Menacé de redevance, le secteur des téléphones de seconde main craint pour son avenir
La ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, souhaite imposer à ces enteprises la redevance "copie privée" qui s'applique déjà aux fabricants d'appareils électroniques.
Faut-il taxer davantage les téléphones et les ordinateurs d'occasion ? Face à la pression du monde culturel visant à étendre la redevance "copie privée" qui s'applique aux produits neufs, plus de 1 000 employés du secteur de la vente d'appareils électroniques de seconde main affirment, dimanche 6 juin, que quelque 2 500 emplois seraient menacés si une telle mesure leur était imposée.
"La menace de l'application de la rémunération de la copie privée plane sur notre filière", s'inquiètent 1 129 salariés d'une centaine d'entreprises spécialisées dans le reconditionnement d'appareils, en premier lieu les smartphones, dans une tribune dans Le Journal du Dimanche (article abonnés).
La redevance "copie privée", qui s'apparente à une taxe même si elle n'est pas directement perçue par l'Etat mais par des organismes professionnels, s'applique aux fabricants d'appareils permettant de copier des œuvres culturelles. Elle est ensuite redistribuée aux acteurs de la culture, dans l'idée de les indemniser par avance pour l'usage supposé de ces appareils dans la copie de leurs œuvres dans un cadre privé.
La moitié des emplois du secteur menacés ?
Les lobbies culturels souhaitent l'étendre au secteur du reconditionnement, c'est-à-dire aux entreprises qui récupèrent des appareils obsolètes et les rendent à nouveau utilisables. Une semaine plus tôt, plus de 1 500 artistes avaient signé dans Le JDD une tribune en ce sens, qui reprenait pour l'essentiel les arguments des lobbies culturels, mettant l'accent sur le rôle important de cette redevance dans le financement de la culture.
"Nos vies comptent au même titre que la leur, notre réalité n'est pas moins importante et notre avenir est tout aussi fragile", leur répondent, dimanche, les employés du reconditionnement. Ils estiment qu'une redevance fragiliserait gravement leur activité, à l'équilibre encore difficile, et menacerait la moitié des emplois du secteur.
Ils soulignent que les montants issus de la redevance n'ont fait qu'augmenter ces dernières années alors même qu'elle ne s'applique pas à leur secteur. Cela va à l'encontre de l'argument du monde de la culture qui craint un assèchement de cette ressource face à l'essor du reconditionnement.
Le gouvernement divisé sur la question
Le sujet doit être examiné à l'Assemblée nationale le 10 juin, avec une proposition de loi qui exclurait explicitement les appareils reconditionnés de la redevance. La ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, s'y oppose vivement et veut étendre la redevance aux appareils de seconde main.
Mais d'autres membres du gouvernement, comme la ministre de l'Ecologie, Barbara Pompili, ou le secrétaire d'Etat au Numérique, Cédric O, sont favorables à une exonération pour protéger un secteur jugé bénéfique d'un point de vue environnemental.