VIDEO. Mort d’un salarié sur une plateforme du groupe pétrolier Perenco : y a-t-il eu des failles dans la sécurité ?
Le 21 octobre 2021, "Complément d'enquête" s'intéresse à une compagnie pétrolière française peu connue du grand public : Perenco. L'entreprise dit veiller avec grand soin à la sécurité des employés sur ses plateformes de forage. Pourtant, plusieurs accidents mortels récents interrogent, comme celui d'Hubert Chazarenc, 34 ans, survenu au large du Cameroun.
Hubert Chazarenc travaillait sur une structure de forage appartenant au groupe pétrolier Perenco, au large du Cameroun. Il est décédé à 34 ans, après avoir fait une chute de 13 mètres dans la mer. Que s'est-il passé ce jour de novembre 2020 sur la plateforme ? Y a t-il eu des failles dans la sécurité ?
Les journalistes de "Complément d'enquête" ont pu se procurer le rapport de la gendarmerie camerounaise, qui a enquêté sur place le lendemain du drame. Les photos prises sur les lieux montrent notamment une planche d'échafaudage cassée. L'hypothèse est qu'elle aurait cédé sous le poids d'Hubert. Déstabilisé, il aurait basculé dans un large tuyau dont le couvercle de protection n'était pas soudé. Hubert effectuait une opération de routine, il était seul et ne portait pas de harnais. En tombant à la mer, il se serait cogné sur des éléments métalliques, au ras de l'eau. Il est mort d'un traumatisme crânien.
Face aux enquêteurs, le représentant de Perenco a contesté toute responsabilité. Ce n'est pas le point de vue de certains collègues d'Hubert. L'un d'eux, qui témoigne anonymement, a confié à "Complément d'enquête" un enregistrement clandestin datant du lendemain du drame. Selon lui, le discours que tiennent les managers de Perenco, venus de Paris pour s'adresser aux ouvriers, serait un aveu des défaillances du pétrolier.
Trois décès en huit mois
"Personne ne vous demande de travailler dans des conditions dangereuses", affirme le manager dans cet enregistrement. Pourtant, maintient le collègue d'Hubert, "ce sont les conditions Perenco". D'après lui, certaines phrases prononcées par le cadre semblent les reconnaître en partie : l'échafaudage "aurait certainement pu être mieux que ce qu'il était" ; après le drame, il faut "avancer, mais pas en marchant à côté d'une planche pourrie"... Un "double discours" selon le témoin : "Une planche pourrie, on la remplace, ça coûte 30 euros ! Eux, ils ne sont pas à 30 euros près, c'est une entreprise qui brasse des milliards."
"Ça me dépasse qu'avec les millions qu'ils font, on fasse encore des trucs comme ça", confiait également Hubert à sa compagne avant son accident. Dans les vidéos et les messages qu'il lui adressait, il témoignait de conditions de travail qu’il jugeait difficiles, et aussi d'un sentiment d'insécurité. "J'ai dû monter sur les rambardes de la nacelle dans le vide, appuyé contre le tuyau sur la pointe des pieds, à 20 mètres de haut" ; ou encore "Ils nous font des pitchs sur la sécurité de 30 minutes, et à côté, ils nous font lever des trucs de 90 kilos à 5 mètres de haut..." Hubert n'est pas un cas isolé. Au Cameroun, deux autres personnes sont décédées. En huit mois (de mai 2020 à janvier 2021), il y a eu trois accidents mortels sur les plateformes Perenco : des statistiques bien supérieures à la moyenne du secteur. De son côté, la direction du groupe affirme respecter tous les protocoles de sécurité sont toujours respectés, et les avoir renforcés après ces décès.
Extrait de "Perenco : la low-cost du pétrole", un reportage à voir dans "Complément d'enquête", jeudi 21 octobre 2021.
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