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Incendies, sécheresse… Une vague de chaleur tardive qui vient s'ajouter aux pressions de tout l'été

Coup de chaud La vague de chaleur qui touche actuellement la France étonne par son caractère tardif. Alors que des records de température ne cessent de tomber pour la période et que 19 départements seront mercredi en vigilance rouge, cet épisode vient porter un nouveau coup aux écosystèmes et à la santé humaine déjà bien affectés par l'été. Une famille marche en se faisant de l'ombre avec une ombrelle, à Lyon, le 21 août 2021. La journée de lundi a été "la plus chaude jamais enregistrée après un 15 août", a annoncé mardi 22 août Météo-France. L'Hexagone suffoque depuis le 17 août sous une intense vague de chaleur, avec quinze nouveaux départements de la moitié sud de la France qui passeront en vigilance rouge canicule mercredi, s'ajoutant aux quatre qui s'y trouvent déjà.  Ce nouvel épisode caniculaire étonne par son caractère particulièrement intense et tardif. Seulement six ont été dénombrés depuis 1947 après un 15 août, tous au 21e siècle (2001, 2009, 2011, 2012, 2016 et 2017). "Une canicule en elle-même n'a rien d'exceptionnel. Ce qui est surprenant, ici, c'est d'avoir des températures aussi élevées en deuxième partie du mois d'août", insistait lundi le climatologue Pascal Yiou. "Normalement, les records de températures tombent plutôt entre le 15 juillet et le 15 août, pas après." Un signe, assure le spécialiste, de l'allongement des périodes de canicule sous l'effet du dérèglement climatique. Après un été marqué par des feux de forêt et une sécheresse persistante, cette nouvelle canicule vient porter un nouveau coup à la biodiversité mais aussi à la santé humaine, obligeant les autorités à multiplier les mesures de prévention. Tour d'horizon. Première conséquence de cette vague de chaleur : un risque accru de feux de forêt, principalement dans le sud de la France. "Ces hautes températures arrivent en fin de cycle, alors que les arbres sont déjà affaiblis par le stress de la saison estivale. Alors qu'ils devraient pouvoir recommencer à respirer, ils continuent de se dessécher, devenant donc particulièrement inflammables", explique Serge Zaka, docteur en agroclimatologie.  Mardi, la météo des forêts, bulletin quotidien diffusé par Météo-France alertant la population sur le risque de départ d'incendies, plaçait sept départements en risque élevé de feux : les Bouches-du-Rhône, la Drôme, le Gard, la Haute-Corse, l'Hérault, le Var et le Vaucluse. Par précaution, plusieurs massifs forestiers, notamment en Provence-Alpes-Côtes-d'Azur ont été fermés au public.  "Comme pour les forêts, cette période de l'année marque la fin du cycle de la vigne et de divers arbres fruitiers comme la pomme, la poire, la pêche, le kiwi. C'est le moment où débutent les vendanges et la cueillette", poursuit Serge Zaka. "Or, pendant cette période, les végétaux souffrent si les températures excèdent les 35 °C." Dans les régions où les températures avoisinent les 42-43 °C localement, par exemple dans le Rhône – justement viticole et arboricole –, les cultures montrent ainsi des signes de faiblesse. "Des feuilles exposées au soleil brunissent, des fruits brûlent", décrit l'agroclimatologue. "Il est trop tôt pour tirer des conclusions mais il y aura certainement des pertes de rendements." Plus ponctuellement, ces chaleurs pourraient aussi toucher le tournesol et le maïs, selon le chercheur. Côté élevage, les vaches laitières, particulièrement sensibles aux fortes températures, pourraient connaître des pertes de lait de l'ordre de 5 à 10 %.  "Ce qui est le plus inquiétant c'est que cela vient porter un nouveau coup aux cultures et aux écosystèmes après une année 2022 catastrophique et des années 2020 et 2021 compliquées", termine le spécialiste. "À chaque nouveau phénomène météorologique extrême, ils ressortent un peu plus affaiblis.  Cette vague de chaleur risque aussi d'aggraver la sécheresse en cours. Selon les dernières données du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), 72 % des nappes phréatiques étaient toujours sous les normales de saison le mois dernier. Près de 90 communes sont actuellement privées d'eau potable et doivent être ravitaillées par camions-citernes.   Face à cette situation, le gouvernement a demandé lundi à quinze sites industriels de réduire significativement, avec l'aide de l'État, la quantité d’eau qu'ils prélèvent pour fonctionner. Cette mesure, qui s'intègre plus généralement au plan eau du gouvernement, doit permettre de réduire de 10 % les prélèvements dans les nappes et rivières d’ici 2030 en France.   En parallèle, plusieurs départements ont annoncé renforcer leurs restrictions sur l'usage de l'eau : réduction des prélèvements à des fins agricoles, restrictions des activités nautiques ou encore interdiction de l'arrosage des jardins, des espaces verts, des golfs et du lavage de voiture…  En raison de la canicule, EDF avait aussi émis des alertes le week-end dernier pour la centrale nucléaire du Bugey, dans l'Ain. Habituellement, les centrales pompent de l'eau dans les lacs et rivières alentour pour refroidir leurs réacteurs avant de la rejeter en milieu naturel. Problème : cette eau rejetée est chaude. Quand la température extérieure est déjà élevée, celle du cours d'eau grimpe aussi. L'eau issue des centrales va donc venir aggraver ce réchauffement avec des conséquences néfastes pour la biodiversité.   La législation oblige les opérateurs des centrales nucléaires à respecter des seuils de température et le cas échéant à limiter leur production. Malgré l'alerte du week-end, cette inquiétude a pour le moment été écartée par EDF.  Cette vague de chaleur, à quelques jours seulement de la rentrée, pourra aussi mettre le corps humain à l'épreuve aussi bien physiquement que mentalement. "Quand la température grimpe, le corps humain doit, lui, réussir à maintenir sa température corporelle à environ 37 °C", rappelle Bruno Megarbane, chef de service réanimation à l'hôpital Lariboisière, à Paris. "Pour cela, notre corps possède des mécanismes de régulation de la température, la sueur par exemple." Mais chez certaines personnes vulnérables – les personnes âgées, les enfants, ou celles présentant des troubles cardiovasculaires par exemple – ces mécanismes peuvent être défaillants. Avec un risque :attraper une insolation ou pire, un coup de chaud. En Europe, au moins 62 000 personnes ont perdu la vie de manière "précipitée" à cause des chaleurs records de 2022, dont plus de 5 000 en France, selon une étude publiée dans Nature Medicine en juillet 2023, menée en collaboration avec l’Inserm. "Heureusement, depuis la canicule de 2003, nous avons compris la nécessité de mettre en place de nombreuses mesures de prévention face à ces épisodes de fortes chaleurs", poursuit-il. Parmi elles : la mise en place d'îlots de fraîcheur dans les villes, des mesures exceptionnelles dans les Ehpad, l'adaptation des horaires de travail voire l'annulation de certains événements extérieurs… "Cet épisode tardif vient cependant nous montrer qu'il ne faut pas relâcher l'attention avec la fin des congés d'été et être prêts à mettre ces mesures en place à tout moment", insiste-t-il.  En plus de l'impact sur la santé physique, cette vague de chaleur peut aussi avoir des conséquences sur la santé mentale. "Une canicule engendre une dette de sommeil chez les individus, aux effets délétères sur la mémoire et la concentration", poursuit Bruno Megarbane. "À cela peut s'ajouter une anxiété, des pensées parasites et des troubles de l’humeur…" Des troubles qui risquent de s'accentuer alors que ces épisodes caniculaires se répètent et se font de plus en plus nombreux et intenses. 

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