"Figure du siècle", "un juste entre les justes" : pluie d'hommages après le décès de Robert Badinter
Le président Emmanuel Macron a salué vendredi en Robert Badinter, mort à 95 ans, "une figure du siècle, une conscience républicaine, l'esprit français", annonçant qu'"un hommage national lui sera rendu". La disparation du héraut de l’abolition de la peine de mort a fait réagir l’ensemble de l’échiquier politique.
Robert Badinter prononce un discours aux côtés du président français Emmanuel Macron, lors de la commémoration du 40e anniversaire de l'abolition de la peine de mort au Panthéon, à Paris, le 9 octobre 2021.
Le président Emmanuel Macron a salué vendredi 9 février en Robert Badinter, mort à 95 ans, "l'homme de l'abolition de la peine de mort" et "une figure du siècle, une conscience républicaine, l'esprit français", annonçant qu'"un hommage national lui sera rendu". La disparition de ce défenseur de l'abolition de la peine de mort a suscité des réactions à travers l'ensemble de l'échiquier politique.
"Avocat, garde des Sceaux, homme de l'abolition de la peine de mort. Robert Badinter ne cessa jamais de plaider pour les Lumières", a souligné le chef de l'État sur X quelques minutes après l'annonce du décès de l'ancien président du Conseil constitutionnel.
"Un juste entre les justes"
Laurent Fabius, qui occupe cette fonction aujourd'hui et qui était membre du gouvernement de Pierre Mauroy à la même époque que l'emblématique ministre de la Justice, a rendu hommage dans un message à l'AFP à "un juste entre les justes", qui a "dans toutes les fonctions qu'il a exercées, dans toutes les causes qu'il a plaidées, fait progresser le droit et l'humanisme au plan national et international".
"Il aura consacré chaque seconde de sa vie à se battre pour ce qui était juste, à se battre pour les libertés fondamentales. L'abolition de la peine de mort sera à jamais son legs pour la France", a de son côté réagi le Premier ministre Gabriel Attal, également sur X.
"Robert Badinter était le défenseur des causes justes, l'humanisme incarné, la voix de la sagesse dans un monde bouleversé", a souligné à son tour la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet (Renaissance).
Le leader du MoDem François Bayrou a salué auprès de l'AFP "un repère et une référence". "C'était un esprit distingué, cultivé, ayant le courage de ses indignations. Pour plusieurs générations, il aura été un inspirateur", a souligné le centriste.
Pour l’actuel garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, Robert Badinter était un "Immense avocat, garde des Sceaux visionnaire et courageux (il) incarnait notre République et ses valeurs."
"Il incarnait l’idée même de justice"
Sur franceinfo, l'ancien président socialiste François Hollande a rendu hommage au "message" de Robert Badinter "non pas d'indulgence, mais de dignité humaine" avec l'abolition de la peine de mort. "C'était de faire comprendre que c'était le droit qui devait chaque fois l'emporter sur la force, c'est un message qui venait de loin. Sa famille avait connu les pogroms dans l'est de l'Europe, avait été accueillie en France, lui-même s'était caché à Chambéry pendant la période de l'Occupation", a détaillé François Hollande.
Assurant que l'ancien garde des Sceaux de François Mitterrand avait été "la cause de son engagement", le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a vu en Robert Badinter "plus que l'abolitionniste qui mit fin à la peine de mort" car "il incarnait l'idée même de justice".
Son homologue chez les Écologistes, Marine Tondelier a elle insisté sur la mort d'un "grand penseur des libertés" et un "Européen convaincu", tandis que Jean-Luc Mélenchon (LFI), qui avait côtoyé Robert Badinter au Sénat, a salué une "force de conviction sans pareille" et un homme "tout simplement lumineux". "C'était un orateur qui faisait vivre ses mots comme des poésies", a-t-il réagi sur X.
Les sobres hommages des droites
Les responsables politiques de droite et d'extrême droite se sont voulus sobres dans leurs commentaires, vendredi, après la mort de Robert Badinter, alors que la question de la peine de mort reste prégnante dans la société française.
"Ancien ministre de la Justice, homme de lettres, Robert Badinter a défendu toute sa vie ses idéaux, avec constance et éloquence", s'est contenté de décrire le président du RN, Jordan Bardella, né en 1995.
Marine Le Pen a pour sa part rendu hommage à "une figure marquante du paysage intellectuel et juridique", en rappelant qu'"on pouvait ne pas partager tous les combats" de l'ancien garde des Sceaux.
Car Robert Badinter fut longtemps une figure honnie de l'extrême droite française, qui voyait dans son humanisme revendiqué un "laxisme" et son combat contre la guillotine une faillite du système répressif.
En juin 1983, lorsque des centaines de policiers manifestent sous les fenêtres de son bureau aux cris de "Badinter assassin !", Jean-Marie Le Pen, président du Front national, est là.
Plus de quarante ans après l'abolition de la peine capitale, la question demeure aiguë : 81 % des sympathisants du Rassemblement national sont favorables à son rétablissement, de même que 51 % des sympathisants de LR - un chiffre comparable à la population globale -, selon l'étude Fractures françaises d'Ipsos parue en octobre dernier.
Loin du lyrisme des hommages rendus à gauche et au centre, la droite s'est voulue respectueuse, mais factuelle.
Le patron des Républicains, Eric Ciotti, a sobrement salué une "figure emblématique de la justice", en reconnaissant que "sa lutte pour l'abolition de la peine de mort restera gravée dans nos mémoires et nos institutions"; un "combat courageux", a appuyé Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France.
Le patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau, a salué "un talent, une culture et une intelligence mises toutes entières au service de convictions inébranlables".
"Reconnaissons, au-delà de nos différences politiques", a complété Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, "la force et la constance de son engagement".
Avec AFP