Mort d'Adama Traoré : "Les juges cherchent à imposer leur vérité", selon l'avocat de la famille, après une nouvelle demande d'expertise
Les juges d'instruction ont ordonné une nouvelle expertise médicale pour déterminer la cause du décès du jeune homme en juillet 2016.
"Les juges refusent d'accepter la vérité mais cherchent à imposer leur vérité", déclare à franceinfo Yassine Bouzrou, avocat de la famille d'Adama Traoré, mort le 19 juillet 2016 lors de son interpellation à Beaumont-sur-Oise (Val-d'Oise) par trois gendarmes, alors que les juges d'instruction ont demandé aux médecins belges qui avaient rendu une expertise en janvier 2021 mettant en cause l'action des gendarmes dans la mort du jeune de 24 ans de revoir leur copie, après la mort récente de l'un des quatre experts.
Rendue le 27 janvier, cette expertise avait conclu qu'Adama Traoré avait été victime d'une "asphyxie de contrainte" provoquée par une "compression thoraco-abdominale" après des "manœuvres d’immobilisation à caractère potentiellement asphyxiant", lors de son interpellation par les trois gendarmes. Le 30 juin dernier, les juges avait ordonné un complément d'expertise médicale, les enquêteurs ayant recueilli de nouveaux témoignages et éléments médicaux, mais la mort de l'un des quatre médecins en octobre pousse la magistrate à le remplacer et à demander à nouveau ce complétement d'expertise qui était attendu.
10 expertises médicales, 12 juges
Dans son ordonnance datée du mardi 16 novembre et que franceinfo a pu consulter, les juges d'instruction chargés du dossier demandent effectivement aux médecins belges de remettre une nouvelle expertise avant le 15 février 2022. Cette nouvelle demande d'expertise est justifiée dans cette ordonnance par la mort récente de l'un des quatre experts belges qui avaient rendu la précédente expertise. En comptant les expertises ordonnées par les juges et les contre-expertises demandées par la famille, il s'agira de la dixième expertise médicale d'Adama Traoré.
Yassine Bouzrou déplore une affaire qui s'enlise, avec douze juges d'instruction qui se sont déjà succédés sur ce dossier depuis plus de cinq ans. Sollicité, Me Rodolphe Bosselut, avocat de deux des trois gendarmes, déclare ne pas souhaiter faire de commentaire.
Le 27 septembre dernier, la soeur d'Adama Traoré, Assa Traoré, avait déposé une plainte contre la juge d'instruction en charge de cette enquête pour "dissimulation de preuves, faux en écritures publiques et tentative d'escroquerie au jugement", accusant la justice d'exercer des pressions sur les experts médicaux.