"Excessif", "anxiogène" : les Français jugent le traitement médiatique du Covid-19 dans les médias
Un journaliste travaille en régie lors d'un discours d'Emmanuel Macron sur la pandémie de Covid-19, le 31 mars 2021.
À l'occasion des Assises du journalisme, organisées du 29 septembre au 1er octobre, à Tours, en partenariat avec France Médias Monde, l'institut Viavoice a réalisé un sondage pour connaître l'avis des Français sur le traitement médiatique du Covid-19. Quelque 60 % d'entre eux jugent que la place donnée à la pandémie dans les médias a été "trop importante".
Depuis mars 2020, les articles, reportages, débats sur le Covid-19 sont omniprésents dans les médias. "Trop présents", selon plus d'un Français sur deux. D'après un sondage réalisé par l'institut Viavoice à l'occasion des Assises du journalisme, qui se dérouleront à Tours du 29 septembre au 1er octobre, et dont France 24 est partenaire, une majorité de Français jugent sévèrement le traitement médiatique de la pandémie.
"Depuis notre précédente étude, en octobre 2020, l'opinion des Français a assez peu évolué sur la question", note Stewart Chau, consultant en stratégie d'opinion chez Viavoice auprès de France 24. "Et le bilan est globalement mitigé."
Premier reproche formulé : les médias ont donné "trop d'importance" à la pandémie selon 60 % des personnes interrogées. "Et cela a amené le public à se détourner progressivement des médias ces derniers mois", explique le consultant. "Si on compare les sources d'information privilégiées des Français aujourd'hui, par rapport à octobre 2020, on remarque un recul pour tous les canaux traditionnels."
"Il y a certainement eu une volonté de prendre de la distance avec l'actualité liée à la pandémie", analyse-t-il.
Une information "catastrophiste"
Parmi les autres critiques formulées, 45 % des personnes interrogées considèrent que l'information sur la pandémie est "anxiogène", 45 % la jugent "excessive" et 33 % "catastrophiste". À l'inverse, seulement 8 % des Français félicitent une information "mesurée" et "constructive", 6 % la qualifient de "rigoureuse" et 12 % l'estiment par ailleurs "pédagogique".
"La nature même de la crise explique cette 'anxiogénéité' ressentie", nuance Stewart Chau. "En revanche, la critique d'une approche catastrophiste est plus inquiétante. Cela signifie qu'il y a un vrai décalage entre ce que les Français ont vécu et la façon dont les médias ont raconté et analysé les choses."
Conséquence de ce ressenti, les médias ont eu du mal à rassurer la population : 40 % des sondés estiment que le travail des journalistes a alimenté la peur de la pandémie et 34 % considèrent que cette peur a été "utilisée pour faire de l'audience." Seuls 14 % affirment que les médias ont aidé à maîtriser et combattre cette peur.
"Globalement, une tranche assez importante de la population a jugé que l'information sur le Covid-19 a été peu utile pour leur vie quotidienne", note aussi Stewart Chau. Dans le détail, 7 % jugent que l'information a été "indispensable," 16 % "très utile" et une majorité, "37 %", "assez utile". En revanche, 18 % dénoncent une information "néfaste".
Interrogés sur leurs attentes pour être mieux informés sur la pandémie, un Français sur deux souhaite "des informations constructives, qui proposent des solutions pour se protéger de la maladie", 48 % réclament un travail de fact-checking et 45 % des expertises de chercheurs ou de spécialistes sur les questions sanitaires. En revanche, ils se montrent moins intéressés par des reportages sur le terrain (20 %) et des débats entre experts (25 %).
Moins de Covid-19, plus de réchauffement climatique
Mais si les personnes interrogées expriment un ras-le-bol face à l'information liée à la pandémie, le Covid-19 semble avoir accentué la demande d'information sur le réchauffement climatique.
"Beaucoup de Français ont compris que la crise sanitaire était liée à la crise écologique", note Stewart Chau. "Donc si la pandémie a été le grand dossier de ces deux dernières années, nous allons certainement assister à un passage de témoin et voir la question climatique devenir le nouveau grand sujet."
À l'approche de la COP26, qui se tient en novembre à Glasgow, en Écosse, et alors que le rapport des experts de l'ONU sur le climat rendu en août a de nouveau tiré la sonnette d'alarme, 61 % des Français interrogés assurent se sentir suffisamment informés par les médias sur la question.
Mais dans le détail, 53 % estiment que les médias et journalistes n'accordent pas assez de place aux questions posées sur le changement climatique, un chiffre en augmentation de 5 points par rapport à octobre 2020.
"Et on retrouve les mêmes critiques que pour la crise sanitaire. Beaucoup déplorent aussi un traitement anxiogène et catastrophique", note Stewart Chau. "Comme pour le Covid-19, les Français réclament des informations constructives, qui proposent des solutions concrètes ou des expertises de chercheurs", poursuit-il.
"On entre dans une nouvelle étape. Le réchauffement climatique a été intériorisé. Maintenant, on veut sortir des analyses pures, des constats pour aller vers des solutions concrètes. Et on attend des journalistes qu'ils accompagnent et aident concrètement à agir."
Interviews réalisées en ligne, du 1er au 4 septembre 2021, auprès d’un échantillon de 1 000 personnes représentatif de la population française de 18 ans et plus. Représentativité par la méthode des quotas appliquée aux critères suivants : sexe, âge, profession, région et catégorie d’agglomération.