L'Assemblée nationale donne son feu vert à des procès filmés
L'idée du ministère de la Justice est celle d'un programme télévisé régulier, "thématique par thématique" avec des décryptages de professionnels.
C'est une des mesures phares du projet de "confiance" dans la justice. Malgré les craintes d'une moindre "sérénité" des débats ou d'une dérive vers de la "téléréalité", l'Assemblée nationale a voté, mercredi 19 mai, en faveur de l'enregistrement et de la diffusion des procès.
Les députés se sont prononcés par 92 voix contre 15 en faveur de cet article 1er du projet de loi d'Eric Dupond-Moretti, qui prévoit "l'enregistrement sonore ou audiovisuel" des audiences en vue de leur diffusion, "pour un motif d'intérêt public" une fois le dossier définitivement jugé. Ce dispositif sera inscrit au sein de la loi de 1881 sur la liberté de la presse.
"Je veux que les Français voient comment on juge", a martelé le ministre et ancien avocat vedette, qui s'est référé aux réalisations passées de Raymond Depardon ou Daniel Karlin.
"Pas forcément les grands procès"
L'interdiction de filmer les audiences prévaut depuis la couverture sensationnaliste du procès aux assises de Gaston Dominici en 1954. Des exceptions existent cependant, notamment au nom du devoir de mémoire, pour la constitution d'archives historiques de la justice. Ce nouveau "motif d'intérêt public" va donc s'ajouter aux exceptions.
L'idée du ministère de la Justice est celle d'un programme télévisé régulier, "thématique par thématique" avec des décryptages de professionnels. Ce ne seront "pas forcément les grands procès" qui seront filmés, avait insisté mardi soir Eric Dupond-Moretti, évoquant des divorces, des affaires civiles ou commerciales "dans les territoires". Et de préciser : "La Chancellerie proposera, les chefs de juridiction décideront" et un cahier des charges devra être respecté lors du tournage, qui "ne coûtera rien" au ministère. Il souhaite que le service public ait en charge la diffusion.
De nombreux députés de droite comme de gauche ont dit leurs "plus grandes réserves" sur la mesure, redoutant une perte de "spontanéité" lors des audiences ou une "justice spectacle". "Le 'trash', c'est ce qui se passe aujourd'hui", a rétorqué Eric Dupond-Moretti, évoquant des émissions regardées lors d'"insomnies". "On va enfin parler sérieusement de la justice", a-t-il fait valoir, rejetant le besoin d'une expérimentation.