Projet de loi climat : l'Assemblée nationale passe au vote
Après trois semaines de débat, les députés français doivent adopter ce mardi le projet de loi climat, inspiré des travaux de la Convention citoyenne pour le climat voulue par Emmanuel Macron. Le texte est attendu au Sénat en juin.
Au terme de semaines de débats passionnés, l'Assemblée nationale doit adopter mardi 3 mai le projet de loi climat, vanté par la majorité comme un "marqueur du quinquennat" mais décrié par les écologistes pour ses "insuffisances" face à "l'urgence climatique".
Le texte, mis au vote en fin d'après-midi en première lecture, a fait l'objet de plus de 110 heures de discussions dans l'hémicycle - parmi les records sous la Ve République - durant trois semaines jusqu'à mi-avril. Il est attendu au Sénat courant juin.
Inspiré des travaux de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) voulue par Emmanuel Macron, ce texte comprend une batterie de mesures, dont la suppression de certaines lignes aériennes intérieures en cas d'alternatives de moins de 2 h 30 en train, la création d'un délit d'écocide ou l'interdiction de la mise en location des logements passoires thermiques en 2028.
Dans l'hémicycle, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili, ancienne d'EELV, a défendu un texte "d'écologie pratique" et de "bon sens", "une véritable bascule culturelle globale".
Le gouvernement se retrouve cependant en porte-à-faux avec des membres de la Convention citoyenne qui jugent leurs propositions "détricotées" et dont certains ont participé aux manifestations en faveur d'une "vraie loi climat" le 28 mars.
Malgré "quelques avancées", des ONG comme Greenpeace et le Réseau action climat dénoncent un "formidable gâchis" et du "climato-cynisme" avec un "projet de loi pour faire semblant d'agir".
"15 ans de retard"
Chez les députés, Matthieu Orphelin, ex-LREM proche de Nicolas Hulot, votera "contre cette loi qui a 15 ans de retard" tandis que l'ancienne ministre Delphine Batho fustige un "naufrage".
À l'inverse, la droite est montée au créneau contre une "écologie punitive" et de "taxation", promettant la défense d'une "écologie positive" lors de la présidentielle. Les députés LR présenteront leur "contre-projet" mardi matin.
Fin février, le Haut Conseil pour le climat, une instance indépendante, avait pointé "la portée réduite" de certaines mesures, au regard des objectifs de réduction des gaz à effet de serre. L'Union européenne vient d'ailleurs de renforcer ses ambitions en 2030, pour baisser les émissions de 55 % par rapport à 1990.
"Ce n'est pas ce projet de loi seul" qui permet d'atteindre les objectifs côté français (baisse de 40% entre 1990 et 2030 à ce stade), mais "la somme" des mesures de plusieurs lois, et les "30 milliards de l'axe verdissement du plan de relance", nuance le ministère de la Transition écologique.
Et le rapporteur général Jean-René Cazeneuve (LREM) souligne les "avancées significatives" durant les débats, au retentissement limité par la crise sanitaire.
Les députés ont ainsi élargi l'interdiction de la mise en location des "passoires thermiques" (logements classés F et G en performance énergétique) en 2028, aux logements classés E en 2034. Ils ont aussi voté un "accompagnement individualisé" des ménages à chaque étape de la rénovation et une garantie partielle pour des prêts ("avance-mutation") de familles modestes.
"Pas la première ni la dernière loi"
Ont également été ajoutées des mesures en faveur du vélo, comme l'élargissement de la prime à la conversion à l'acquisition de vélos électriques. Pour l'aérien, la suppression de certaines lignes intérieures (entre Paris-Orly et Nantes, Bordeaux ou Lyon) a animé les débats.
Marqué par la crise des "gilets jaunes", née d'une taxe carbone sur les carburants, le gouvernement a insisté sur la "ligne de crête" entre "ambition écologique" et "acceptabilité sociale".
Une prudence manifeste au sujet des poids lourds, une filière très hostile au texte. Les LREM soulignent ainsi les nombreuses "étapes" avant la mise en place éventuelle d'une écotaxe régionale dans les collectivité volontaires.
"Ce n'est pas la première loi ni la dernière, mais on monte les escaliers quatre à quatre", assure le rapporteur Cazeneuve, qui revendique une écologie "de progrès", à rebours selon lui de la "décroissance" des Verts.
Avec AFP