AFFAIRES OUBLIÉES. L'affaire Flactif, jalousie meurtrière en haute montagne
Inoubliable pour les proches des victimes, l'affaire Flactif, ou Tuerie du Grand-Bornand, ne fait plus la Une mais a défrayé la chronique dans les années 2000. Closer revient sur cette enquête hors norme.
Le 12 avril 2003, la France apprenait, démunie, la disparition de Xavier Flactif, 41 ans, sa femme, Graziella Ortolano, 36 ans et leurs trois enfants, Sarah, 10 ans, Lætitia, 9 ans et Grégory, 7 ans. Face à l'inquiétude de Mario Leblanc, beau-fils du père de famille, le parquet d'Annecy se saisit de l'enquête. Une perquisition est ordonnée, puis une seconde, mais les enquêteurs ne trouvent rien d'inquiétants chez les Flactif. Rien... ou presque. Lors de leurs secondes fouilles, les policiers constatent que deux ordinateurs, présents lors de leur premier passage, ont disparu. Une information judiciaire est ouverte pour une "enlèvements et séquestrations", plongeant tout une région dans la stupeur et l'inquiétude.
Plusieurs pistes sont étudiées par les enquêteurs. D'abord, ceux-ci envisagent la thèse de la fuite vers l'étranger, liée, peut-être, aux affaires du père. Promoteur immobilier, Xavier Flactif enchaînaient les ennuis professionnels et multipliaient les dettes. Ses activités avaient d'ailleurs déjà attiré l'attention de la brigade financière, dans le cadre d'une affaire d'escroquerie. Dans l'émission Sept à huit sur TF1, les voisins des Flactif, David Hotyat et sa compagne Alexandra Lefevre, soulignent le profil crapuleux du père, et indiquent que celui-ci était mêlé à plusieurs affaires de fraude et de location au noir. Visiblement remonté contre le disparu, le couple critique le côté "fort en gueule" de Xavier Flactif et explique ne pas entretenir de bonnes relations avec leur propriétaire. De longues semaines, Hotyat et Lefevre saisissent toutes les occasions pour salir la réputation des Flactif, les disant même liés à un trafic de drogues.
La haine au Grand-Bornand
En constatant les relations compliquées qu'avaient les Flactif avec d'autres habitants du Grand-Bornand, la police n'écarte pas la piste criminelle. Celle-ci prend d'ailleurs une dimension nouvelle lorsqu'à l'occasion d'une inspection du chalet des Flactif, la police scientifique découvrent plusieurs traces de sang. Ils y relèvent l'ADN des cinq membres de la famille Flactif, ainsi que plusieurs éclats de dents de lait. Mêmes observations dans la 4 x 4 Toyota de Xavier Flactif, retrouvée à l'Aéroport international de Genève (ce qui avait d'ailleurs encouragé la piste de la fuite à l'étranger). En étudiant les traces de sang présentes dans le véhicule, un spécialiste en morphoanalyse des traces de sang arrive à la conclusion que la famille toute entière a été transportée dans le véhicule, avant que celui-ci ne soit lessivé. Le quintuple meurtre est donc confirmé, mais la police ne dispose d'aucun suspect précis. Et pour cause, dans le cadre de son métier, Xavier Flactif fréquentait des centaines de résidents du Grand-Bornand.
Mais l'ADN finit par parler. Le 8 juillet 2003, la police scientifique d'Annecy identifie plusieurs échantillons d'ADN comme étant ceux de David Hotyat, qui louait au Flactif un appartement, sa compagne Alexandra Lefèvre, ancienne employée de maison pour le père de famille, et un autre couple de voisins : Stéphane Haremza et son épouse Isabelle. D'abord placés sous écoute téléphonique, le couple Hotyat est arrêté. David Hyotat, le même que celui qui avait répondu à la presse au printemps, avoue le quintuple crime. Il conduit la police dans les bois de Thônes, où les cinq corps sont retrouvés carbonisés. Ses voisins, les Haremza, révèleront plus tard que David Hotyat avait eu l'idée d'assassiner les Flactif suite à la médiatisation de l'affaire Alfredo Stranieri, tueur en série français ayant choisi ses victimes dans les petites-annonces. Il se serait rendu au domicile des Flactif le 11 avril, avait prétendu tirer dans la tête du père en croyant que la balle ne partirait pas, mais le coup est parti. Il s'est alors débarrassé des témoins, à savoir les quatre autres membres de la famille.
Tués par la jalousie
Le 30 juin 2006, David Hotyat est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité avec une peine de sûreté de vingt-deux ans. Ses complices, Stéphane Haremza, Alexandra Lefevre etIsabelle Haremza écopent quant à eux de quinze, dix et sept ans de prison. Plus tard, David Hotyat sera qualifié par un psychologique de narcissique, et phobique, "avec une tendance à fuir les émotions dans l'action, avec un idéal de maîtrise". Son crime, motivé par l'unique jalousie qu'il ressentait, passionne encore aujourd'hui autant les criminologues que les cinéastes. En 2012, le réalisateur Eric Guirado sortait Possessions, thriller dramatique inspiré de l'affaire Flactif visant à comprendre comment l'envie peut motiver l'horreur. "Ce qui m'intéressait, c'est le cheminement psychologique qui a pu engendrer un tel niveau de rejet et de haine", avait confié, à l'époque, le cinéaste au Parisien.
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