news-details
Arts et People

TEMOIGNAGE. "Bipolaire, je me bats tous les jours pour ne pas sombrer"

Il y a six ans, Charlotte a appris qu'elle était maniaco-dépressive. Cette jeune femme de 31 ans a choisi de ne pas se cacher pour pousser les autres à se faire diagnostiquer et sauver leur vie. Jusqu'à l'âge de 25 ans, Charlotte Carugati ne comprenait pas pourquoi elle était terrassée par des dépressions à répétition. "Dès mes 6 ans, mes parents m'ont emmenée voir des psys parce que j'étais dévastée par l'angoisse et avais une empathie disproportionnée lorsqu'il y avait des catastrophes dans l'actualité." En souffrance affective permanente, Charlotte peinait aussi à tisser des liens avec les bonnes personnes. Et en 2008, alors qu'elle a 18 ans et qu'elle est en IUT de journalisme, qu'obsédée par des idées suicidaires, elle doit être hospitalisée. Elle commence un suivi psy, mais avec l'étiquette de dépressive. Or il n'y a pas que cela qui lui empoisonne la vie. "Je traversais des phases courtes de surexcitation totale, ne dormant presque plus. Euphorique, je travaillais de façon acharnée... et je dépensais quasi deux fois mon salaire en un temps record !" Les pires périodes : l'approche de Noël ou de son anniversaire. "J'éponge l'effervescence ambiante, avec des émotions décuplées", explique la jeune femme. "J'exerce le métier de vivre : sortir de mon lit le matin, me coucher tôt le soir en prenant mes médicaments..." En 2015, après une fête d'anniversaire, elle craque. "Je pouvais faire n'importe quoi, comme entreprendre de traverser la France avec mon lapin, parlant à tout le monde", se souvient Charlotte, surprise par ce premier virage maniaque. Le bon diagnostic tombe avec l'hospitalisation d'office : elle est bipolaire, une maladie qui fait alterner des périodes de dépression avec des moments d'entrain excessif, les phases maniaques. Celle qui voulait devenir journaliste part alors à la recherche de toutes les informations sur cette pathologie. Elle découvre ses chances : ne pas être sujette aux addictions nocives qui vont souvent avec, comme l'alcool, la drogue ou la sexualité compulsive. Et ses faiblesses : "J'ai dû apprendre à me psycho-éduquer, à repérer les situations à risques ou les gens qui ne me conviennent pas. Savoir s'écouter, c'est le secret", explique-t-elle. Traitée par des médicaments qui permettent de réguler l'humeur, elle voit son handicap reconnu et ne travaille plus pour le moment. "J'exerce le métier de vivre : sortir de mon lit le matin, me coucher tôt le soir en prenant mes médicaments, avoir une vie régulière, me rendre aux ateliers d'art-thérapie. J'occupe mes mains et mon esprit avec l'écriture ou la mosaïque, pour avoir un début de vie active. Chaque jour est un triomphe parce que je suis en vie. Je peux à tout moment rebasculer." "Echanger sur la maladie et bien se connaître, c'est essentiel" Sa hantise, c'est de retourner à l'hôpital où elle a déjà fait onze séjours : "Il sauve et détruit à la fois. On rencontre des gens au parcours atroce, avec des traumatismes, des récits de vie difficiles à oublier...", soupire Charlotte. Quand elle rencontre quelqu'un qui subit les mêmes souffrances qu'elle, elle l'oriente sur les Centres Experts FondaMental, SOS Suicide ou l'association spécialisée dans les troubles mentaux UNAFAM, car "échanger sur la maladie et bien se connaître, c'est essentiel", insiste-t-elle. "Il faut aussi identifier ses piliers. Pour moi, il s'agit de ma famille, de mon petit frère Lorenzo, de Sophia, mon amie depuis vingt ans, et d'une équipe pluridisciplinaire", conclut Charlotte, convaincue de l'importance d'être bien entourée. Loading widget Inscrivez-vous à la Newsletter de Closermag.fr pour recevoir gratuitement les dernières actualités

You can share this post!