Enlèvement de Mia : que sait-on des ravisseurs de la fillette à l'origine de "l'opération Lima" ?
Le rapt de la petite fille de 8 ans, retrouvée saine et sauve dimanche 18 avril en Suisse, a été organisé comme une "opération de type militaire", a déclaré le procureur de Nancy.
Au soulagement succède l'incrédulité. Cinq jours après l'enlèvement de Mia, l'enfant de 8 ans et sa mère Lola Montemaggi ont été retrouvées saines et sauves en Suisse, dimanche 18 avril. Elles se cachaient dans une usine désaffectée squattée, localisée à Sainte-Croix, dans le canton de Vaud, a confirmé le procureur de la République de Nancy, François Perain.
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Un lieu qui se trouve à près de 200 kilomètres du logement de la grand-mère de Mia, dans la commune des Poulières (Vosges), où la fillette a été enlevée mardi 13 avril. Derrière ce rapt et cette cavale, les enquêteurs ont découvert un petit groupe d'hommes très organisé, a expliqué le procureur lors d'une conférence de presse, dimanche après-midi.
Une équipe constituée sur les réseaux sociaux
Un groupe actif de cinq hommes "plutôt insérés socialement" a été identifié par les enquêteurs. Quatre ont été interpellés et placés en garde à vue, et le cinquième est en cours d'identification. Ces hommes, présentés sous leurs surnoms numériques "Janot", "Le corbeau" ou encore "Pitchoune", ont des profils bien différents, a précisé le procureur. Inconnus de la justice, ils se sont rencontrés sur les réseaux sociaux.
"Janot, qui demeure aux Lilas [Seine-Saint-Denis], est né en 1960 et est sans profession. Pitchoune, qui demeure à Paris, est né en 1963 et est intermittent du spectacle. Le corbeau, né en 1997 et qui demeure à Varreddes [Seine-et-Marne], perçoit l'allocation adulte handicapé et vit chez ses parents. Bruno, né en en 1961 et demeurant à Cons-la-Grandville [Meurthe-et-Moselle], est directeur technique travaillant pour une entreprise luxembourgeoise. Enfin, Basi, qui est en voie d'identification, n'a donc pas été interpellé à ce jour", a listé le procureur.
En plus de ce groupe "actif", un sixième individu, animateur de profession et surnommé "Bouga", a été arrêté et sera également présenté au juge d'instruction, a précisé François Perain. Cet homme né en 1978 et demeurant dans le Doubs aurait, selon ses dires et les premiers éléments de l'enquête, "participé à la préparation de l'action". Il est soupçonné d'avoir entretenu des contacts avec Lola Montemaggi à travers les réseaux sociaux et "mobilis[é] une équipe pour soustraire Mia à sa grand-mère maternelle". L'enlèvement a, selon le procureur, été "conçu comme une opération de type militaire" et a été surnommé "opération Lima".
Des idées communes contre l'Etat
Ces individus "partagent une même communauté d'idées : ils sont contre l'Etat et sont mobilisés contre ce qu'ils appellent 'la dictature sanitaire'", a déclaré le procureur, qui ne pense pas qu'il s'agisse "d'un mouvement survivaliste ou d'extrême droite".
Les six hommes considéraient "que les enfants placés dans le cadre de la protection de l'enfance sont enlevés injustement à leurs parents" et qu'il leur fallait agir pour les restituer à ces derniers. Pour rendre Mia à sa mère, ils auraient mis au point un scénario bien huilé : enlever la fillette à sa grand-mère en se faisant passer pour des professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse, puis lui faire traverser la frontière franco-suisse.
Pour cela, "un budget de 3 000 euros a été dégagé pour assurer les frais courants : essence, péage", un script a été rédigé et des accessoires achetés. "Bouga a acheté des talkies-walkies et des téléphones portables en vue de cette expédition (...) Pitchoune va donner à Janot un postiche pour qu'il le porte pendant l'expédition", a détaillé le procureur.
Quatre de ces hommes se sont rendus dans les Vosges, ont passé deux nuits en camping sauvage avant d'enlever l'enfant, puis de retrouver la mère. Trois d'entre eux l'ont ensuite aidée à passer à pied la frontière franco-suisse : "Le trajet va durer deux heures. Ils vont se relayer pour porter l'enfant."
Une aide en Suisse
Une fois la frontière passée, ce commando retrouve un septième individu : "Un homme surnommé Roméo" qui "va prendre en charge dans une Porsche Cayenne la mère et l'enfant pour les déposer dans un hôtel à Estavayer-le-Lac, en Suisse". Elles y passeront la nuit, puis prendront un taxi pour Neuchâtel où "une femme sympathisante du mouvement va les héberger" une nuit et les conduire le lendemain au squat dans lequel elles ont été retrouvées.
Le procureur de la République de Nancy a annoncé qu'un mandat d'arrêt européen avait déjà été publié à l'encontre de Roméo, ressortissant français, et qu'un deuxième allait être délivré à l'encontre de la mère de Mia, "pour qu'elle soit remise à un juge d'instruction" à Nancy. Concernant les cinq personnes interpellées, "les mises en examen sont en cours". Les enquêteurs doivent à présent déterminer de quels soutiens financiers et humains a pu bénéficier le groupe et si d'autres actions étaient planifiées.