Pédocriminalité : les congrégations religieuses créent une Commission de réparation
Véronique Margron, la Présidente du Corref avec Jean-Marc Sauvé, auteur d'un rapport sur les abus sexuels commis au sein de l'Église catholique en France, à Lourdes, le 17 novembre 2021.
Après les évêques, les responsables des congrégations religieuses ont annoncé vendredi la naissance d'une Commission indépendante de reconnaissance et de réparation pour les victimes d'abus sexuels.
Dix jours après les évêques, les responsables des congrégations religieuses ont pris, vendredi 19 novembre, à Lourdes des mesures à destination des victimes de pédocriminalité, avec la création d'une Commission indépendante de reconnaissance et de réparation.
"Nous avons voté la création de la Commission indépendante de reconnaissance et de réparation" (Cirr), par un vote "unanime", a déclaré à l'AFP Véronique Margron, présidente de la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref).
Il s'agit d'une structure distincte de l'Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (Inirr) annoncée le 8 novembre par les évêques de France et présidée par la juriste Marie Derain de Vaucresson.
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La Cirr aura pour mission première de reconnaître la parole de la victime, de lui "donner foi". "C'est un acte de réparation", a expliqué sœur Margron à l'issue d'une assemblée générale de cette organisation qui s'est tenue pendant quatre jours à Lourdes.
"À partir de là, selon le souhait de la victime, la commission fera médiation -soit elle même, soit via d'autres médiateurs- avec l'institut religieux concerné", dont est issu l'agresseur de la victime, pour une éventuelle indemnisation financière.
Selon elle, "tout l'art de cette commission sera d'obtenir un consensus" entre les deux parties.
Les quelque 300 responsables de la Corref, qui représente environ 30 000 moines, moniales, frères et soeurs de l'Église, ont aussi voté la création d'un fonds subsidiaire de dotation "pour le moment alimenté à hauteur de 500 000 euros".
Il servira lorsque l'institut religieux n'existe plus ou lorsqu'il est notoirement insolvable, a précisé soeur Margron.
"Responsabilité collégiale et spirituelle"
Le fonctionnement (bureaux, secrétariat, etc.) de la Commission sera "assumé par les congrégations féminines". "C'est notre façon de rendre compte de notre responsabilité", a souligné sœur Margron.
Le fonds de dotation sera "surtout alimenté par les instituts masculins, qui paieront une cotisation par nombre de religieux en France", a-t-elle précisé.
Ces décisions montrent que le "fruit est mûr", s'est félicitée la dominicaine, réélue jeudi pour un nouveau mandat de quatre ans à la tête de la Corref. Très impliquée dans l'écoute des victimes, Véronique Margron plaidait depuis plusieurs mois pour mettre en place une démarche de justice réparatrice en plusieurs étapes, comportant la reconnaissance, avant la dimension de réparation financière.
En avril, six mois avant les évêques, la Corref avait reconnu "la responsabilité collégiale et spirituelle de l'ensemble de la vie religieuse" dans les violences sexuelles.
Publié début octobre, le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église présidée par Jean-Marc Sauvé a secoué toute l'institution en révélant l'ampleur de la pédocriminalité dans l'Église catholique depuis 1950.
Il a estimé à 330 000 le nombre de personnes de plus de 18 ans ayant fait l'objet de violences sexuelles depuis 1950, quand elles étaient mineures, de la part de clercs, religieux ou personnes en lien avec l'Église.
Jean-Marc Sauvé a participé à la rencontre de la Corref, mercredi, insistant, lors d'une table ronde, sur la nécessité d'une "démarche de reconnaissance personnelle" à l'égard des victimes.
Avec AFP