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Covid-19 : en France, la crainte d'un plafond sur la vaccination

Alors que la campagne de vaccination contre le Covid-19 s'ouvre à tous les adultes lundi, certains médecins s'inquiètent d'un possible ralentissement brutal cet été. En cause, les nombreux récalcitrants et les personnes éloignées du système de santé. Si l'Académie de médecine appelle à la vaccination obligatoire, la mesure reste écartée par le gouvernement. À partir du lundi 31 mai, la campagne de vaccination contre le Covid-19 sera officiellement ouverte à tous les majeurs. Cette nouvelle étape vers la tant espérée immunité collective, condition sine qua non à une sortie définitive de la crise sanitaire, va cependant de pair avec de nouveaux défis : s'assurer que tous les volontaires obtiennent un rendez-vous dans un délai acceptable, ne laisser personne de côté mais aussi convaincre les plus récalcitrants. Pour ce qui est de l'accès au rendez-vous, les autorités sanitaires se montrent plutôt sereines. La campagne de vaccination semble avoir trouvé son rythme de croisière. Et si 20 millions de personnes supplémentaires seront éligibles à la vaccination à partir de lundi, les promesses d'un coup d'accélérateur dans les centres de vaccination, d'un afflux supplémentaire de doses dans les prochaines semaines et le déploiement des vaccins Moderna dans les pharmacies et les cabinets médicaux en ville devraient suffire à satisfaire la demande. "Tout est mis en œuvre pour vacciner fort et pour vacciner vite. Nous tenons et tiendrons nos engagements sur la vaccination", assurait ainsi Olivier Véran le 17 mai dernier, sur le plateau de BFMTV. En revanche, chez les médecins, de plus en plus de voix s'élèvent ces derniers jours pour exprimer la crainte que la campagne de vaccination n'atteigne, dans les prochaines semaines, un plafond, en se heurtant aux hésitants et aux personnes éloignées du système de santé. "Lorsque l'on aura vacciné tous les volontaires, il va falloir aller chercher les autres", s'alarmait déjà auprès de France 24, il y a quelques semaines, Vincent Maréchal, professeur de virologie à l'université Paris-Sorbonne. "Il va falloir aller à la rencontre de toutes les personnes éloignées du système de santé et se confronter à toutes les personnes récalcitrantes face à la vaccination", alertait-il. C'est en effet ce qui a été observé aux États-Unis. Depuis mi-avril, lorsque le seuil des 50 % de la population ayant reçu une première dose a été franchi, la campagne de vaccination s'est trouvée fortement ralentie : après le record de 3,38 millions de doses administrées par jour à la mi-avril, le nombre d’injections quotidiennes a chuté de 41 % en un mois d’après le New York Times. Même constat au Royaume-Uni ou en Israël. Au 28 mai, plus de 25 millions de Français ont reçu une première dose de vaccin en France, soit 47 % de la population adulte. Aller à la rencontre des personnes éloignées du système de santé "Nous savons aujourd'hui que quelques groupes ne sont pas aussi bien vaccinés qu'ils le devraient. Un quart des plus de 80 ans n'a toujours pas reçu d'injection, alors qu'ils étaient parmi les premiers à pouvoir en bénéficier", reconnaît samedi 29 mai Alain Fisher, le président du Conseil d'orientation pour la stratégie vaccinale, dans une interview à L'Express. "Ces personnes sont peu mobiles, et probablement pas très enclines à se rendre dans les centres de vaccination ou chez leur généraliste. Il s'avère donc essentiel que les médecins ou les infirmiers aillent vers elles. Mais cela prend du temps", analyse-t-il. Chez les personnes âgées, quelques signes de ralentissement de la campagne de vaccination semblent d'ailleurs déjà apparaître. Selon les dernières statistiques du ministère de la Santé, disponibles sur la plateforme Doctolib, la courbe ne progresse pratiquement plus chez les plus de 70 ans, stagnant à 82,6 % pour les 70-74 ans et 79 % pour les plus de 75 ans vaccinés avec au moins une dose. Le problème se pose aussi pour les personnes en situation de grande précarité. "Pour elles, les vaccinodromes ne servent pas à grand chose", explique Vincent Maréchal. "La majorité ne fera pas la démarche de se faire vacciner d'elles-mêmes, tout simplement parce qu'elles sont loin de ces problématiques. C'est là où les acteurs locaux jouent un rôle majeur. Il faut tout miser sur la proximité." À l'échelle nationale, plusieurs dispositifs ont déjà été mis en place pour parer ce problème, notamment des campagnes d'appels ou de SMS. En Seine-Saint-Denis, département le plus pauvre de France, la Caisse primaire d'assurance maladie a, par exemple, déployé des centres de vaccination de proximité où les personnes peuvent se présenter sans rendez-vous. En parallèle, des campagnes de sensibilisation ont été mises en place dans les lieux publics. Convaincre les plus récalcitrants Reste la question majeure de la défiance face aux vaccins. Selon un sondage OpinionWay réalisé du 3 au 11 mai pour le journal Le Monde, 20 % des Français de plus de 18 ans refusent de se faire vacciner, et 13 % se disent toujours indécis. L'agence Santé publique France met en avant des chiffres encore plus inquiétants. D'après une étude publiée le 7 mai dernier et réalisée auprès de personnes qui n'ont pas encore été vaccinées, 44 % affirment ne pas vouloir le faire. Si ce chiffre est en net recul depuis janvier 2021, ces "antivax" empêcheraient d'atteindre l'immunité collective. D'après l'Académie de médecine, il faudra en effet vacciner 90 % des adultes ou 80 % de la population totale pour sortir durablement de la crise sanitaire. Dans un communiqué publié mardi 25 mai, l'organe consultatif recommande donc de rendre la vaccination obligatoire, aux professions essentielles d'abord comme les soignants ou les enseignants, puis à ceux en contact avec le public et les étudiants. Pour le moment, le gouvernement se refuse à cette solution, préférant miser sur l'effet d'entraînement. "La conviction qui est la nôtre depuis le début de la crise, c'est qu'il est plus efficace de miser sur la confiance et la conviction", a réagi jeudi Emmanuel Macron, rappelant cependant qu'"aucune porte n'est fermée par essence". Par ailleurs, la mise en place du pass sanitaire, à partir du 9 juin, devrait inciter quelques indécis à sauter le pas. D'autres plaident pour mettre en place des petits cadeaux pour les personnes vaccinées, à l'image de ce qui a été fait dans plusieurs pays, notamment aux États-Unis. Pour atteindre l’objectif d'au moins 70 % des adultes vaccinés avec une première dose d'ici la fête nationale du 4 juillet, certains États ont annoncé des loteries, avec des milliers de dollars à la clé, pour les personnes vaccinées. Des ligues sportives ont quant à elles promis des billets d'accès au stade aux vaccinés. Une technique d'incitation bientôt adoptée en France ?

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