Viol et comportements sexuels déviants : un Youtubeur star français accusé par huit femmes
Suivi par plus d'un million d'abonnés sur Youtube, Léo Grasset est mis en cause par huit femmes. Dans les colonnes de Mediapart, elles accusent le vidéaste scientifique de viol, de violences sexuelles et psychologiques.
"J'ai eu excessivement peur". Comme Lisa (dont le prénom a été modifié), sept femmes accusent un Youtubeur français star de viol et violences multiples dans une longue enquête publiée par Mediapart ce jeudi 23 juin. Si "aucune plainte n'a à ce jour été déposée", elles mettent "en cause, à des degrés très divers, dans des relations intimes ou au travail" Léo Grasset, dont la chaîne Youtube DirtyBiology comptabilise plus d'1,3 million d'abonnés. Comme le trentenaire, Lisa est connue sur Internet où elle publie des vidéos. C'est par l'intermédiaire de Youtube que la jeune femme âgée d'une vingtaine d'années aurait rencontré Léo Grasset avec lequel elle a d'abord vécu une relation amoureuse avant que tout dérape, selon elle. "Le truc qui est devenu excessivement malsain, c'est que j'étais retombée dans l'engrenage de l'admiration, de l'emprise", confie Lisa à Mediapart. Un soir de 2016, à Paris, ils se retrouvent en fin de soirée.
"Je lui dis plusieurs fois que je n'ai pas envie (de faire l'amour)", raconte Lisa, qui affirme avoir vu une "espèce de switch dans son regard" après avoir refusé l'acte. Léo Grasset l'aurait alors "maintenue avec ses mains autour du cou" avant de la pénétrer "avec des coups très forts". "J'ai voulu crier et il n'y avait aucun son qui sortait de ma bouche, explique-t-elle à Mediapart, en larmes. (...) J'avais vraiment une espèce de dissonance cognitive maximum où je me disais 'c'est la personne que j'aime et il vient de se passer ça'." Les mois suivants, Lisa aurait vécu une "descente", comme le décrit sa mère, durant laquelle elle aurait vu "des psys" et pris "des "médicaments" pour calmer ses crises d'angoisse. Selon les sources interrogées par Mediapart, Léo Grasset aurait parlé de Lisa à plusieurs reprises par la suite, la décrivant comme son "plan cul", une "psychobitch", une "mytho" et se serait attelé à discréditer la jeune femme dans le petit monde de Youtube.
"Il a beaucoup de mal avec la notion de consentement"
Sur Facebook en 2019, Léo Grasset l'aurait contactée. "Je veux profiter de ce message pour m'excuser. [...] J'ai pas été correct avec toi quand on s'est revus en 2016. [...] Bon c'était une période particulièrement bordélique de ma vie, et ça va mieux maintenant, mais ça n'excuse rien", lui aurait écrit le jeune homme. Lisa, "détruite", n'a jamais voulu porter plainte contre lui, persuadée que sa carrière aurait pu en pâtir. "Au mieux, je vais être considérée comme la fille qui a été violée, ajoute-t-elle auprès de nos confrères. Au pire, tous les autres vidéastes vulgarisateurs vont se liguer contre moi." Quatre ans après le viol dont elle accuse le Youtubeur, d'autres témoignages sont arrivés à ses oreilles. Comme celui de Marine Périn, qui a eu un rapport avec Léo Grasset à l'été 2018. "À titre perso, je peux te dire qu'il a beaucoup de mal avec la notion de consentement. Par exemple, crier le mot "arrête" ne l'empêche pas du tout de continuer", écrit-elle à un autre vidéaste.
Selon elle, Léo Grasset est "dans l'idée de sexe brutal mais consenti" et souffrirait de sexomnie, "un trouble rare, qui ressemble à du somnambulisme, avec des gestes, parfois brutaux, de nature sexuelle, parfois sans souvenirs au réveil", selon Mediapart. "Je baise en dormant, des fois. [...] Quand je suis dans cet état-là, j'suis un peu animal, lui aurait-il expliqué par message. [...] Quand je suis éveillé, je fais vachement attention à l'autre [...], alors que quand je dors, je m'en baleeeeeeeek." Six autres femmes accusent le Youtubeur de "violences psychologiques" ou de comportement "toxique" durant leurs relations. Avec Jeanne, Chloé ou encore Emilie, Léo Grasset aurait discuté pendant des mois, à une cadence très soutenue, avant de ne plus répondre. "J'ai eu l'impression d'être un peu un objet qu'il ne considère pas. Ça a été psychologiquement compliqué, raconte la deuxième, une comédienne, à Mediapart. Dans ma situation psychologique fragile de l'époque, je me suis beaucoup dit que c'était de ma faute."
Léo Grasset n'a pas souhaité s'exprimer
Toutes racontent le même schéma "d'emprise" qu'aurait exercé le Youtubeur sur elles pendant des mois, utilisant leurs points faibles et les poussant à bout, physiquement comme mentalement. Certains anciens collaborateurs de Léo Grasset pointent aussi, dans les colonnes de Mediapart, son comportement au travail ou il aurait fait des invitations non sollicitées et des "blagues" sexistes à connotation sexuelle. Contacté par le site d'investigations pour réagir aux accusations dont il fait l'objet, le vidéaste n'a pas voulu répondre. "Nous ne souhaitons pas répondre aux sollicitations de presse, Monsieur Grasset se tenant à disposition de l'autorité judiciaire dans l'hypothèse où celle-ci était saisie de ces allégations", ont fait savoir ses avocats.