Jony, 41 ans, le SDF madrilène devenu influenceur sur Twitch dont l’histoire passionne la presse espagnole
Après sept années dans la rue, il a emménagé cette semaine dans un studio, loué grâce à l’argent récolté en faisant des vidéos sur Twitch. Un parcours qu’il aimerait désormais raconter dans les collèges et les lycées pour sensibiliser les jeunes à la réalité de la précarité.
Twitch est connu pour être le réseau préféré des gamers, les adeptes de jeux vidéo, mais en Espagne, l’un des utilisateurs qui fait le plus parler de lui n’a rien à voir avec les consoles. Il s’appelle Jony, il a 41 ans et il y raconte son quotidien de sans-abri dans le centre-ville de la capitale, Madrid, avec sa chienne Duna. Il a ouvert sa chaîne en avril dernier, et sept mois plus tard rassemble 37 000 abonnés. Cette semaine, il a pris ses valises, quitté son carré de trottoir sur la Plaza de las Cortes à Madrid pour s’installer dans un appartement. Un studio avec un bail de six mois, dans lequel il a tourné son premier direct en larmes, soutenu par une pluie de petits cœurs et de pouces levés envoyés par ses abonnés.
Jony revient de loin, il le raconte dans nombre de journaux, du Huffington Post à La Vanguardia. Il a grandi avec deux parents toxicomanes, s’est mis au cannabis à 13 ans, à la cocaïne à 16, puis ses trafics l’ont amené en prison, il en est sorti, il a enfin trouvé un travail, avant de le perdre en 2014, de ne plus pouvoir payer son loyer, d’être mis à la porte par son propriétaire, et de se retrouver dans la rue, avec sa valise et son téléphone. Un téléphone, justement, qui va rapidement devenir son sésame pour ne pas perdre pied.
D’abord, il contacte les bénévoles de la Croix-Rouge, qui lui proposent de suivre une thérapie pour sortir de la dépendance. Puis il s’inscrit sur Instagram, TikTok et donc Twitch, où il décide de créer sa chaîne, de se filmer et raconter son quotidien : comment trouver un endroit pour dormir, se mettre en sécurité ou manger chaud.
Au fil des jours, les abonnés affluent. Au bout de deux semaines, il passe la barre des 10 000 et la plateforme commence à le rémunérer. La première fois, Jony a reçu 400 euros, aujourd’hui ses directs lui rapportent un peu plus de 1 000 euros par mois. Ajoutés aux dons des anonymes qui le suivent, tout cela lui a permis d’acheter un micro-casque, de récupérer un ordinateur portable, une table pliante, puis de trouver un studio dans Madrid où il continue de faire des vidéos, même si son souhait, dit-il au quotidien ABC, "c’est désormais d’aller dans les collèges, les lycées, de sensibiliser les jeunes", leur dire de ne pas juger trop vite, et "témoigner de ce que c’est qu’une chute dans la drogue, la solitude, la rue, et surtout montrer qu’on peut s’en relever".