Suicides dans la police : "La médecine préventive ou les psychologues sont sous-dimensionnés", selon Unité SGP Police FO
"Les suicides, c'est la partie apparente du mal-être de la police", pointe le secrétaire national du syndicat. Les "burn out" ne sont pas comptabilisés, selon lui.
"Tous nos services de support, que ce soit la médecine préventive ou les psychologues sont sous-dimensionnés", réagit samedi 5 février sur franceinfo Jean-Christophe Couvy, secrétaire national Unité SGP Police FO aprèsla rencontre de la veille avec Gérald Darmanin au sujet des suicides dans la police. Le ministre de l'Intérieur a annoncé le recrutement d'une vingtaine de psychologues dans les endroits les plus difficiles de la police nationale. Depuis le 1er janvier, douze policiers se sont donné la mort. "Ça va être un travail long", selon Jean-Christophe Couvy.
franceinfo : Est-ce que vous avez le sentiment d'avoir été vraiment entendus, compris, et qu'on va sérieusement vous aider sur ce sujet ?
Jean-Christophe Couvy : On a la confirmation déjà que la place Beauvau ce n'est pas Poudlard [un pensionnat pour jeunes sorcières et sorciers, dans l'univers de Harry Potter]. D'un coup de baguette magique, on ne peut pas changer les choses. On a expliqué d'où venait notre ressenti sur le mal-être de la police. On sait que ça va être un travail long. Mais on n'a pas l'impression non plus qu'on a une révolution managériale. On voit qu'il y a des avancées, les choses essaient de bouger un tout petit peu. Ce n'est pas ce qu'on attend non plus. On attend de retrouver cet esprit de famille qui représente la police. La police, depuis des années, a été sclérosée. C'était la course du chiffre. Il y a encore des indemnités de résultats de performance.
Au sujet des changements concrets, qu'on vous a promis, il y a d'abord une mission de l'Inspection générale de l'administration, des consignes de vigilance, courriers de soutien, mais aussi 20 psychologues de plus pour le service de soutien psychologique opérationnel, donc, ça va faire 120 psychologues pour 145 000 policiers. Qu'en pensez-vous ?
Le ratio est faible. On voit bien effectivement que c'est sous-dimensionné. Tous nos services de support, que ce soit la médecine préventive ou les psychologues sont sous-dimensionnés par rapport au nombre que nous sommes. Les policiers, tous les jours, accumulent les petits traumatismes et, à un moment donné, il y a le traumatisme de trop qui nous fait passer à l'acte. Il y a aussi tous les burn out qu'on ne comptabilise pas parce que les suicides, c'est la partie apparente du mal-être de la police. Il faut vraiment travailler sur du long terme et aller dans la matière. Dans le fond.
Un autre dispositif mis en place, c'est celui des sentinelles. Des policiers qui sont formés pour repérer les "signaux faibles". L'objectif, c'est 2 000 sentinelles fin 2022. On n'en est pas là du tout pour l'instant. Il y a une quarantaine de personnes à titre expérimental. C'est ça ?
Bien sûr, c'est expérimental. On en voudrait 2 000 mais il en faudrait presque 20 000. Il faut s'inspirer des modèles par exemple en Israël ou au Québec. Ce sont des policiers qui sont formés. Mais attention, on ne va pas faire du e-learning [enseignement à distance]. Il faut que ce soit des professionnels qui nous forment à détecter les signaux faibles. Donc, tout ça, ça prend du temps. On a lancé la machine et c'est en cours. Ça va être un travail long. Moi, je pense à toutes ces familles endeuillées chaque année. On a passé un recrutement lors du dernier quinquennat de 10 000 policiers. Mais combien vont se suicider ? Est-ce que les jeunes qui rentrent dans la police savent qu'ils ont une chance malheureusement d'un jour de suicider à cause du métier ? Donc il faut changer les choses. Il faut changer ce paradigme. Il faut justement retrouver cet esprit de famille, de cohésion.