Facebook devient "Meta" : quatre questions sur un changement de nom
Fini le "f" sur fond bleu, place à un symbole de l'infini stylisé en "m". Au détour d'une longue présentation destinée à expliquer sa "vision du métaverse", l'univers virtuel sur lequel il mise pour se différencier de ses concurrents, Mark Zuckerberg a annoncé, jeudi 28 octobre, que Facebook serait renommé Meta.
Un changement de nom qui intervient alors que le réseau social le plus populaire de la planète traverse une crise inédite après la divulgation par une ancienne employée de documents mettant au jour les difficultés de Facebook à résoudre ses problèmes structurels.
Qu'a annoncé Mark Zuckerberg ?
"Il est temps pour nous d'adopter un nouveau nom d'entreprise pour englober toutes nos activités", a lancé le fondateur de la firme californienne. Propriétaire de WhatsApp, Instagram, mais également de la marque de casque de réalité virtuelle Oculus VR, Facebook veut désormais se détacher de l'image de réseau social sur laquelle la société s'est construite depuis sa création il y a dix-sept ans.
Selon Mark Zuckerberg, il n'était plus possible de conserver la même dénomination sociale alors que l'entreprise possède désormais de nombreuses applications. "Notre mission reste la même : mettre les gens en relation", a-t-il ajouté. Le fondateur du géant des technologies a donc choisi "Meta" – "au-delà" en grec ancien – pour montrer qu'il y a "toujours plus à construire" et un nouveau logo bleu qui s'inspire du symbole de l'infini en mathématiques.
Est-ce que le site et l'application Facebook vont changer de nom ?
Non. Facebook restera Facebook, de même que WhatsApp et Instagram, qui garderont leur nom. En fait, l'entreprise de Mark Zuckerberg imite Google, qui avait annoncé en 2015 sa volonté de regrouper ses activités sous une entité baptisée "Alphabet".
Pour le grand public, la principale différence risque d'apparaître dans les écrans d'accueil et de connexion à leurs applications. Le discret "from Facebook" ("par Facebook") visible lors de l'ouverture de WhatsApp ou d'Instagram risque de faire d'ici peu place à un "from Meta".
L'écran de connexion de l'application Instagram. (FACEBOOK)
Pourquoi avoir fait ce choix ?
"J'ai beaucoup réfléchi à notre identité. (...) Au fil du temps, j'espère que nous serons perçus comme une entreprise de métaverse", a justifié Mark Zuckerberg. "Meta" est en effet un clin d'œil direct au métaverse, cet univers parallèle virtuel sur lequel Facebook mise gros, puisque l'entreprise a récemment annoncé la création de 10 000 emplois en Europe pour le développer.
Basé notamment sur le développement des casques de réalité virtuelle, ce métaverse permettrait, par exemple, de danser en boîte de nuit avec ses amis sous la forme d'un avatar, ou encore suivre une réunion entre collègues dans un bureau numériquement reconstitué à l'identique... "C'est la fusion d'un univers virtuel avec des fonctionnalités qui sont, elles, bien ancrées dans le réel", résumait mi-septembre auprès de franceinfo Julien Pillot, économiste enseignant à l'Inseec et spécialiste des marchés technologiques. "Dans cet univers, on pourrait greffer des éléments très concrets, des concerts ou des boutiques, dans lesquels on pourrait vivre des expériences."
Extrait de la démonstration du "métaverse" par Mark Zuckerberg, jeudi 28 octobre 2021.
Lors de sa présentation, jeudi, Mark Zuckerberg a assuré que cette technologie, encore balbutiante, serait à terme "le successeur de l'internet mobile". Durant une démonstration, il a montré un avatar numérique de lui-même se déplaçant dans différents mondes numériques tout en parlant à ses amis et à sa famille. "Vous aurez vraiment l'impression d'être là avec d'autres personnes", s'est enthousiasmé l'entrepreneur.
Dans quel contexte cette annonce intervient-elle ?
Ce changement de nom intervient surtout alors que Facebook traverse une crise inédite. La colère des autorités et de la société civile s'est en effet amplifiée ces dernières semaines contre l'entreprise, à la faveur des révélations d'une lanceuse d'alerte, Frances Haugen.
Cette ingénieure, ancienne spécialiste des "classements algorithmiques" de Facebook, a quitté la firme au printemps en emportant avec elle des milliers de documents confidentiels qui mettent en lumière les difficultés du réseau social à résoudre les difficultés structurelles auquel il fait face (contenus toxiques sur Instagram pour les adolescents, désinformation qui nuit à la démocratie...).
Ce nouveau nom a donc été interprété par certains comme une manœuvre du groupe californien pour détourner l'attention. "Changer de nom ne change pas la réalité : Facebook détruit notre démocratie et c'est le colporteur en chef de la désinformation et de la haine", a réagi une ONG de militants anti-Facebook (en anglais), ironiquement baptisée "Le vrai conseil de surveillance de Facebook".
"Meta, c'est-à-dire 'nous sommes un cancer pour la démocratie qui se métastase en machine de surveillance et de propagande pour soutenir les régimes autoritaires et détruire la société civile... et faire des bénéfices !'", a de son côté asséné l'élue démocrate Alexandria Ocasio-Cortez.