Près de Sainte-Soline, des opposants aux mégabassines s'élancent à vélo vers Paris
Plusieurs centaines d'opposants au projet de mégabassines ont rejoint les Deux-Sèvres pour une manifestation à vélo, vendredi, qui s'élance du chantier controversé jusqu'à Paris.
Des opposants au projet de mégabassines se préparent à s'élancer à vélo depuis Lezay, près de Sainte-Soline (Deux-Sèvres), direction Paris, le 18 août 2023.
"Une activité positive après Sainte-Soline" : cinq mois après les violents affrontements de mars, plusieurs centaines d'opposants aux bassines ont rejoint, vendredi 18 août, les Deux-Sèvres pour une manifestation à vélo jusqu'à Paris, qui s'élance tout près du chantier de cette réserve d'irrigation agricole controversée.
À Lezay, commune voisine de Sainte-Soline, 700 manifestants à vélo et des dizaines de tracteurs étaient rassemblés vendredi midi dans un champ, dans la touffeur du mois d'août.
"L'idée de se déplacer en vélo c'est quelque chose qui me tient à cœur. L'idée, c'est de faire une activité positive après ce qui s'est passé à Sainte-Soline (...), de dire qu'on est toujours là, qu'on est toujours contre ce projet de mégabassine", a déclaré à l'AFP Annick Huet, animatrice d'ateliers en écologie à Melle (Deux-Sèvres), vélo chargé d'un matelas en mousse et surmonté d'un fanion bleu "L'eau est un bien commun".
Le trajet prévu sillonne cinq départements (Deux-Sèvres, Vienne, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Loiret) pour dénoncer "l'accaparement de l'eau" et son financement public, selon les organisateurs, qui doivent tenir une conférence de presse sur la remorque d'un tracteur.
À côté de tentes, des ateliers de réparation de vélo ont été installés pour les derniers réglages avant de prendre la route, sous la surveillance d'un hélicoptère qui patrouille dans le ciel.
Demande de moratoire
Après les affrontements très médiatisés entre manifestants et forces de l'ordre en mars, avec deux militants un temps plongés dans le coma, les autorités ont prévu un important dispositif de sécurité, incluant fermeture des routes à la circulation et utilisation de drones.
Déclaré auprès des préfectures concernées, ce "convoi de l'eau" se veut toutefois "un joyeux cortège" qui s'arrêtera près de plusieurs projets agricoles contestés localement, promettent le collectif Bassines non merci et le syndicat agricole Confédération paysanne, qui le coorganisent.
Les Soulèvements de la Terre, qui avaient coorganisé les dernières manifestations à Sainte-Soline, ont annoncé leur participation, après la suspension en justice de la dissolution du collectif prononcée par le gouvernement.
Le cortège sera ponctué d'une mobilisation le 26 août à Paris, au lendemain d'une étape à Orléans, siège de l'Agence de l'eau Loire-Bretagne qui cofinance les chantiers de réserves d'irrigation.
"On réclame un moratoire sur l'ensemble des projets de bassines sur l'ensemble du territoire national, ça signifie l'arrêt de tous les chantiers en cours, notamment Sainte-Soline, et un gel de tout financement public sur les bassines", a déclaré vendredi à l'AFP Julien Le Guet, le chef de file de Bassines non merci.
"Ça ne présage pas de la suite"
"Ce convoi, c'est la manière qu'on juge la plus efficace de porter le message en ce moment. Ça ne présage pas de la suite. Il faut être très clair : si demain il y a un démarrage de chantier alors que le comité de bassin demande un apaisement, comment prévoir quelle sera la réaction des gens de ce territoire ?", a-t-il ajouté.
Début juillet, le comité de bassin Loire-Bretagne, sorte de Parlement de l'eau regroupant usagers, élus et État, a voté une motion pour "favoriser le dialogue" et revoir la gouvernance de ce type de projet. Fait rarissime, elle a été saluée par irrigants et opposants.
La réserve de Sainte-Soline est la deuxième des seize en projet dans le Marais poitevin. L'objectif est de stocker en plein air jusqu'à 6 millions de mètres cubes d'eau puisée dans les nappes en hiver, afin d'irriguer les cultures en été, selon un principe de "substitution".
Ses promoteurs - 450 agriculteurs soutenus par l'État - défendent une assurance-récolte indispensable et un outil de transition vers l'agroécologie. Leurs opposants dénoncent un "accaparement de l'eau" par "l'agro-industrie", à l'heure du changement climatique.
Avec AFP