat, M. Acosta. Florence Cassez : "Je me trouve finalement très sereine" Depuis sa cellule en compagnie de son père et du consul, Florence Cassez attend le verdict sans y croire. "Je n'ai pas compris tout de suite ce qui se passait, se remémorera-t-elle une fois rentrée en France. A un moment, le consul est parti téléphoner et il n'est pas revenu pendant une demi-heure. J'ai entendu des cris dans la prison et les gardes me saluaient mais je pensais qu'ils me souhaitaient juste bonne chance." En apprenant sa libération immédiate, Florence Cassez ressent "un choc". "On s'est pris dans les bras avec mon père et on est resté comme ça longtemps, se souvient-elle. Je ne voulais pas y croire." Enfin libre après 2.603 jours passés derrière les barreaux, Florence Cassez quitte sa prison et grimpe dans un avion avec son père. Direction la France. Sur le tarmac de Roissy, elle est accueillie par une ribambelle de personnes. Ses proches bien sûr, mais aussi des centaines de journalistes et plusieurs membres du gouvernement de l'époque. "Je suis très contente, confie celle qui était alors âgée de 38 ans. Je crois que j'ai été innocentée. La Cour suprême a déclaré ma liberté immédiate et absolue... mais libre je l'ai toujours été dans ma tête. (...) L'avion a atterri, et moi, toujours pas, je crois... Je suis encore dans les nuages...  Je ne pensais pas tenir, je pensais que je me mettrais à pleurer, mais je me trouve finalement très sereine." Mais difficile de retrouver une vie normale après avoir vécu tant d'années loin de son pays, enfermée. En France, Florence Cassez a retrouvé l'amour, eu une petite fille, retrouvé son quotidien dans le Nord où vivent ses parents. "Avec le recul, je me rends compte de la violence de cette libération soudaine, confie-t-elle dans les colonnes de Paris Match ce jeudi 24 août, près de dix ans après. J'ai tout supporté, tout subi comme un gentil petit soldat. J'étais heureuse d'être libre et, en même temps, j'étais frustrée de ce décalage entre ce que je ressentais et la réalité." Florance Cassez : "Je me bats tous les jours" "Je ne suis jamais en paix. Je ne peux pas quitter ma ville, je suis incapable de voyager. J'ai la trouille, confie-t-elle à Paris Match. Mais je me bats tous les jours pour aller bien, être positive, surmonter les galères en me répétant que le pire est derrière moi et en gardant en tête ma priorité : le bien-être de ma fille." Florence Cassez continue surtout de se battre pour que la justice avance. En 2018, la Française a exulté lors de l'arrestation de celui qui l'avait piégée, treize ans auparavant. Genaro Garcia Luna, ancien cher de la police judiciaire mexicaine, a été appréhendé au Texas pour soupçons de trafic de drogues. Sur les ondes d'Europe 1 alors, elle explique être emplie d'un "sentiment libérateur" : "Que l'on sache aujourd'hui que ce monsieur trempait dans des choses illicites fait que dans la tête des Mexicains surtout, il y a une prise de conscience sur les possibilités de machinations de ce monsieur".

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