France : Élisabeth Borne échappe à la censure, malgré le soutien du RN à la Nupes
La députée Mathilde Panot a défendu la motion de censure au nom du groupe LFI à l'Assemblée nationale.
Les députés français ont sans surprise rejeté, lundi, les trois motions de censure déposées par la Nupes et par le Rassemblement national sur le budget l'État et de la Sécurité sociale. Les volets recettes du projet de loi de finances 2023 (PLF) et du financement de la Sécurité sociale (PLFSS) ont de fait été adoptés en première lecture.
L'Assemblée nationale a rejeté lundi 24 octobre trois motions de censure sur le budget l'État et de la Sécurité sociale, malgré l'annonce surprise d'un soutien du RN à la gauche Nupes, la Première ministre dénonçant "l'alliance contre-nature" des oppositions. Ces trois votes valent adoption en première lecture des volets recettes du projet de loi de finances 2023 (PLF) et du financement de la Sécu (PLFSS).
Pour le budget de l'État, le Rassemblement national a fait un coup politique en apportant son soutien à la motion de gauche Nupes, repoussée à 50 voix près, avec 239 votes sur les 289 nécessaires. Trois écologistes n'ont pas pris part au scrutin, dont Jérémie Iordanoff, qui "refuse de mêler sa voix" à celles de l'extrême droite.
Marine Le Pen a ainsi voulu viser les LR, taxés "d'alliés d'Emmanuel Macron" pour ne pas avoir voté la censure avec le reste des oppositions.
Dans la foulée, l'Assemblée a largement rejeté la motion du RN, qui a reçu le soutien du non-inscrit Nicolas Dupont-Aignan et d'un seul député LFI, Jean-Philippe Nilor.
Dans l'hémicycle, Élisabeth Borne s'en est prise aux "excès" des oppositions. La Première ministre a reproché à la coalition de gauche (LFI, PS, EELV, PCF) des "contre-vérités", jugeant que "l'insoumission a gagné la partie", dans un "pays alternatif où Jean-Luc Mélenchon" aurait remporté la présidentielle.
"Désordre"
La cheffe du gouvernement a ensuite pointé le "simplisme et l'outrance" du Rassemblement national, dont "les fondamentaux idéologiques n'ont pas bougé". "Vous visez le désordre et la discorde au prix d'une alliance contre-nature avec la Nupes", a-t-elle lancé.
Car Marine Le Pen venait d'annoncer son soutien à la motion Nupes, contre "l'arrogance" de l'exécutif. Au "RN, nous ne craignons pas les menaces de dissolution", a assuré la présidente du groupe d'extrême droite dans une allusion à une menace brandie par Emmanuel Macron.
RN comme Nupes ont décrit une atmosphère de "fin de règne" avec le recours au 49.3.
Oratrice de la coalition de gauche, la présidente du groupe écologiste Cyrielle Chatelain a accusé l'exécutif de "museler" l'Assemblée. Elle a reproché à la Première ministre son "inaction" climatique. L'Insoumise Mathilde Panot a épinglé pour sa part la "macronarchie" et "l'autoritarisme" d'Emmanuel Macron.
Les oppositions reprochent au gouvernement de "balayer" des amendements votés par l'Assemblée, notamment la hausse de la taxation des "superdividendes", proposée par le MoDem, membre de la majorité.
Les macronistes leur renvoient la responsabilité du "blocage". Et la cheffe de file des députés Renaissance, Aurore Bergé, s'en est prise à l'alliance "de circonstance" des "extrêmes" dans "le seul but de faire tomber le gouvernement".
Ces motions répondent à l'article 49.3 de la Constitution activé à deux reprises mercredi et jeudi par la Première ministre pour faire passer sans vote les parties recettes du projet de loi de finances et de financement de la Sécu.
Dans la soirée, les députés ont rejeté une autre motion Nupes présentée par le socialiste Jérôme Guedj. Les députés vont pouvoir reprendre mardi la suite des discussions sur la partie dépenses de ce budget de la Sécu 2023.
Depuis les débuts de la Ve République, c'est la première fois que trois motions de censure sont examinées dans la même journée.
"Personne n'y croit"
À droite, le chef de file des députés LR, Olivier Marleix, a dénoncé le "rapprochement des extrêmes" : "ces motions de censure, personne n'y croit vraiment, pas même ceux qui les ont déposées. Mais nous n'hésiterons pas à en déposer une nous-mêmes si les circonstances l'exigent", a-t-il assuré.
Une seule motion de censure a été adoptée sous la Ve République, en 1962, faisant tomber le gouvernement de Georges Pompidou.
Le 49.3 est une "décision lourde" mais qui "s'imposait", a affirmé Élisabeth Borne. "Nous ne pouvions pas laisser la France sans budget et les Français sans protection."
En l'absence de majorité absolue pour les macronistes à l'Assemblée, ces deux 49.3 sont probablement les premiers d'une longue série durant cet automne budgétaire.
Dans la version du budget soumise au 49.3 lundi en première lecture, l'exécutif a conservé une centaine d'amendements votés pendant le débat, mais ni du RN ni de LFI, et pas les plus sensibles.
Mais "je ne considère pas que nous sommes au bout du chemin", a dit Élisabeth Borne, qui a demandé au gouvernement de travailler sur le "dividende salarié", pour le "partage de la valeur".
Le gouvernement revendique un budget de "protection" des Français, grâce à un "bouclier tarifaire" de 45 milliards d'euros pour limiter à 15 % la hausse des tarifs réglementés de l'électricité et du gaz.
Avec AFP