TÉMOIGNAGE. “Donner ses ovocytes, c'est tisser un fil d'humanité”
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Doïna et Aurélie En donnant ses ovocytes, cette maman de deux enfants milite pour aider les femmes stériles qui le souhaitent à donner la vie.
A 31 ans, cette mère de famille a donné ses ovocytes pour aider une amie à surmonter son infertilité. Un acte de générosité trop rare que la jeune femme encourage.
Un jour de 2015, Doïna reçoit un mail de son amie Aurélie, rencontrée en fac de psycho. "Elle sensibilisait toute notre bande au don d'ovocytes parce qu'elle risquait de perdre sa fertilité, à seulement 28 ans. Elle était touchée par un cancer du côlon, et la chimiothérapie menaçait d'abîmer ses ovocytes", explique Doïna. Aurélie, que l'on peut soutenir sur Instagram : @danser_dans_le_blizzard, vient de rencontrer son compagnon. Elle a fait congeler ses gamètes, mais elle veut prévoir un plan B en cas d'échec : le recours au don.
Se projeter dans l'après-maladie est pour elle vital. Or, si le Centre d'études et de conservation des œufs et du sperme (Cecos) régional dont elle dépend reçoit plus de dons, elle aura forcément plus de chances d'en bénéficier. Doïna se renseigne : "C'était le seul moyen de lutter contre le sentiment d'impuissance !" A l'époque, les conditions du don sont assez restrictives. "Pour devenir donneuse, il fallait avoir moins de 38 ans et avoir eu des enfants. J'avais 31 ans et deux enfants de 2 et 5 ans. Il fallait aussi l'accord du mari... alors que c'était tout de même mon corps !", soupire-t-elle.
En vertu de l'anonymat entre donneuse et receveuse, elle ne rencontrera jamais les bénéficiaires de son don
Heureusement, Jérémie, son mari, adhère : "Il voyait que le geste faisait sens pour moi." Depuis, ces clauses ont été supprimées. Aujourd'hui, il suffit d'avoir entre 18 et 37 ans et d'être en bonne santé pour donner ses ovocytes. Habitant Dinan (Côtes-d'Armor), elle dépend du Cecos de Rennes, à environ trois quarts d'heure de route. Les voilà partis, lui pour le fameux accord, elle pour une prise de sang, une rencontre avec le généticien qui note les antécédents familiaux médicaux afin d'en informer les futurs parents, un anesthésiste et une psychologue.
"Une fois ma candidature validée, j'ai choisi le moment de l'hyperstimulation ovarienne, qui permet la ponction de plusieurs ovocytes, explique Doïna. Inondée d'hormones pendant les trois semaines de l'été 2015, sans symptôme, je me suis ensuite pliée aux échographies tous les deux jours, forte du sentiment de faire quelque chose d'utile. Comment comparer quelques contraintes au bonheur donné d'être parent ?" En vertu de l'anonymat entre donneuse et receveuse, elle ne rencontrera jamais les bénéficiaires de son don, mais "le visage des parents dans la salle d'attente du Cecos me suffisait. On y lisait la détresse et l'épuisement".
Seules 700 femmes font ce geste altruiste chaque année
En effet, les receveuses attendent fréquemment un don durant deux à trois ans, sans succès garanti. Doïna s'est sentie comprise par ses proches : "Il n'est venu à l'idée de personne que l'enfant né de mon don serait « mon enfant ». Il s'agit pour moi de solidarité, d'être le maillon d'une chaîne d'humanité, rien d'autre." Le prélèvement sous brève anesthésie générale, dans les locaux du Cecos, lui permet de sortir dans la journée, "après avoir été traitée comme une princesse", précise Doïna. En effet, seules 700 femmes environ font ce geste altruiste chaque année.
"Les suites ont été plus difficiles parce que, étant très mince, j'ai récupéré moins vite. Mais j'étais très connectée à mon corps comme au sens de mon action. Je n'ai pas regretté un seul instant", précise-telle. Aurélie, en rémission, et son mari sont éperdus de reconnaissance, un sentiment que les épreuves à venir vont renforcer.
Après la naissance de jumeaux mort-nés, le don d'ovocytes est la dernière chance pour son amie
"Après plusieurs échecs d'implantation avec ses propres ovocytes, Aurélie est tombée enceinte, mais sa grossesse s'est conclue en avril dernier par la naissance de jumeaux mort-nés. Ce drame a précipité mon amie dans la configuration qu'elle redoutait il y a sept ans, soupire Doïna. Avoir besoin d'un don d'ovocytes ! A nouveau, Aurélie a besoin d'augmenter ses chances d'en bénéficier le plus rapidement possible, en trouvant des donneuses !" A 38 ans, Doïna doit passer le relais et encourage les jeunes femmes à faire ce don magnifique : "On est une équipe. Ce sentiment me porte encore."
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