Emmanuel Macron annonce des États généraux de la justice à la rentrée
Le président français Emmanuel Macron, lors d'un déplacement à Martel, dans le sud de la France, le 3 juin 2021.
Les acteurs de la justice en France seront conviés à la rentrée par le président de la République pour des "États généraux de la justice". Plusieurs syndicats de professionnels du métier attendaient une réponse d'Emmanuel Macron, après les attaques répétées sur l'état de la justice par la droite et la police.
Après être resté spectateur des polémiques sur l'état de la justice alimentées par la droite et les syndicats de policiers, Emmanuel Macron a annoncé, samedi 5 juin, des États généraux de la justice à la rentrée, à moins d'un an de la fin de son mandat.
Il souhaite par ailleurs, précise l'Élysée dans un bref communiqué, que "le Garde des Sceaux rende compte chaque année au Parlement de la politique pénale du gouvernement".
L'annonce a été faite vendredi soir à Chantal Arens, la première présidente de la Cour de Cassation, et à François Molins, le procureur général de la Cour de Cassation, reçus à leur demande.
François Molins, l'un des plus hauts magistrats français, s'était insurgé fin avril dans une interview au Monde contre le procès en "laxisme" fait selon lui à la justice, face à la polémique suscitée par la décision de déclarer pénalement irresponsable le meurtrier de la sexagénaire juive Sarah Halimi.
Dans cette affaire, Emmanuel Macron avait souhaité un changement de la loi pour que l'abolition du discernement causé par une prise de stupéfiants n'exonère pas de la responsabilité pénale.
Éviter le "pugilat"
Le 19 mai, des dizaine de milliers de policiers avaient par ailleurs manifesté devant l'Assemblée nationale. La critique des lenteurs et d'un laxisme supposé des juges était parmi les principaux mots d'ordre des syndicats policiers à cette occasion. Elle a été reprise à leur compte par le Rassemblement national et de nombreuses voix parmi les Républicains.
Les États généraux à venir seront "un paravent pour masquer l'absence de décision et pour sauver une justice gravement malade", a encore commenté samedi le député LR Eric Ciotti : "La justice n'a pas besoin d'être l'otage d'une campagne électorale mais a besoin d'actes".
"Ce que nous ne voulons pas, et on sera très vigilants sur ce point, c'est que ça puisse devenir un lieu de pugilat politique ou électoraliste" à l'approche de l'élection présidentielle de 2022, a souligné de son côté Jérôme Gavaudan, le président du Conseil national des barreaux (CNB), qui regroupe les 70 000 avocats français, tout en accueillant "favorablement" l'annonce présidentielle.
Ne pas "opposer justice et police"
Le 25 mai, devant l'Assemblée nationale, le Garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti avait appelé à ne pas "opposer la justice et la police", alors que la préoccupation sécuritaire est, selon les sondages, parmi les principales inquiétudes des Français.
L'entourage du ministre a précisé, samedi, que les États généraux se dérouleront "sur plusieurs semaines à partir de la rentrée de septembre, et sans "autocensure". Tous les acteurs de la justice y seront conviés, "ainsi que les personnels pénitentiaires, les forces de sécurité intérieures et les citoyens".
"En tant que garant de l'institution judiciaire, il était temps qu'Emmanuel Macron ait une parole", juge en tous cas Cécile Mamelin, vice-présidente de l'USM, principal syndicat de magistrats. Et d'ajouter : "C'est une annonce. On attend de voir ce qu'il y a derrière. Ça doit inclure aussi la justice civile, qui est la justice du quotidien."
Les principaux syndicats de magistrats "demandent au président de la République depuis plusieurs mois de se positionner pour que la séparation des pouvoirs soit respectée", a également rappelé Katia Dubreuil, présidente du Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche). "Ce dont la justice a besoin", insiste-t-elle, "c'est d'arrêter les réformes incessantes, et de moyens".
Emmanuel Baudin, secrétaire général de FO-Pénitentiaire, voit dans l'annonce présidentielle "plutôt une bonne chose". Son syndicat avait écrit le 12 mai à Emmanuel Macron, suite aux propos virulents envers la justice tenus par des policiers rassemblés devant l'Assemblée nationale, lui demandant "d'acter l'ouverture d'états généraux de l'administration pénitentiaire sous la responsabilité du garde des Sceaux".
Avec AFP