Mort de Nahel : ce qu'il faut retenir de la troisième nuit de violences
La troisième nuit de violences en France depuis la mort de Nahel a été marquée par de multiples dégradations et pillages à Paris, en banlieue parisienne et en province. Prises pour cibles, les forces de l'ordre ont procédé à plusieurs centaines d'interpellations. La droite et l'extrême droite appellent le gouvernement à instaurer l'état d'urgence.
Des pneus incendiés à Bordeaux, dans le sud-ouest de la France, le 29 juin 2023.
Dégradations de bâtiments publics, pillages et échauffourées ont repris jeudi dans de nombreuses villes de région parisienne et de province pour la troisième soirée consécutive après la mort mardi à Nanterre de Nahel, un mineur de 17 ans tué par un policier qui a été mis en examen et écroué pour homicide volontaire.
Saisi par une vidéo amateur, le tir à bout portant du fonctionnaire sur l'adolescent lors d'un contrôle routier a embrasé de nombreux quartiers populaires du pays.
Les forces de l'ordre ont procédé à 667 interpellations, a annoncé vendredi 30 juin le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin sur Twitter. Au niveau national, 249 policiers et gendarmes ont été blessés, a pour sa part indiqué la Place Beauvau.
Des mairies de quartiers visées à Lille
Des couvre-feux nocturnes avaient été décrétés à Clamart (Hauts-de-Seine), Neuilly-sur-Marne (Seine-Saint-Denis) et Compiègne (Oise). Dans le Nord, la préfecture a mobilisé des drones ainsi qu'un hélicoptère à Tourcoing et Lille.
Les heurts ont été importants dans la capitale nordiste, où la mairie d'un quartier populaire a été incendiée dans le Sud et une autre caillassée dans l'Est. Dans la métropole lilloise, un jeu du chat et de la souris s'est enclenché dans la nuit entre de petits groupes dispersés et un important dispositif policier.
Dans le quartier populaire lillois de Wazemmes, des pompiers finissaient après minuit d'éteindre un incendie qui a endommagé le rez-de-chaussée de la mairie de quartier.
Le préfet du Nord et des Hauts-de-France avait interdit jeudi tout rassemblement dans le secteur de l'hôtel de police de Lille, après des appels sur les réseaux sociaux à une manifestation anticipée comme violente.
Pillages, incendies, cocktail Molotov
D'autres scènes de pillages et de violences ont été observées à Paris, en Île-de-France ainsi que dans des villes de province comme à Marseille (Bouches-du-Rhône), Bordeaux (Gironde) ou encore Roubaix (Nord).
Des bâtiments publics et des magasins ont été pris pour cible, saccagés ou incendiés, par des groupes souvent encagoulés ou dissimulés sous des capuches. "Le bureau de police situé au pôle Laherrère à Pau" a été visé par un cocktail Molotov, selon la préfecture des Pyrénées-Atlantiques.
Neuf policiers et pompiers ont été blessés et 307 interpellations ont été effectuées dans la seule région parisienne, selon la préfecture de police.
Une vingtaine de bus ont été brûlés en Île-de-France, dont douze dans un entrepôt d'Aubervilliers, a déclaré le ministre des Transports Clément Beaune sur RMC, avant de se rendre sur place.
À Marseille, 56 interpellations ont été effectuées et 38 policiers ont été blessés, a déclaré la préfecture des Bouches-du-Rhône.
État d'urgence en débat
Pour empêcher une "généralisation" des violences urbaines, les autorités avaient mobilisé 40 000 policiers et gendarmes, ainsi que des unités d'intervention d'élite comme le Raid (police) et ses véhicules noirs blindés ou le Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), déployés dans plusieurs villes.
Mais les autorités font face à des appels insistants de la droite et de l'extrême droite à instaurer l'état d'urgence. "C'est évidemment une question qui se pose", a estimé Christophe Béchu sur Sud Radio. Le ministre du Logement et de la Ville, Olivier Klein, s'est montré beaucoup plus réservé sur France Inter, jugeant que ce serait un "aveu d'échec". "On a aujourd'hui, encore, je crois, d'autres pistes", a-t-il déclaré.
L'état d'urgence, qui permet aux autorités administratives de prendre des mesures d'exception comme une interdiction de circuler, avait notamment été déclenché en novembre 2005 après dix jours d'émeutes dans les banlieues.
Avec Reuters et AFP