Fusillades à Marseille : Samia Ghali regrette la banalisation de la violence et le "yoyo" des effectifs de police
La deuxième adjointe à la mairie se dit "très en colère" car elle avait prédit cette montée en puissance de la criminalité à Marseille. "Pendant cinq ans, on nous a retiré des policiers", ce qui a notamment permis, selon elle, aux cartels de prospérer.
À Marseille, 10 jeunes ont été tués depuis le début de l’été dans des fusillades sur fond de trafic de drogue. Samia Ghali, deuxième adjointe à la mairie de Marseille, a regretté vendredi 13 août sur franceinfo qu'on "utilise le terme de règlement de comptes comme si c'était entré dans les mœurs et que ce soit banalisé".
franceinfo : Comment expliquez-vous ce chiffre particulièrement élevé ?
Samia Ghali : Il y a eu beaucoup de victimes collatérales, c'est important de le rappeler et pour leurs familles, de ne pas salir leur mémoire. Cette jeune fille de 17 ans qui venait d'avoir son bac n'avait malheureusement aucun rapport avec l'histoire et a perdu la vie. C'est une situation où il n'y a plus de notion de bien et du mal, il n'y a plus la notion de se dire qu'on est en train de commettre un meurtre. On utilise le terme de règlement de comptes comme si c'était entré dans les mœurs, on a le droit de s'autodéfendre sans que cela ne fasse réagir quiconque et que ce soit banalisé.
Comment fait-on pour éviter cette banalisation ?
Il y a la question du trafic des armes qui est inquiétant en France, pas seulement à Marseille.
Je dirai que cela devient l'accessoire nécessaire dans ces territoires. C'est ça qui devient inquiétant. Ce n'est pas normal. Il faut un travail de fond, un travail d'approche global. Il faut travailler avec l'Éducation nationale, avec les services sociaux, la formation. Ce sont tous ces services qui doivent être mis en relation pour voir là où ça ne va pas. Cela a été mis en place et cela a porté ses fruits. Ça s'est arrêté du jour au lendemain est on est reparti dans une vague meurtrière.
Comment expliquez-vous que ce soit à Marseille que le bilan soit le plus lourd ?
Parce que Marseille avait un peu d'avance sur le reste de la France. Quand vous regardez de près, il y a des meurtres aussi en région parisienne et peut-être qu'on en parle moins ou qu'ils sont moins spectaculaires parce que cela ne se passe pas dans la rue.
Vous avez des centaines de millions d'euros qui sont amassés par ces trafics où l'on vend des drogues dures. Cela génère cette délinquance de haut niveau.
Quelles actions avez-vous mises en place ?
D'abord il y a l'État qui doit prendre sa part dans cette situation. L'État a fait le choix d'arrêter l'approche globale qui avait porté ses fruits. On vient d'avoir 60 policiers qui ont été affectés à Marseille, mais pendant cinq ans on nous a retiré des policiers. Quand on est une ville comme Marseille on ne retire pas des policiers. On ne peut pas s'amuser au yoyo. Un coup on a des policiers, un coup on nous les enlève, un coup on ne les remet. Les chiffres montrent que quand il y avait l'approche globale et la police, les violences ont fortement diminué. À ces problèmes se rajoutent les migrants qui squattent dans des quartiers et on se retrouve avec des guerres de migrants. Parfois des trafiquants sous-louent des appartements à des migrants. Il y a 10 ans, j'ai dit que cela allait arriver. On y est. C'est pour ça que je suis très en colère.