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Loi immigration en France : le Sénat durcit le volet "régularisations"

Au bout d'une soirée tendue, le Sénat a supprimé mercredi l'article 3 de la loi immigration, qui permettait l'octroi d'un titre de séjour "de plein droit" aux travailleurs sans-papiers dans des secteurs en pénurie de main d'œuvre. Il est remplacé par un article "4 bis", qui prévoit un titre de séjour accordé par les préfets "au cas par cas" et "à titre exceptionnel". Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a jugé ce compromis "acceptable pour le gouvernement". Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin devant les sénateurs lors du débat sur le projet de loi immigration, le 7 novembre 2023. à Paris Le Sénat a imprimé dans la nuit mercredi 8 à jeudi 9 novembre un durcissement du volet le plus emblématique du projet de loi immigration, concernant la régularisation dans les métiers en tension, un tour de vis jugé "acceptable" par le gouvernement, en quête d'un accord à tout prix au Parlement. Au cœur de l'examen d'un texte surtout axé sur le contrôle de l'immigration et la simplification des procédures d'expulsion des étrangers délinquants, ce dispositif d'intégration des immigrés par le travail cristallise les débats depuis des mois... Et la chambre haute n'a pas échappé à la tension ambiante, au bout d'une soirée d'invectives en séance. Fort d'un accord négocié in extremis entre les deux pans de sa majorité de droite et du centre sous l'œil approbateur du gouvernement, le Sénat a supprimé la mesure initiale de l'exécutif et lui a immédiatement substitué son propre dispositif restreint. Exit l'article 3, qui permettait l'octroi d'un titre de séjour "de plein droit" aux travailleurs sans-papiers dans des secteurs en pénurie de main d'œuvre. Plébiscitée par l'aile gauche du camp présidentiel, la mesure a été érigée comme ligne rouge par Les Républicains, qui y voient un "droit automatique" et craignent un "appel d'air". Place désormais à l'article "4 bis", qui prévoit dans ces secteurs d'activité un titre de séjour accordé par les préfets "au cas par cas" et "à titre exceptionnel", dans une "procédure strictement encadrée" et assortie de multiples conditions, dont celle du respect des "valeurs de la République". Marqueurs de la droite Le compromis trouvé par la majorité sénatoriale (à 226 voix contre 119) est "acceptable pour le gouvernement", a estimé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, qui a expliqué que ce volet entraînerait la publication d'une "nouvelle circulaire". Gérald Darmanin soumettra en décembre cette rédaction à l'Assemblée nationale, où le camp présidentiel ne dispose pas de majorité absolue. "À l'Assemblée, nous rétablirons le texte ambitieux de l'exécutif, tout le texte de l'exécutif. Y compris le volet sur les régularisations", a promis dans Le Figaro le député Renaissance Sacha Houlié, incarnation du volet social de la réforme. Longtemps divisés sur cette mesure, les sénateurs LR et centristes ont accordé leurs violons pour éviter un rejet pur et simple du texte, hypothèse qualifiée par certains de "dramatique" pour la "légitimité" de la Haute Assemblée. Le vote solennel prévu mardi sur l'ensemble du texte devrait confirmer un durcissement très sévère de la réforme, avec plusieurs marqueurs de la droite déjà intégrés : suppression de l'aide médicale d'État, resserrement du regroupement familial, quotas migratoires, rétablissement du délit de séjour irrégulier... Voie de passage? "Ce texte, c'est le cabinet des horreurs, une capitulation en rase campagne du gouvernement, un jeu de bonneteau où l'on supprime un article pour le réécrire en pire", s'est indigné le sénateur écologiste Thomas Dossus. Le président du groupe socialiste Patrick Kanner a lui épinglé une "'darmanisation' du texte de loi" et demandé à Gérald Darmanin de "lancer un avis de recherche pour ministre disparu", un tacle sur l'absence au banc cette semaine d'Olivier Dussopt, ministre du Travail qui portait initialement le volet "intégration" du texte. Les débats se sont clairement tendus mercredi sur la question du droit du sol, restreint par les sénateurs. Stéphane Ravier (Reconquête) a notamment suscité la bronca lorsqu'il a estimé qu'un "veau qui naît dans une écurie, cela ne fera jamais de lui un cheval". La gauche a hurlé au "racisme". Avec ce texte musclé qui se dessine, le gouvernement s'aménage-t-il une voie de passage à l'Assemblée avec les votes du groupe LR ou l'abstention de celui-ci ? Ce dernier "pourrait se satisfaire de la copie du Sénat", a reconnu la députée LR Annie Genevard à l'association des journalistes parlementaires (AJP). Avec un bémol majeur : "J'attends surtout de voir ce que l'Assemblée nationale va en faire". La droite brandit en effet sans répit la menace d'une motion de censure si le gouvernement préfère activer l'article 49.3 pour éviter un vote, même si celle-ci a peu de chances d'aboutir sans le soutien de la gauche. Avec AFP

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