AFFAIRE OUBLIÉES. L'affaire Georges Rapin, les crimes "parfaits" d'un aspirant gangster de Pigalle
Inoubliable pour les proches des victimes, l'affaire Georges Rapin ne fait plus la Une mais a marqué les années 1950 par la complexité de son protagoniste et la cruauté de ses crimes. Closer revient sur cette affaire hors norme.
"Je considère que l'assassin mérite cent fois la peine de mort, mais cet assassin ce n'est pas moi." Le 28 mars 1960, aux assises de la Seine, Georges Rapin risque la peine capitale. L'homme de 24 ans est accusé des meurtres de Muguette Thirel et Roger Adam, respectivement tués par balles en mai 1959 et avril 1958. Sur les bancs, des centaines de spectateurs s'alignent pour donner un coup d'œil au "gangster" le plus médiatisé du moment. Parce que oui, Georges Rapin est une star, comme il en a toujours rêvé.
Il était surnommé Monsieur Bill. Né le 30 août 1936 dans une famille aisée de la bourgeoisie parisienne, Georges Rapin grandit dans le Paris des années 1950, celui où les films de gangsters passionnent, où les romans de séries noires inspirent. À l'adolescence, Georges ne rêve plus que d'une vie à la Max le menteur dans Touchez pas au Grisbi. Il demande à son père de lui acheter un bar, qu'il baptise le Bill's bar, et rêve d'une réputation de brigand dans le milieu du banditisme parisien. Dans sa propre réalité, Rapin s'exhibe revolver à la ceinture, roule en Gordini, siffle cigarette sur cigarette et se fait un nom dans le proxénétisme. Il séduit même Muguette Thirel, dite Dominique ou Domino, une entraineuse qui lui donne des ailes. Il est le héros de sa propre série noire.
De la fiction à la réalité
Mais l'obsession vire à la folie. Et lorsque Dominique parvient à lui soutirer plusieurs millions de francs pour les remettre à son véritable compagnon, Stello, Monsieur Bill réagit à l'image de Max le menteur. Dans la nuit du vendredi 29 au samedi 30 mai 1959, il entraîne Thirel, âgée de 23 ans, dans la forêt de Fontainebleau. Sans hésiter, il lui tire plusieurs balles dans le ventre et le dos, avant de l'asperger d'essence et de l'enflammer avec un journal. Celui qui se rêvait truand devient le pire de tous, et ainsi commence le parcours criminel de Georges Rapin.
Pourtant, son crime ne séduit pas les caïds de Montmartre, méprisants face à ce fils à papa trop propret pour le rôle. Le 4 juin 1959, Monsieur Bill est dénoncé par ceux qu'il considérait comme ses paires. En plein délire, Georges Rapin avoue. Pas seulement le meurtre de Muguette Thirel, mais aussi celui de Roger Adam, abattu d'une balle dans la tête début avril 1958, à Villejuif. Il s'attribue également onze autres crimes "parfaits", qu'il raconte avec l'indifférence de ses plus grandes idoles. Mais la vie n'est pas un film et en comprenant ce qu'il risque, Georges Rapin finit par se rétracter. Trop tard, les meurtres de Muguette Thirel et Roger Adam lui sont attribués. À son domicile, les enquêteurs retrouvent l'arme utilisée contre Adam, ce qui confirme l'implication de Rapin dans le meurtre de ce dernier. Les onze autres crimes avoués par Bill se révèlent inventés de toutes pièces.
Un "suicide à la guillotine"
Le 28 mars 1960, des centaines de curieux se pressent aux assises de la Seine pour assister au procès de l'aspirant gangster le plus fou que la terre ait porté. Le jury prononce la peine capitale le 31 mars 1960, et le 26 juillet 1960, Rapin est guillotiné dans la petite cour de la Santé. Dans les colonnes de Paris Match, Pierre Joffroy parle de "suicide à la guillotine" en référence aux aveux irréfléchis de Rapin, une expression déjà utilisée en août 1959 lors de ses aveux. Soixante ans après sa mort, Monsieur Bill demeure l'un des criminels français les plus mystérieux et indéchiffrables de l'histoire de la justice.
Inscrivez-vous à la Newsletter de Closermag.fr pour recevoir gratuitement les dernières actualités