Covid-19 : la crise fait peser un "risque existentiel" sur 120 clubs de football européens
Selon un rapport de l'UEFA dévoilé vendredi, la crise sanitaire devrait coûter plus de 8 milliards d'euros aux clubs européens de football sur deux saisons. L'instance européenne estime qu'il existe un "risque existentiel" pour 120 d'entre eux.
C'est à ce jour le chiffrage le plus précis concernant l'impact du Covid-19 sur le football européen. L'UEFA a dévoilé, vendredi 21 mai, un rapport de 112 pages décrivant les conséquences de la pandémie qui porte un brutal coup d'arrêt au secteur après vingt ans de croissance ininterrompue. L'instance européenne estime qu'elle devrait coûter plus de 8 milliards d'euros aux clubs sur deux saisons et qu'elle fait peser un risque existentiel sur 120 d'entre eux.
En décrivant un secteur stoppé net dans sa course aux recettes, ce document éclaire du même coup la brève aventure de la Super Ligue, projet de tournoi privé censé être très lucratif, et qui a failli faire imploser le foot européen en avril. Car les constats de l'UEFA, comme des 12 clubs mutins qui ont provisoirement renoncé à faire sécession, se rejoignent : la pandémie n'a épargné aucun club, les privant "au minimum" de 10 % des revenus attendus en 2019/20 et 2020/21.
Sur ces deux saisons, l'instance européenne évalue à 8,7 milliards d'euros le manque à gagner cumulé au sein de ses 55 championnats, dont 7,2 milliards d'euros pour les 711 clubs les plus importants et 1,5 milliard pour les autres.
Plus précis et documenté que les chiffrages précédents
Intégrant tous les comptes déjà publiés, ainsi que les renégociations de droits TV et une série de paramètres, cette estimation est de loin la plus précise sur l'impact économique du Covid-19 pour le football professionnel.
À l'automne dernier, la Fifa avait estimé que la pandémie risquait d'amputer de 14 milliards de dollars "la totalité de l'économie du football" pour ses 211 fédérations, un calcul qu'elle n'a jamais détaillé depuis.
Le syndicat européen des clubs (ECA) avait de son côté chiffré à 4 milliards d'euros le manque à gagner pour les clubs européens en 2019-20 et 2020-21, avant que son ancien président Andrea Agnelli n'évoque en décembre une fourchette de "6,5 à 8,5 milliards d'euros".
Diminution de toutes les sources de revenus
Le huis clos a lourdement pesé, explique l'UEFA en se concentrant sur les 711 clubs de l'élite : les recettes de billetterie devraient fondre de 3,6 à 4 milliards d'euros au total sur deux ans, et le flou demeure sur le retour à des stades pleins.
Les revenus commerciaux devraient eux diminuer de 2,4 à 2,7 milliards d'euros, tandis que les droits TV seront amputés de 1,2 à 1,4 milliard sur ces deux saisons, avec déjà des renégociations à la baisse "de 700 millions d'euros" au-delà de 2021 pour les diffuseurs de l'UEFA et des cinq grands championnats.
Le choc est particulièrement violent en Ligue 1 à cause du retrait de Mediapro, qui explique la plongée "d'environ 30 %" des revenus globaux des clubs français, les plus touchés en Europe avec les clubs écossais.
La crise est venue interrompre deux décennies dorées, avec une croissance moyenne de 8,2 % par an depuis 1999, jusqu'à atteindre en 2019 un revenu cumulé de 23 milliards d'euros pour les 711 écuries européennes - les clubs anglais caracolant en tête.
Les salaires continuent de gonfler
Mais pendant ce temps, les salaires ont aussi gonfléau point d'absorber plus de 60 % des recettes, un ratio "significativement supérieur à toute autre industrie", observe l'UEFA, "y compris la banque d'investissement" et ses traders couverts de bonus.
Or les joueurs, au cœur de la rivalité sportive donc en position de force, n'ont consenti qu'un modeste effort face à la pandémie : les clubs ont économisé environ deux milliards d'euros au total, dont un milliard d'euros de salaires sur les deux saisons.
Leurs revenus opérationnels devraient donc fondre "de 5,3 à 6,2 milliards d'euros" sur la période, alors qu'ils accusaient déjà en 2019 des pertes nettes notamment dues à l'amortissement des transferts.
Côté trésorerie, un enjeu clé vu les hauts niveaux d'endettement du secteur, l'UEFA prévoit un "risque existentiel" pour environ 120 clubs tandis que les autres combleront leurs pertes en empruntant à nouveau ou en réclamant une rallonge à leurs propriétaires.
Avec AFP