Crash du Rio-Paris : "On va affronter deux entités majeures de l'économie française, Airbus et Air France", confie la mère d'une victime
Le 1er juin 2009, le Rio-Paris s'abîmait dans l'Atlantique, coutant la vie à 228 personnes. Le procès s'ouvre ce lundi devant le tribunal correctionnel de Paris. Danièle Lamy, qui a perdu son fils de 37 ans dans la catastrophe, a confié ses attentes à franceinfo.
"On va affronter deux entités majeures de l'économie française, Airbus et Air France. C'est David contre Goliath", reconnaît Danièle Lamy, la présidente de l'association Entraide et Solidarité AF447, lundi 10 octobre sur franceinfo, quelques heures avant le début du procès du crash du vol Rio-Paris au tribunal correctionnel de Paris. Son fils, Eric Lamy, est mort le 1er juin 2009 dans cet accident ainsi que 227 autres personnes. Il avait 37 ans.
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Airbus et Air France, qui contestent toute faute pénale, sont jugées pour "homicides involontaires". Autotal, 489 personnes se sont portées parties civiles. Danièle Lamy espère "une condamnation ferme" de la compagnie aérienne et du constructeur.
franceinfo : Dans quel état d'esprit êtes-vous juste avant le début de ce procès ?
Danièle Lamy : C'est à la fois un soulagement parce que nous attendons ce procès depuis beaucoup d'années, mais c'est quand même avec angoisse parce qu'on va revivre des moments douloureux. C'est aussi avec fébrilité parce qu'on a bien conscience qu'on va affronter deux entités majeures de l'économie française, Airbus et Air France. C'est David contre Goliath. (…) C'est un procès que nous attendons depuis 13 ans. Notre association n'a jamais lâché. Nous nous sommes battus avec détermination, avec ténacité, avec obstination même contre vents et marées. On a été aidés par des conseillers techniques qui ont fourni des éléments extrêmement importants aux avocats et ça a permis de pouvoir obtenir aujourd'hui un procès. Les familles vont peut-être enfin obtenir des réponses à leurs questions.
Les investigations ont montré que les pilotes avaient été désorientés par le givrage des sondes de vitesse Pitot. Le fonctionnement de ces sondes sera au cœur du procès. Attendez-vous des éclaircissements à ce sujet ?
On souhaite obtenir la lumière sur l'enchaînement de ces défaillances. Les sondes Pitot ne sont pas un problème nouveau, c'est un problème qui était connu de toute la communauté aéronautique. L'année qui a précédé le crash, il y a eu une recrudescence exponentielle des incidents de givrage des sondes Pitot, jusqu'au crash.
Tout en ayant connaissance de la dangerosité de ces défaillances, de ces sondes anémométriques, il a attendu que 228 personnes décèdent dans ce crash. (…) Dès 2012, le bureau d'enquêtes et analyses et les experts judiciaires avaient rendu un rapport qui finalement avait fait penser aux familles que le procès aurait lieu dans les meilleurs délais, ça n'a pas été le cas. Airbus a demandé une première contre-expertise, elle a eu lieu, elle a été annulée pour vice de forme. L'entreprise en a demandé une seconde et les contre-experts ont fourni un rapport définitif complètement à l'inverse du rapport des premiers experts. Donc ce sera très certainement une bataille d'experts.
Airbus et Air France contestent toute faute. Qu'attendez-vous de ce procès ?
On attend une condamnation exemplaire, une condamnation ferme. L'un des objectifs de l'association était d'œuvrer pour qu'un tel accident ne se reproduise plus. Nous sommes dans l'attente d'un jugement qui ne dégagera pas les responsabilités de ceux qui détiennent le pouvoir parce que toute impunité serait préjudiciable et les familles ne le comprendraient pas. Le procès va aussi permettre de respecter la mémoire de ces 228 victimes innocentes. Que leur sacrifice ne soit pas vain.