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En Turquie, un hashtag pour appeler à l’aide face aux incendies met le président Erdogan hors de lui

En Turquie, après douze jours, les incendies semblent maîtrisés mais c'est désormais un hashtag qui crée la polémique. Ce hashtag #HelpTurkey est né de l'indignation d'une partie des Turcs, témoins de deux scènes paradoxales. Deux scènes qu'on pense tirées de deux réalités parallèles. D’un côté les pires incendies qu’a connu la Turquie. 95 000 hectares partis en fumée. Les zones forestières de la côté méditerranéenne ravagées, le ciel orange, l'air irrespirable etles huit morts comptabilisés. De l’autre, un président, Recep Tayyip Erdogan, qui se rend sur le front des incendies à bord d'un bus escorté par la police, qui parle aux victimes à travers un mégaphone, et qui, pour les réconforter, jette des sachets de thé depuis la porte ouverte de son bus. Un président qui tarde à réellement réagir, et qui avoue au bout de quelques jours que la Turquie n'a pas les moyens de faire face à ces incendies. Elle n'a pas d'avion bombardier d'eau en état de fonctionner. Les Turcs se déchaînent alors sur les réseaux sociaux avec le hashtag #HelpTurkey, un appel à l'aide internationale. Il entraîne 2,5 millions de retweets, une "humiliation" pour le président Erdogan. Allergique à la critique, l’homme tout puissant de Turquie n’a pas besoin d’aide, surtout pas des étrangers. Mais devant l’ampleur des incendies, il change finalement de discours et accepte l’aide aérienne. Contre-feu D’accord pour l’aide internationale mais en ce qui concerne ce hashtag, le gouvernement ne compte pas en rester là. Selon Erdogan, le hashtag #HelpTurkey a été lancé par des personnes malveillantes, une "terreur par le mensonge propagé depuis l’Amérique, l’Europe et certains autres endroits", estime le président. Voici son plan d’attaque pour le contrer : lancer un contre-feu sur les réseaux sociaux et un nouveau hashtag, #StrongTurkey, la Turquie forte. Puis lancer une étape judiciaire : le bureau du procureur a ouvert une enquête pour déterminer si les tweets autour de #HelpTurkey ont eu pour intention de "créer de l’anxiété, de la peur et de la panique au sein de la population, et d’humilier le gouvernement turc". Dernière étape, cacher la vérité. Les chaînes de télévision turques n’ont désormais plus le droit de diffuser en direct les images des incendies, sous peine d’amende. Des médias muselés et des réseaux sociaux soumis au pouvoir, c’est ce qui est en train de se passer en Turquie, au-delà de ces incendies. Le président turc a annoncé récemment une nouvelle loi pour réguler les médias qui reçoivent des fonds étrangers. Les réseaux sociaux Twitter et Facebook ont fini par plier devant une demande du pouvoir de nommer des représentants en Turquie, ce qui va faciliter le retrait des publications jugées problématiques. Dans une société ultra-divisée entre les pro et les anti Erdogan, ceux qui sont contre le président n’ont plus de moyen d’expression. Les médias favorables au gouvernement dominent, et les réseaux sociaux, dernier lieu de débat, perdent peu à peu leur capacité à développer la liberté d’expression.

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