En meeting à Perpignan, Marine Le Pen appelle au vote pour faire "gagner le peuple"
ÉLYSÉE 2022
La candidate du Rassemblement national a tenu son dernier meeting jeudi soir à Perpignan où elle a appelé "le peuple", et en particulier les abstentionnistes, à voter dimanche pour la placer en tête du premier tour de l’élection présidentielle.
"Cela dépend de vous. N’oubliez jamais et répétez autour de vous : si le peuple vote, le peuple gagne !" Le message était clair, jeudi 7 avril, pour son dernier meeting : à trois jours du premier tour del’élection présidentielle, Marine Le Pen a enjoint ses électeurs et les abstentionnistes à faire l’effort de se rendre aux urnes, dimanche 10 avril, pour la qualifier au second tour.
"Ce grand soir, il ne peut pas se faire sans vous. L’Histoire ne peut pas se faire sans vous. (…) Je vous conjure d’aller voter. Aucun résultat n’est acquis. À la présidentielle, on ne s’abstient pas !", a-t-elle insisté devant les 4 000 spectateurs – selon les organisateurs – venus la soutenir au parc des expositions de Perpignan, ville tenue depuis 2020 par le vice-président du Rassemblement national (RN), Louis Aliot.
"On va gagner ! On va gagner ! On va gagner !", lui ont répondu ses soutiens dès les premières minutes du meeting, agitant frénétiquement drapeaux tricolores et drapeaux "Marine présidente", plus certains que jamais que cette année est la bonne pour leur candidate.
Ils auraient tort de ne pas y croire. La candidate d’extrême droite bénéficie depuis plusieurs semaines d’une dynamique favorable, à en croire les sondages. Ces derniers lui accordent des intentions de vote en constante progression : 24 % des Français seraient prêts à voter pour elle, selon le dernier sondage Odoxa, alors qu’ils n’étaient que 16 %, selon plusieurs sondages, à la mi-mars.
"Elle n’a jamais été aussi proche de la victoire, veut croire Mathieu, agent de sécurité de 22 ans. Je la soutiens parce qu’elle pense d’abord aux Français et pas seulement aux riches, comme Emmanuel Macron."
Encore plus dédiabolisée grâce à Éric Zemmour
Marine Le Pen fait le pari qu’une partie des Français ne profite pas de la mondialisation et que certains ont le sentiment d’avoir été méprisés par le chef de l’État, dont elle a fait sa cible privilégiée. "N’oubliez pas ce que vous avez vécu : les Gilets jaunes, les retraités, les jeunes à qui on a pris deux années pour des raisons pas toujours justifiées, ces Français dont on a dit qu’ils n’étaient rien", a rappelé la candidate du RN en référence à des propos tenus par Emmanuel Macron en juillet 2017. "Ce qui se joue ce 10 avril, c’est le retour du débat entre nationaux et mondialistes", a-t-elle promis.
Marine Le Pen a multiplié les références aux petites phrases d’Emmanuel Macron et aux affaires ayant émaillé son quinquennat. De l’affaire Benalla au récentscandale McKinsey, tout est bon pour bien signifier qui est, à ses yeux, son seul adversaire. En face d’elle, le public siffle tant qu’il peut le président de la République. À les voir et à écouter la candidate, le remake du duel de 2017 ne fait aucun doute. La concurrence de Jean-Luc Mélenchon, actuellement troisième dans les sondages et lui aussi porté par une bonne dynamique, était d'ailleurs totalement absente de son discours.
La fille de Jean-Marie Le Pen semblait pourtant un temps menacée par l’arrivée dans le paysage politique d’un autre candidat d'extrême droite n'hésitant pas à tenir ouvertement des propos radicaux sur les étrangers et les musulmans : Éric Zemmour. L’ancien polémiste a su attirer vers lui les identitaires les plus extrêmes, plusieurs cadres du Rassemblement national, ainsi que Marion Maréchal, la nièce de Marine Le Pen. Les sondages lui ont accordé jusqu’à 16,5 % d’intentions de vote en février. Mais sa candidature bat de l’aile depuis le début de la guerre en Ukraine et sa présence dans la course à l’Élysée semble finalement avoir rendu service à Marine Le Pen. Totalement dédiabolisée, elle apparaît désormais comme beaucoup moins dangereuse aux yeux des électeurs en comparaison avec l'ex-journaliste condamné pour provocation à la haine raciale.
"Je trouve qu’elle s’est adoucie, témoigne ainsi Mandy, 27 ans, infirmière. Avant, j’étais de gauche et j’ai voté Philippe Poutou en 2017. Mais cette année, je vais voter Le Pen car j’en ai ras-le-bol, les Français ont trop souffert et en ont marre de se faire entuber. Beaucoup de gens autour de moi franchissent le pas comme moi car ils se disent qu’elle n’est pas son père. Je n’aurais jamais pu voter pour Jean-Marie Le Pen. Mais elle, elle est différente et, surtout, elle est la seule à pouvoir battre Macron."
"C’est aux Français qu’il revient de dire qui entre et qui doit quitter le pays"
"Pour moi, il y a une grande différence avec Éric Zemmour qui est un fasciste, un sexiste et un macho qui représenterait mal la France", abonde Amaël, 19 ans, qui vient de passer le concours de la gendarmerie. Selon lui, pas besoin d’être aussi "hard" qu’Éric Zemmour. Les propositions de Marine Le Pen suffisent.
Car les fondamentaux du parti d’extrême droite n’ont pas été oubliés malgré la dédiabolisation : bien que moins présente qu'il y a cinq ans, toute une séquence du meeting a été consacrée à l’immigration et à l’insécurité. "C’est aux Français qu’il revient de dire qui entre et qui doit quitter le pays. (…) C’est aux Français de dire quelle loi s’applique chez eux. Ce ne sera ni celle des caïds, ni celle des islamistes, ni celle d’un État financier", a-t-elle affirmé, promettant "25 000 places de prison en plus et un centre éducatif fermé par département, des procédures simplifiées, des coopérations nationales afin que les étrangers purgent leur peine dans leur pays".
Enfin, Marine Le Pen a réussi un tour de force : faire oublier son naufrage du débat d’entre-deux-tours de la présidentielle de 2017. "Nous sommes prêts !", a-t-elle assuré devant un public qui la trouve désormais mieux préparée.
"Elle a changé par rapport à 2017, affirme Benjamin, un cuisinier de 27 ans. Elle ne veut plus sortir de l’Union européenne, elle a compris que c’était une mauvaise idée. Je trouve aussi qu’elle parle mieux dans les médias, elle est plus sûre d’elle, elle connaît mieux ses dossiers. Je suis confiant. Cette année, c’est son année", conclut-il, sourire aux lèvres.