TÉMOIGNAGE. “Ma fille Jade est devenue aveugle et handicapée après une grave erreur médicale”
Lourdement handicapée après des négligences d'un hôpital, la petite fille ne peut pas recevoir les soins adaptés, car la justice est sourde à ses souffrances.
Le cauchemar de Jade commence en octobre 2015. La petite fille de 2 ans et demi est admise aux urgences pédiatriques du CHU de Besançon pour de violents vomissements. Le chef de service de chirurgie pédiatrique diagnostique une occlusion. Plus tard, Christelle Grecea, la maman de Jade, apprendra que sa fille avait un volvulus (retournement du tube digestif sur lui-même). Le chirurgien estime qu'il n'est pas nécessaire d'opérer la petite fille et rentre chez lui.
"Elle a agonisé toute la nuit, explique Christelle qui travaille alors dans cet hôpital en tant qu'agent des services hospitaliers. A 4 h 30, un médecin réanimateur a dit aux internes : 'Vous ne voyez pas qu'elle est en train de partir ?'" Six heures après son admission aux urgences, Jade perd conscience et est transférée en réanimation pédiatrique. Dix minutes plus tard, elle est victime d'un arrêt cardiaque. "Au bout de 25 minutes de massage cardiaque, nous avons entendu le chirurgien dire : "Nous allons arrêter le massage cardiaque, car il n'y a plus rien à faire. " Ils nous ont laissés entrer. Nous disions à notre fille en pleurant : 'Jade, ne pars pas. Tu vas bientôt fêter tes 3 ans et tu vas voir le père Noël.'"
Les séquelles neurologiques sont très lourdes
Comme si elle avait entendu les messages d'amour de ses parents, Jade retrouve une activité cardiaque 2 minutes plus tard. Conduite au bloc opératoire, elle est prise en charge par le chirurgien : elle souffre d'une perforation de l'estomac. Les six semaines suivantes vont être très éprouvantes pour la petite fille, hospitalisée en réanimation. Ses parents ne la quittent pas un instant. C'est une fois que la fillette est de retour chez eux tous qu'ils mesurent l'ampleur des dégâts provoqués par les arrêts cardiaques.
"Jade ne parlait plus, bavait et ne nous suivait pas du regard", détaille Christelle. Durant près d'une demi-heure, le cerveau de la fillette a été privé d'oxygène. Et les séquelles neurologiques sont très lourdes. Aujourd'hui, Jade a 8 ans et ses handicaps sont graves. "Elle souffre d'une cécité corticale et d'une paralysie cérébrale, précise sa mère. Elle se comporte en aveugle. Elle est dans l'incapacité de se tenir seule debout et doit se déplacer en fauteuil roulant." Scolarisée en CP, Jade est aidée par une assistante de vie scolaire et suivie par une éducatrice spécialisée, un ergothérapeute, une psychomotricienne et une kinésithérapeute. "Mais il ne s'agit pas de soins intensifs. En France, on entretient le handicap, on ne le soigne pas", regrette Christelle Grecea.
Elle doit se rendre en Slovaquie pour bénéficier d'oxygénothérapie
Avec son mari, cette maman courage est donc partie à l'étranger pour que leur fille bénéficie de soins adaptés. "Cela fait deux ans que nous nous rendons en Slovaquie afin que Jade suive notamment des séances d'oxygénothérapie, mais cela coûte très cher", regrette-t-elle. Comme l'explique leur avocate, Me Julie Prével, qui travaille au sein du cabinet de Me Jehanne Collard et associés, spécialisé en droits des victimes, c'est un autre parcours du combattant qu'ils ont découvert : celui de la reconnaissance de la faute médicale et de l'indemnisation de ses conséquences.
"Un premier rapport d'expertise a retenu que le personnel du centre hospitalier avait commis plusieurs erreurs. Un premier juge a demandé un complément d'expertise qui a confirmé que le centre hospitalier était responsable de l'état de la petite Jade", explique Me Julie Prével. "Le rapporteur public a conclu à la responsabilité du centre hospitalier et l'a condamné à verser une importante avance sur l'indemnisation de la petite. Contre toute attente, 24 heures plus tard, un troisième juge a indiqué qu'il ne voyait pas de faute de la part de l'hôpital. Il a ordonné une troisième expertise. Nous avons bien sûr fait appel de cette décision", ajoute Me Julie Prével.
"Nous avons besoin de cette indemnisation pour que Jade puisse être soignée tant qu'elle est encore jeune", explique Christelle Grecea qui, avec son mari, a créé l'association L'Espoir pour Jade et lancé une cagnotte sur Leetchi afin de payer les frais de justice et les soins de sa fille à l'étranger. "Mes deux autres enfants souffrent aussi beaucoup et notre vie ne sera plus jamais la même. Jade a besoin de reconnaissance et nous aussi. Notre seul objectif est de lui donner une chance", conclut la maman qui tient à bout de bras toute une famille.
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