Culture d'été. "Bac Nord", un polar au cœur des quartiers nord de Marseille
Si on veut échapper à l'opposition binaire et franchement stupide qui ferait de Bac Nord un film pro-flic et des Misérables de Ladj Ly un film anti-flic, mieux vaut se dire que Cédric Jimenez, fan de cinéma américain, réussit dans un genre, le polar à la testostérone, là où les Français sont rares.
Il s'inspire d'une histoire judiciaire. En 2012, 18 policiers de la brigade anti-criminalité agissant dans les quartiers nord de Marseille étaient interpellés, entre autres pour trafic de drogue. L'affaire avait fait grand bruit.
Raconter les dessous d'un système
Certes, c'était gonflé de s'inspirer de l'affaire avant qu'elle ne soit jugée et de la résumer à un pitch succinct : trois policiers de ladite "bac", usés de ramasser des petits dealers aussitôt relâchés, ont l'occasion de frapper un grand coup.
Pour faire tomber un gros réseau de trafiquants de drogue, ils ont le feu vert de leur hiérarchie pour employer des moyens pas orthodoxes et évidemment quand les boeufs-carottes s'en mêlent, la police des polices, leurs chefs regardent le soleil se coucher sur la mer, loin de la panade des quartiers nord comme on dit à Marseille.
"C'est adapté de faits réels mais ça reste une fiction, insiste Cédric Jimenez. Aujourd'hui, on parle de violences policières, c'est abominable et insupportable mais ce n'est pas le sujet de Bac Nord. C'est un film qui parle plus du rapport des individus à leur hiérarchie, à l'institution." Et des rapports qui lient ces trois individus, incarnés par Gilles Lelouche, Karim Leklou et François Civil, trio complémentaire qui marche comme un seul homme, dans les moments de rigolade comme dans la peine et les scènes d'action indéniablement bien filmées.
Un trio qui fonctionne aussi en dehors du tournage. "J'ai vu des mecs déjà dont j'étais fan en tant que spectateur de cinéma, et après j'ai découvert des hommes qui avaient un engagement pour le film et zéro égo, raconte François Civil. Tout de suite on est sur une dynamique de travail. Et on est dans un cadre idyllique, c'est l'été, on est à Marseille, il n'y a pas de masque, il n'y a pas encore de pandémie, on fait des lectures de scénarios au bord de l'eau. Même quand on se retrouve le soir pour boire un coup, on continue à être dans un film, dans nos personnages, et à essayer d'avoir des idées. Tous les quatre on s'est très vite emparés du scénario déjà incroyable qu'avait écrit Cédric pour essayer de continuer à insuffler de la vie à ces personnages", poursuit l'acteur.