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Économie et marchés

COP26 : la fin des centrales à charbon, un horizon lointain malgré l'urgence

Alors que débute la COP26 à Glasgow, les États du G20 se sont engagés, dimanche, en faveur de l'arrêt des financements internationaux des centrales à charbon. "Un acquis majeur" selon le président français, pourtant bien loin de sonner le glas de l’industrie énergétique la plus polluante du monde. "Une vraie révolution, qui n'était pas acquise il y a quelques mois." C'est en ces termes que le président français, Emmanuel Macron, a salué l’engagement des acteurs du G20, réunis dimanche 31 octobre à Rome, de mettre fin au financement international des centrales à charbon dès 2021. Alors qu’a débuté à Glasgow la COP26, la limitation de l’utilisation des énergies fossiles et notamment du charbon, énergie la plus polluante au monde, est considérée comme une priorité pour rester sous la barre des 1,5 °C de réchauffement climatique d'ici la fin du siècle. Pourtant, si l’arrêt de ces subventions constitue une avancée non négligeable, aucun engagement commun n'a été pris pour limiter l’utilisation du charbon à l'échelon national. Une mesure "fortement dissuasive" Présenté par Emmanuel Macron comme "l’acquis majeur de ce G20", la fin du financement international des centrales à charbon n’est pourtant pas une nouveauté. Cet engagement avait déjà été pris par de nombreux acteurs dont le G7, l’OCDE, la Corée du Sud, le Japon, et surtout la Chine, plus gros consommateur de charbon au monde mais également acteur majeur de la production de charbon hors de ses frontières. À ce titre, le discours du président chinois, Xi Jinping, devant l’Assemblée générale de l’ONU le 21 septembre, durant lequel le dirigeant a annoncé que Pékin ne bâtirait plus à l’étranger de nouveaux projets énergétiques au charbon, a été salué comme une initiative majeure. Il s’agit d’un "tournant historique pour s’éloigner de l’énergie fossile la plus sale du monde", indiquait alors le World Resources Institute dans un communiqué. L’organisation américaine rappelle que sur "la dernière décennie", la Chine a investi "des milliards de dollars" dans des usines à charbon dans d’autres pays. "L’annonce du G20 sur l’arrêt du financement international des centrales à charbon est très tardive mais toutefois importante, notamment du fait de l’engagement de l’Australie, le premier exportateur mondial, jusqu’ici hostile à de telles mesures", souligne Pierre Cannet, directeur de plaidoyer chez WWF France, responsable du programme énergie, contacté par France 24. "Cette mesure envoie un message clair : les centrales à charbon sont des investissements risqués. À ce titre, elle est fortement dissuasive pour les entreprises et banques privées qui en financent, comme pour les États qui souhaitent en créer sur leur sol." L’enjeu de la production nationale Selon le World Resources Institute, plusieurs pays qui ont bénéficié de financements pour le charbon dans le passé, comme le Bangladesh, le Pakistan, l'Indonésie, les Philippines et le Kenya, ont commencé à renoncer à construire de nouvelles centrales électriques au charbon. En mai dernier, Jakarta, deuxième plus gros exportateur de charbon au monde, a annoncé la fin de l’ouverture de nouvelles centrales sur son sol à partir de 2023, ainsi que la fermeture graduelle des unités existantes. Pour autant, la zone Asie-Pacifique, qui selon le think tank Carbon Tracker concentre les trois quarts de la consommation mondiale ainsi que plus de 80 % des projets de centrales, est loin d’en avoir fini avec le charbon. La Chine, qui représente à elle seule 54 % de la consommation mondiale et 27,7 % des émissions de gaz à effet de serre, n’est pas parvenue jusqu’ici à réduire sa consommation. Si les énergies renouvelables y gagnent du terrain, les centrales à charbon, qui représentent toujours 57,7 % de son énergie produite, continuent de croître. Selon Greenpeace, 24 nouvelles centrales ont été approuvées dans la première moitié de l’année 2021, alors que le pays en compte déjà plus de 1 000 sur son sol. Deuxième pays producteur d’électricité à base de charbon, l’Inde continue, comme son voisin chinois, d’investir dans ces installations qui fournissent 70 % de ses besoins nationaux. Loin de limiter sa production de charbon, l’Inde, troisième plus gros émetteur de gaz à effet de serre derrière la Chine et les États-Unis, a ouvert cette année le marché des mines à la concurrence, comptant sur les investissements étrangers dans le charbon pour relancer son économie durement affectée par la crise du Covid-19. Le rebond de la crise énergétique Si le charbon représentait toujours, en 2020, 27 % de la production d’énergie mondiale, entre le pétrole (31 %) et le gaz (25 %), et bien devant les énergies renouvelables (6 %), sa production a néanmoins connu une légère baisse de 2,5 % sur les cinq dernières années du fait des réformes écologiques misent en place par de nombreux États. Mais cette tendance, pourtant modeste, semble aujourd'hui en passe de s’inverser dans un contexte de crise énergétique mondiale provoquée par une reprise économique post-Covid plus rapide que prévue. Alors que les prix du gaz s’envolent, l’année 2021 a connu une explosion des importations de charbon, notamment en Chine et en Inde, contraintes de faire tourner leurs centrales à plein régime. Confronté à des pannes d’électricité, Pékin, qui avait pourtant annoncé vouloir limiter le nombre de mines de charbon, vient d’en autoriser la réouverture. >> À lire aussi : "Victime de pannes de courant, la Chine face à sa dépendance au charbon" En Europe également, certains pays en passe de tourner la page du charbon ont relancé leur production, comme le Royaume-Uni ou bien encore la France, bien que celle-ci demeure faible, représentant respectivement 3 % et 2 % de leur mix énergétique.

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