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Projet Pegasus : logiciel espion israélien, journalistes et chefs d'Etat ciblés... Ce que l'on sait de l'affaire de cybersurveillance mondiale

Plusieurs Etats sont accusés d'avoir eu recours à un logiciel espion israélien pour cibler des journalistes, opposants mais aussi membres de gouvernement et chefs d'Etat.  Ils sont militants, journalistes, opposants politiques, mais aussi chefs d'Etat comme Emmanuel Macron. Tous ont été ciblés, voire espionnés, par un logiciel élaboré par l'entreprise israélienne NSO et appelé Pegasus. Cette enquête révélée dimanche par le consortium de journalistes Forbidden Stories, auquel appartient la cellule investigation de Radio France, ne cesse d'avoir des répercussions à travers le monde, interrogeant notamment les pratiques de pays pourtant alliés de la France. Franceinfo résume ce que l'on sait de ce scandale international. Un logiciel espion israélien ultra-sophistiqué L'enquête du consortium de journalistes Forbidden Stories porte sur le logiciel-espion de la société israélienne NSO Group : Pegasus. Celui-ci s'introduit dans un smartphone et permet d'en récupérer les messages, photos, contacts et même d'écouter les appels de son propriétaire. Il peut aussi prendre le contrôle du micro, transformant le téléphone en mouchard et géolocaliser l'appareil. Il fait l'objet d'enquêtes dans les médias depuis 2016, à la suite de l'alerte d'un dissident émirati défenseur des droits humains, Ahmed Mansoor, condamné à dix ans de prison. franceinfo Cette fois, le travail des journalistes se fonde sur une liste qu'ils ont obtenue, comptant selon eux 50 000 numéros de téléphone sélectionnés par les clients de NSO depuis 2016 pour une surveillance potentielle. Elle inclut les numéros d'au moins 180 journalistes, 600 hommes et femmes politiques, 85 militants des droits humains ou encore 65 chefs d'entreprises. De nombreux numéros ont été localisés au Maroc, en Arabie saoudite ou au Mexique. Un consortium de journalistes à l'origine des révélations Derrière ces révélations, on retrouve la plateforme Forbidden Stories, qui a coordonné cette enquête de 17 médias internationaux sur le logiciel israélien. La cellule investigation de Radio France en fait notamment partie. Cette plateforme a été lancée en 2017 sur une idée du documentariste français Laurent Richard, avec le soutien de l'ONG Reporters sans frontières.  Ce n'est pas le premier fait d'armes de cette "association à but non-lucratif basée en France et enregistrée sous le nom de Freedom Voices Network", qui dépend du "soutien financier d'organismes philanthropiques" et de "dons du public". Elle s'est donnée pour mission de "poursuivre et publier le travail" de confrères "menacés, emprisonnés ou [qui] ont été assassinés", comme elle l'explique sur son site internet.  Des opposants et des chefs d'Etat visés Sur cette liste figure les numéros de nombreux journalistes. On peut citer, par exemple, celui du Mexicain Cecilio Pineda Birto, abattu quelques semaines après son apparition sur ce document, ainsi que ceux de correspondants étrangers de plusieurs médias dont le Wall Street Journal, CNN, France 24, El Pais ou l'AFP. Le consortium a également révélé que les numéros des journalistes de Mediapart Lénaïg Bredoux et Edwy Plenel figuraient parmi les 10 000 que les services secrets du Maroc ont ciblés. Cet espionnage a coïncidé avec "la répression du journalisme indépendant au Maroc", notamment envers le journaliste d'investigation emprisonné Omar Radi. Amnesty International avait dénoncé en 2020 l'infection du téléphone de ce journaliste par Pegasus. Les numéros de l'ancien Premier ministre Edouard Philippe ainsi que ceux de 14 membres de son gouvernement ont également été visés par un service de sécurité de l'Etat marocain qui utilise Pegasus. Il s'agit notamment de Jean-Yves Le Drian, Christophe Castaner, Gérald Darmanin, Bruno Le Maire ou François de Rugy. Les portables de députés ont aussi été infiltrés comme ceux de Gilles Le Gendre (LREM), François Bayrou (MoDem) ou Adrien Quatennens (La France insoumise).  FRANCEINFO Le chef d'Etat français a lui aussi été potentiellement visé. Rabat a sélectionné l'un de ses numéros en 2019 pour une possible infection de l'un de ses téléphones avec le logiciel Pegasus. Il s'agit du numéro qui avait déjà "fuité" entre les deux tours de la présidentielle de 2017 avec les "MacronLeaks" et qu'Emmanuel Macron continuait à utiliser une fois à l'Elysée. A ce jour, il n'est pas possible d'affirmer que le portable du président français a bien été infecté car le consortium n'est pas en mesure de l'expertiser. Etonnamment, le numéro du roi du Maroc fait lui aussi partie de ceux qui ont été sélectionnés comme cibles potentielles de Pegasus. Tout comme son entourage, que ce soit les membres de la famille royale ou le personnel. Une contre-attaque judiciaire lancée  En France, le site d'information Mediapart et l'hebdomadaire satirique Le Canard enchaîné ont annoncé dès lundi qu'ils portaient plainte à Paris. Du côté des politiques, des dépôts de plainte sont aussi en cours. Le député Cédric Villani, lui aussi ciblé, a annoncé mercredi à franceinfo qu'il allait le faire "pour marquer le coup" tandis que La France insoumise a annoncé le même jour saisir elle aussi la justice.  Du côté de l'Elysée, la prudence semble être de mise tant que des investigations n'ont pas été faites. "Si ces faits sont avérés, ils sont très graves. Toute la lumière sera faite sur ces révélations", ainsi assuré la présidence de la République. Selon France Inter, Emmanuel Macron prend l'affaire très au sérieux et des vérifications sont en cours. C'est aussi ce qu'a confirmé Jean Castex, mercredi, sur TF1 : "Nous allons regarder ça de très près, compte-tenu de la gravité potentielle", a affirmé le chef du gouvernement, indiquant que le président avait déjà "ordonné toute une série d'investigations". Le parquet de Paris a aussi ouvert mardi une enquête sur l'espionnage de journalistes français. Dix infractions y sont recensées dont "atteinte à la vie privée", "interception de correspondance", "accès frauduleux" à un système informatique et "association de malfaiteurs". Interrogé par les députés mardi sur la présence de journalistes et politiques français dans la liste Pegasus, le Premier ministre Jean Castex a répondu  que des investigations étaient en cours pour vérifier "la matérialité" des faits allégués. Le président du Sénat, Gérard Larcher, a quant à lui assuré mercredi sur franceinfo être "certain que la délégation parlementaire au renseignement" se saisira de cette affaire. Plusieurs pays et NSO démentent les accusations d'espionnage  Ils nient tous en bloc. Les pays accusés d'avoir eu recours à Pegasus ont tous rejeté ces accusations. Dans un communiqué publié lundi, le Maroc a dénoncé les informations "mensongères" selon lesquelles les services de sécurité du royaume "ont infiltré les téléphones de plusieurs personnalités publiques nationales et étrangères et de responsables d'organisations internationales à travers un logiciel informatique". Même démenti du côté de la Hongrie : "Le directeur général [des services secrets] m'a informé qu'aucune coopération n'a été établie avec les services de renseignement israéliens", a réagi lundi le ministre hongrois des Affaires étrangères en conférence de presse. Le Mexique, accusé d'avoir espionné 25 journalistes, a assuré par la voix de son président, Andrés Manuel López Obrador, que "plus personne n'est espionné, les libertés sont garanties".  De son côté le groupe NSO a, comme à chaque fois, "nié fermement les fausses accusations portées" dans l'enquête. Celle-ci "est bourrée de suppositions erronées et de théories non corroborées, les sources ont fourni des informations qui n'ont aucune base factuelle", écrit-il sur son site. L'ONU demande de nouvelles règles La Haute-Commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Michelle Bachelet, a  affirmé lundi que ces révélations "confirment le besoin urgent de mieux réglementer la vente, le transfert et l'utilisation" de ces technologies de surveillance "et d'en assurer un strict contrôle et autorisation". "Sans cadre réglementaire respectueux des droits de l'homme, il y a tout simplement trop de risques que ces outils soient détournés pour intimider les critiques et réduire au silence ceux qui contestent", a-t-elle ajouté. 

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