Cryptomonnaies : trois questions sur la faillite de la plateforme FTX qui plonge le secteur dans la crise
Cryptomonnaies : trois questions sur la faillite de la plateforme FTX qui plonge le secteur dans la crise
La société FTX, une des plus importantes plateformes d'échange de cryptomonnaies au monde, a annoncé vendredi son dépôt de bilan et la démission de son patron.
La débâcle, en quelques jours. FTX, la deuxième plus grande plateforme de cryptomonnaies au monde, a fait faillite, vendredi 11 novembre, plongeant ce secteur très peu régulé dans la tourmente. Le groupe était évalué à quelque 32 milliards de dollars (30 milliards d'euros). Selon les médias américains, la fortune de son patron déchu, Sam Bankman-Fried, forte de quelque 16 milliards de dollars, s'est évaporée en quelques jours.
Franceinfo fait le point sur ce crash, déjà comparé à celui de Lehman Brothers, la banque à l'origine de la crise financière de 2008.
Qu'est-ce que FTX ?
FTX est une plateforme qui permet, comme son concurrent Binance, d'échanger des cryptomonnaies contre d'autres monnaies numériques ou traditionnelles. Il y a un peu plus d'une semaine, le groupe était considéré comme la deuxième plus grande plateforme de cryptomonnaies au monde.
Jusqu'à vendredi, il était dirigé depuis les Bahamas, où se trouve son siège, par Sam Bankman-Fried, dit "SBF". L'entrepreneur de 30 ans était un interlocuteur privilégié des régulateurs de ce nouveau secteur d'activité et un donateur important du parti démocrate aux Etats-Unis.
FTX bénéficiait du soutien de nombreuses personnalités américaines. L'ex-couple star formé par le joueur de football américain Tom Brady et la mannequin Gisèle Bündchen avaient investi dans l'entreprise et en avait fait la promotion, comme l'ancien basketteur Shaquille O'Neal. L'équipe de NBA du Miami Heat avait rebaptisé sa salle FTX Arena.
Pourquoi l'entreprise a-t-elle coulé ?
La déconfiture a débuté le 2 novembre lorsque des informations de presse ont révélé que le fonds Alameda Research, appartenant à Sam Bankman-Fried, investissait dans des cryptoactifs émis par FTX.com dans un montage financier hasardeux porteur de risques de conflits d'intérêt majeurs. Sur la base d'un document interne, le site Coinbase* s'étonnait que les actifs d'Alameda Research soient en grande partie libellés en FTT, une cryptomonnaie utilisée uniquement sur la plateforme FTX.
Quatre jours plus tard, Binance, concurrent de FTX, annonce son intention de vendre ses jetons FTT "à cause des récentes révélations". Cette décision provoque l'effondrement du cours de cette cryptomonnaie et de nombreux clients se précipitent pour vendre leurs actifs stockés sur la plateforme FTX. Face à l'afflux, FTX est rapidement incapable de répondre à ces demandes de retrait, faute d'argent.
Dans un premier temps, Binance a volé au secours de son concurrent, en offrant de le racheter. Mais l'entreprise a finalement renoncé le 9 novembre*, après un audit, invoquant une "mauvaise gestion" des capitaux de clients et une enquête en cours des autorités américaines. Cette décision a donné le coup de grâce à FTX, qui s'est déclarée en faillite le 11 novembre. "SBF" a lâché les rênes et l'entreprise a été confiée à John J. Ray III, spécialiste des liquidations.
Cette chute s'est accompagnée samedi d'une attaque informatique. Des "transactions non autorisées" ont été observées, a déclaré Ryne Miller, responsable juridique de FTX, samedi matin sur Twitter. Selon le cabinet d'analyses en cryptomonnaies Elliptic, "477 millions de dollars auraient été volés".
Quelles sont les conséquences ?
Dans le monde des cryptomonnaies, certains acteurs n'hésitent pas à comparer le crash de FTX à celui de Lehman Brothers, la banque dont la faillite avait déclenché la crise financière de 2008. Changpeng Zhao, le patron de Binance, a estimé que c'était une "comparaison pertinente"*. "C'est décevant de voir une technologie créée en réaction à la chute de Lehman Brothers en 2008 produire sa propre version de cet événement", a réagi Jeremy Allaire*, PDG de Circle, autre acteur du secteur.
Il parait très peu probable que FTX parvienne à rembourser tous ses créanciers. "Beaucoup d'utilisateurs lambdas vont perdre leur argent, donc ce sera catastrophique pour l'écosystème à court terme", estime sur CoinDesk* Jay Jog, cofondateur de Sei Network, une autre entreprise du secteur. Il redoute une "perte de confiance" dans les cryptomonnaies de la part des investisseurs institutionnels comme des particuliers.
Après cette faillite spectaculaire, le petit monde des cryptomonnaies se prépare également à un tour de vis réglementaire. FTX fait l'objet d'une enquête de la Securities Exchange Commission et du département de la Justice à New York, selon le New York Times* citant des sources proches de l'enquête.
* Tous les liens marqués d'un astérisque sont en anglais