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Arts et People

TEMOIGNAGE. "Mon fils, né fille, a fini par se suicider, car il vivait mal sa transidentité"

A 16 ans, Clara annonce qu'elle veut changer de genre. Yolande l'accompagne dans sa transition, mais son enfant, rebaptisé Maxence, met fin à ses jours, terrorisé par l'avenir incertain qui s'annonçait. "Jamais je n'ai perçu de mal-être durant l'enfance de Clara. C'était une petite fille heureuse, équilibrée, souriante, qui aimait porter des robes, chanter, danser. Avec son papa, nous formions une famille parfaite", se souvient Yolande. Entre l'enfant et sa mère, les relations sont fusionnelles. "Je l'appelais ma Girly, nous étions très tactiles, souvent dans les bras l'une de l'autre." Mais à son entrée en classe de troisième, la jeune fille change de comportement, s'éloigne de sa maman et entame unetransformation physique progressive. Elle coupe ses longs cheveux souples, adopte un look plus mixte. Elle cache aussi sa silhouette dans des pantalons larges et des sweats à capuche trop grands. "J'ai compris plus tard qu'elle voulait masquer ses courbes naissantes déclenchées par la puberté, analyse sa mère. C'est à ce moment-là que son malaise a commencé." Sous ses vêtements, Clara cache aussi les scarifications qu'elle s'inflige sur les bras et les cuisses, autant de manifestations de son profond malaise. Maxence fait un coming out par SMS En 2015, le père de Clara décède d'un cancer, ce qui aggrave la détresse de l'adolescente. "A de nombreuses reprises, je lui ai proposé de consulter des psychologues. Elle a toujours refusé, tout comme elle refusait de se confier à moi." Entre la mère et la fille, les relations se tendent encore plus. Yolande pense déceler chez Clara les symptômes d'une sévère crise d'adolescence. "Je ne pouvais rien lui dire. Tout ce qui sortait de ma bouche l'agaçait. Je pensais que j'en avais pour deux ans et qu'ensuite ça passerait." Un soir d'avril 2017, lors d'une conversation devant un film où un acteur incarne le rôle d'une mère de famille transgenre, la jeune fille sème quelques indices troublants. "Elle m'a dit que l'acteur n'était pas crédible et qu'il aurait fallu prendre un vrai trans pour le rôle. Puis elle m'a parlé d'une personne de son entourage qui s'apprêtait à prendre de la testostérone." Et dès le lendemain, elle envoie un SMS à sa mère et fait son coming out. "Le sol s'est dérobé sous mes pieds, reconnaît Yolande, totalement désemparée par cette annonce. Un monde complètement inconnu m'apparaissait et, en même temps, je me devais de rassurer mon enfant." Elle répond aussitôt qu'elle l'aime et qu'elle sera toujours là pour elle. "Puis j'ai eu un seul après-midi pour me renseigner sur la transidentité sur Internet. Là, j'ai senti tout de suite qu'il fallait réagir vite." Obligé de décaler d'un mois sa prise d'hormones, le jeune homme était anéanti Yolande prend rendez-vous auprès d'une psychologue et d'un endocrinologue afin d'accompagner son enfant pour qu'il commence sa transition. Les deux professionnels confirment l'urgence à agir. Une prise de sang est effectuée pour mesurer le taux d'hormones, mais l'un des résultats se révèle incorrect et il faut procéder à des examens complémentaires. "Maxence était anéanti, car cela décalait d'un mois la première prise d'hormone. Pour lui, c'était dramatique", explique Yolande qui, depuis son coming out, appelle son enfant par son prénom masculin. Quelques jours plus tard, en août 2017, l'adolescent tente de mettre fin à ses jours. Admis en clinique psychiatrique durant quelques semaines, il y reçoit sa première injection de testostérone fin septembre. "C'était le début de sa nouvelle vie, de sa délivrance, pensais-je aussi. J'étais heureuse pour lui." Dès le premier mois, les hormones agissent. "Il a eu très vite des poils de barbe sur le menton, puis sa voix a mué. Pour moi, c'était perturbant", confie Yolande, qui tente d'accompagner son fils au mieux. Début 2019, Maxence sombre à nouveau. "Et tout s'est effondré", écrit-il dans un journal intime retrouvé plus tard par Yolande, et sur lequel elle s'appuiera pour écrire un livre, Maxence ou le Journal d'un mec bancal (éd. Paulo-Ramand). "Sa prise en charge est arrivée trop tard", déplore la mère de Maxence "Personne n'a vraiment compris ce geste. Ses amis le soutenaient, ses professeurs aussi, il était très entouré, comme dans un cocon qu'il ne voulait apparemment pas quitter. Mais l'avenir l'angoissait beaucoup", pense sa mère. Quelques mois plus tard, le 8 mai 2019, Maxence est retrouvé pendu à un arbre un soir de tempête. Il allait avoir 18 ans. "Avant son coming out, il avait tout gardé pour lui pendant deux ans et il avait accumulé beaucoup d'angoisse et de mal-être. Sa prise en charge est arrivée trop tard. La veille de son décès, il a joué dans son spectacle de théâtre de fin d'année. Il a dit au revoir à tout le monde, puis il a tiré sa révérence..." Loading widget Inscrivez-vous à la Newsletter de Closermag.fr pour recevoir gratuitement les dernières actualités

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